La SNCF a conseillé vendredi aux voyageurs de renoncer à prendre le train à partir de 19H00 lundi, heure à laquelle commencera la grève que les syndicats prévoient très suivie, alors que l'abandon d'ordonnances annoncé par la ministre des Transports ne les a pas rassurés.
"La grève va beaucoup perturber la vie des Français, je le regrette. Il y aura très peu de trains qui partent après 19H00 lundi. Il faut que chacun prenne ses précautions", a prévenu le patron de la SNCF Guillaume Pepy sur France Inter.
La CGT (1er syndicat du groupe), l'Unsa (2e) et la CFDT (4e) ont appelé les cheminots à faire grève de lundi à 19H00 jusqu'à 08H00 jeudi. C'est le premier des préavis de deux jours de grève sur cinq qu'ils pourraient déposer jusqu'à fin juin pour contrer la réforme de la SNCF voulue par le gouvernement.
SUD Rail (3e syndicat) a déposé de son côté un préavis de grève illimitée, reconductible par 24 heures, qui débutera à 20H00 lundi.
"Les annonces qu'on a eues ne sont pas de nature à éviter la grève", a déclaré Erik Meyer, porte-parole de SUD-Rail, en sortant d'une table ronde avec la ministre des Transports et les autres délégués syndicaux. "On a fait plus de 50 réunions de concertation pour rien."
Le gouvernement avait annoncé fin février son projet de réforme de la SNCF avec un recours possible à des ordonnances, avant d'ouvrir début mars deux mois de concertation avec les organisations syndicales, les élus et les associations d'usagers.
Vendredi, Elisabeth Borne, la ministre des Transports, a présenté un bilan d'étape et tenté de rassurer les syndicats. "On nous reprochait de recourir à des ordonnances. On est en train de remplacer les ordonnances sur tout le sujet de l'ouverture à la concurrence par des dispositions législatives qui vont donc pouvoir être débattues à l'Assemblée nationale à partir de la semaine prochaine", a-t-elle annoncé.
En soirée sur BFMTV, M. Pepy a salué de "vraies avancées", soulignant que les propositions de la ministre prouvaient que la concertation en cours n'était pas "bidon".
- "Garanties de haut niveau" -
L'ouverture à la concurrence aura lieu suivant un calendrier progressif: les régions hors Ile-de-France à partir de 2019, les TGV en 2020, les lignes franciliennes déjà existantes en 2023 et les RER à partir de 2033.
Dans un communiqué en soirée, la présidente LR de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, a plaidé pour que ces reports annoncés d'ouverture à la concurrence ne se fassent pas "au détriment des Franciliens qui ont besoin d'une amélioration du service à un prix compétitif".
Sur les conséquences de cette ouverture pour les salariés, la ministre a donné des garanties. En cas de transfert d'une entreprise ferroviaire à une autre, les salariés bénéficieront d'une "portabilité des droits", sans limite de durée, selon elle.
Ils conserveront leur niveau de rémunération, ainsi que le régime spécial de retraite et la garantie de l'emploi pour les employés ayant été embauchés au statut de cheminot. Les autres conditions relèveront des accords de branches.
"Je pense qu'on peut considérer que ce sont des garanties de haut niveau (...) J'espère qu'elles sont de nature à les rassurer", a ajouté la ministre. "Je déplore que la grève démarre alors que nos discussions sont en cours. Nous sommes à mi-parcours des concertations et le débat au Parlement démarre la semaine prochaine."
La SNCF a rappelé que les agents peuvent se déclarer grévistes "au plus tard 48 heures avant" le début de la grève. "Une fois ces déclarations connues", le groupe pourra "construire un plan précis de circulation des trains" et communiquera "au plus tard" à 17H00 dimanche "l'ensemble des prévisions de trafic, train par train" pour lundi soir et mardi.
M. Pepy a évoqué vendredi matin les hypothèses d'"un train sur cinq ou un sur huit" circulant pendant la grève comme "une fourchette possible" et relevé que certains syndicats évoquaient même un train sur dix. "On ne pourra pas dans ces conditions transporter la totalité des voyageurs", a-t-il souligné.
La participation à la grève sera "exceptionnellement forte", a estimé l'Unsa vendredi. Elle sera "très forte", a confirmé Erik Meyer, tablant sur "moins de 10% du trafic dans beaucoup d'endroits".