Simplifier les règles de transmission, favoriser l'accès au financement et développer l'intéressement des salariés: le gouvernement a dévoilé lundi les grandes lignes de son "plan d'action pour les entreprises", destiné à "faire grandir" les PME françaises face à la concurrence internationale.
"Nos entreprises sont trop petites: elles n'ont pas la taille critique pour s'internationaliser et exporter davantage", a souligné le ministre de l'Economie, Bruno le Maire, en lançant une série de consultations préalables à un projet de loi qui sera débattu au printemps.
"Il faut que nous ayons des entreprises qui aient les reins suffisamment solides pour innover et exporter", a insisté M. le Maire, accompagné de trois secrétaires d'Etat, Benjamin Griveaux (Economie), Jean-Baptiste Lemoyne (Affaires étrangères) et Mounir Mahjoubi (Numérique), devant un parterre de patrons et de parlementaires.
La France, selon l'Insee, ne compte que 4.600 entreprises de taille intermédiaires (ETI) -- réalisant entre 50 millions et 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires et employant de 250 à 5.000 salariés -- pour un total de 3,6 millions d'entreprises.
C'est "trois fois moins qu'en Allemagne" et "deux fois moins qu'en Italie", souligne-t-on à Bercy. Une faiblesse qui explique en partie le manque de compétitivité de l'économie française, pénalisée par une balance commerciale structurellement déficitaire.
"Nous créons beaucoup d'entreprises, mais beaucoup d'entre elles ne franchissent pas la première année d'existence. Et celles qui réussissent à passer ce cap peinent à grandir", insiste le ministère. Il attribue cette difficulté à un manque de financements en fonds propres, mais aussi à l'existence de "freins culturels".
- six chantiers -
Pour inverser la tendance, Bercy a décidé de faire plancher des binômes "parlementaire/chef d'entreprise" sur six chantiers: croissance et transmission des entreprises, partage de la valeur et engagement sociétal, financement, numérisation et innovation, simplification, et conquête de l'international.
Parmi les chefs d'entreprise chargés d'animer ces "groupes de travail" figurent Eric Kayser, fondateur du réseau de boulangerie Maison Kayser, Sylvain Orebi, qui dirige le distributeur de thé Kusmi Tea, ou Alice Zagury, fondatrice de la société d'investissement the Family.
Ces derniers pourront travailler, durant sept semaines, dans un espace de "coworking" installé au quatrième étage de l'hôtel des ministres, à Bercy, et destiné à accueillir des "acteurs de la société civile", dont les partenaires sociaux et les organisations professionnelles.
Le dispositif, baptisé "Bercy lab", vise à "casser les cloisons de Bercy", "rendues célèbres par le réalisateur Cédric Klapisch" dans son film "L'Auberge espagnole", a expliqué le secrétaire d'Etat Benjamin Griveaux. C'est une façon d'"ouvrir les portes et les fenêtres" du ministère à la société civile.
- "pas un happening" -
Méthode "participative" ou bien simple gadget? "Ce n'est pas un happening", a assuré Bruno Le Maire, ajoutant que les débats seraient "organisés" de façon à s'appuyer au maximum sur les propositions formulées sur le terrain.
Les six groupes de travail, selon Bercy, rendront leurs conclusions le 10 décembre. Une consultation publique sera alors organisée, en vue d'une rédaction du projet de loi durant le mois de février, puis d'une discussion au Parlement courant avril.
"L'objectif, c'est aussi que les salariés soient davantage associés à la marche des entreprises", a souligné M. le Maire, réitérant sa volonté d'intégrer dans le projet de loi des dispositions sur la "participation" et "l'intéressement", afin de les rendre "avantageux pour tous, y compris les bas salaires".
L'idée, c'est de "réconcilier les Français et l'entreprise", a ajouté Benjamin Griveaux. Or "le meilleur moyen de les réconcilier, c'est de faire en sorte que les fruits du travail qui se réalise à l'intérieur de l'entreprise soient mieux partagés", a-t-il ajouté.
Une démarche accueillie avec prudence par le Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), favorable à la méthode de consultation voulue par le gouvernement, mais vigilante sur les dispositifs et les réformes qui pourraient en découler.
Il ne faut pas "que ce plan, riche de bonnes intentions, ne débouche au final sur de nouvelles obligations pour les entreprises", a prévenu dans un communiqué l'organisation patronale, réservée notamment sur l'extension du mécanisme de participation aux petites entreprises.