En dépit d'appels répétés de la Banque de France à s'y prendre tôt, de nombreuses personnes se sont pressées au dernier moment vendredi aux guichets de l'institution pour profiter de l'ultime possibilité d'échanger leurs vieux billets en francs contre des euros.
Dix ans jour pour jour après la fin du cours légal du franc, la dernière gamme de coupures encore admises à l'échange devait en effet rejoindre en fin de journée au plus tard les caisses de la Banque de France pour pouvoir être convertie en monnaie européenne.
Après l'échéance, les billets qui n'auront pas été rendus n'auront plus la moindre valeur, hors une poignée de spécimens au numéro de série très bas ou avec défaut apparent qui conserveront un intérêt pour les numismates.
L'échange était également possible auprès de l'IEDOM (Institut d'émission des départements d'outre-mer) et des nombreux centres des finances publiques (ex-trésoreries).
Cette dernière vague de retrait concernait les Pierre et Marie Curie (500 francs), Gustave Eiffel (200 francs), Cézanne (100 francs), Saint-Exupéry (50 francs) et Debussy (20 francs). Tous les autres billets, ainsi que les pièces, ont déjà tiré leur révérence et ne sont plus échangeables.
Boulevard Raspail, devant l'unique succursale de Paris procédant aux échanges, une longue file s'est formée tôt vendredi. De source interne, 850 personnes s'étaient déjà présentées la veille.
A Nanterre en revanche, la petite officine cachée dans le ventre de la préfecture a échappé à la queue constatée mercredi qui avait atteint jusqu'à 50 mètres.
L'affluence est allée crescendo ces 15 derniers jours. A la succursale de Nantes, une adjointe du service de caisse a expliqué sous couvert d'anonymat qu'en début de semaine, le nombre d'échanges (une soixantaine par jour) avait doublé par rapport à la semaine précédente.
"Ce sont surtout des personnes âgées qui viennent", souvent avec des petites sommes, tel ce "monsieur qui a trouvé un billet de 100 francs en faisant un fonds de pantalon", a-t-elle raconté.
"Il ne se passe pas une heure sans qu'on ait des personnes qui se présentent avec des billets qui ne sont plus échangeables et dont certains datent parfois des années 40", a relevé Alain Dailly, responsable du service de caisse à Nanterre.
"Certains se présentent avec du 500 Francs Pascal, du Montesquieu, du Delacroix, qu'on n'échange plus du tout", a expliqué la responsable de Nantes.
A Nanterre, Robert, un numismate, abordait vendredi les particuliers à leur sortie de la succursale, leur proposant de racheter quelques coupures qui n'étaient déjà plus échangeables, pour peu qu'elles aient une valeur de collection. Déception: ce n'était pas le cas pour cet homme venu avec une enveloppe d'une dizaine de billets de 500 francs Pascal, ni pour Mme Kicha, lestée de poignées de pièces grisâtres qui n'ont plus de valeur légale depuis la Seconde guerre mondiale.
La succursale d'Annecy, qui a reçu de nombreux appels, a accueilli cette semaine une clientèle hétérogène en terme d'âge et "pas mal de clientèle suisse qui avait encore quelques billets", selon un responsable du service de caisse.
"Le dernier jour, il y a toujours des gens qui viennent à la dernière minute, au moment où vous fermez", soulignait sa collègue de Nantes. De source interne, certaines succursales étaient susceptibles de rester ouvertes jusqu'à 18H00 en cas de flux exceptionnels.
Toutefois, l'affluence ne devait pas battre le record de 2005, lors de la fin de l'échangeabilité des pièces en francs, quand 45.000 personnes s'étaient pressées aux guichets de la Banque de France à la date butoir.
Le site internet dédié jechangemesfrancs.com fournit la liste des succursales concernées par l'opération ainsi que la valeur d'échange des billets, échange qui ne se fera que sur présentation d'une pièce d'identité.
Fin 2010, 50 millions de ces billets échangeables, d'une valeur en euros de 602 millions (près de 4 milliards de francs), étaient encore en circulation.