par Brendan O'Brien et Carlos Barria
MINNEAPOLIS, Minnesota (Reuters) - Affrontements entre manifestants et forces de l'ordre à proximité de la Maison blanche à Washington et à Boston, pillages dans le sud de la Californie: les Etats-Unis ont vécu dimanche soir une sixième nuit de colères et de troubles consécutifs à la mort lors de son interpellation lundi dernier par la police de Minneapolis de George Floyd, un membre de la communauté afro-américaine.
Des soldats de la Garde nationale ont été déployés dans une quinzaine d'Etats du pays tandis que les autorités locales imposaient des mesures de couvre-feu dans des dizaines de villes, du jamais vu depuis les émeutes ayant suivi l'assassinat de Martin Luther King en 1968.
"Je déteste voir ma ville dans cet état, mais au final, nous avons besoin de justice", témoignait Jahvon Craven, un adolescent de 18 ans rencontré sur une passerelle surplombant l'Interstate 35, dans le centre de Minneapolis, peu avant l'entrée en vigueur du couvre-feu à 20h00.
Dans l'après-midi, sur ce même axe routier pourtant fermé au trafic, le chauffeur d'un camion-citerne avait roulé en direction d'une foule de manifestants sans faire a priori de victimes. Il a été stoppé, extrait du véhicule par des manifestants et molesté avant d'être interpellé par la police.
Le mouvement a commencé à Minneapolis par des manifestations pacifiques consécutives à la mort de George Floyd, 46 ans, qui n'a pas survécu à son interpellation brutale lundi par la police de cette ville du Minnesota.
Dans le contexte ultrapolarisé de la campagne présidentielle et sur fond d'inégalités face à l'épidémie de coronarivus qui a davantage touché les minorités, le mouvement s'est transformé en une nouvelle vague contestataire contre les violences racistes attribuées à la police, parfois émaillée d'émeutes et de pillages violemment réprimés par la police.
L'arrestation et l'inculpation de Derek Chauvin, le policier blanc qui a maintenu son genou sur la nuque de George Floyd alors que ce dernier disait ne plus pouvoir respirer, n'ont pas apaisé les esprits.
"CES GENS SONT DES ANARCHISTES"
A Washington, des manifestants ont allumé des feux de fortune dimanche à proximité de la Maison blanche, soulevant des colonnes de fumée se mêlant aux nuages de gaz lacrymogènes utilisées par la police pour les déloger de ce secteur de la capitale fédérale.
Des violences sporadiques ont éclaté à Boston où des activistes ont jeté des bouteilles sur les forces de l'ordre. Philadelphie a ordonné un couvre-feu entre 18h00 et 06h00.
Selon une chaîne de télévision locale du Kentucky, un homme est mort tôt lundi matin à Louisville, victime d'un tir de la police. WLKY-TV ne précise pas s'il était en train de manifester et ajoute que la police locale dit avoir essuyé des tirs avant.
A Miami, en Floride, un cortège est passé près d'un centre de détention. "Pas de justice, pas de paix", ont scandé plusieurs centaines de manifestants.
Sur la côte Ouest, des boutiques de luxe de Santa Monica, dans le secteur de Los Angeles, ont été pillées alors qu'une manifestation pacifique se dispersait. Des scènes similaires ont été observées plus au sud, à Long Beach, où un centre commercial a notamment été la cible de groupes de jeunes gens.
A New York, la police a arrêté près de 350 personnes tandis que 30 policiers ont été blessés. Le maire de la ville, Bill de Blasio, a promis que le comportement de la police serait examiné.
Les violences ont également touché d'autres grandes villes comme Chicago, Seattle, Salt Lake City ou bien encore Cleveland et Dallas.
Donald Trump, qui a qualifié les manifestants de "bandits" n'a pour l'heure pas décidé de prendre le contrôle de la garde nationale, mais il a annoncé qu'il considérait dorénavant le mouvement Antifa comme "terroriste".
"Maires et gouverneurs démocrates, soyez durs !", a-t-il écrit dimanche après-midi sur Twitter (NYSE:TWTR). "Ces gens sont des ANARCHISTES. Mobilisez notre Garde nationale MAINTENANT."
Le président américain s'en est également pris aux "médias ringards" (Lamestream Media) qui, affirme-t-il, "font tout ce qui est en leur pouvoir pour attirer la haine et l'anarchie". "Tant que chacun comprendra ce qu'ils font, qu'ils sont des FAKE NEWS et des gens vraiment nocifs appliquant un agenda malsain, nous pourrons facilement oeuvrer malgré eux à la GRANDEUR !", ajoute-t-il.
(Brendan O'Brien et Carlos Barria, avec Peter Szekely, Maria Caspani et Sinead Carew à New York, Susan Heavey à Washington, et Brad Brooks à Austin; version française Nicolas Delame, Jean Terzian et Henri-Pierre André)