PARIS (Reuters) - La reprise des négociations sur les retraites complémentaires et les accords dans la fonction publique sont deux "épreuves de vérité", a estimé mercredi le secrétaire général de la CFDT, qui s'affirme comme le syndicat le plus enclin au dialogue.
A l'orée d'une période cruciale avec, en sus des retraites et des fonctionnaires, la refonte du code du travail et la conférence sociale du 19 octobre, la CFDT renforce son image d'interlocuteur privilégié du patronat et du gouvernement.
Laurent Berger se défend de faire des compromis et répète que son syndicat aspire seulement à "prendre sa part" dans les débats en cours pour apporter des garanties aux salariés.
"Quand (le dialogue social) ne produit pas de résultat, le politique reprend la main, mais on met en garde contre deux tentations : que les acteurs économiques fuient le dialogue parce qu'ils ne sont pas d'accord sur tout, et la tentation qu'on règle tout par le politique. On n'a pas d'autre choix que de se parler", a-t-il dit en conférence de presse de rentrée.
C'est tout le sens des contre-propositions formulées avant la reprise des négociations sur les retraites complémentaires, de la volonté de voir aboutir un accord sur les carrières et les rémunérations dans la fonction publique, malgré la menace d'un échec, ou d'ouvrir la voie au dialogue sur le code du travail.
Quitte à dramatiser les enjeux. Des premières, il dit qu'il y a "un fort risque de non tenue du pacte qui existe au sein des générations". Du second sujet que ce serait "une catastrophe" de ne pas aboutir et il ajoute redouter "de la casse".
Pour donner des gages, la CFDT a dévoilé son plan de bataille pour les régimes de retraites complémentaires Agirc et Arrco, dont les réserves s'épuisent selon les experts.
Les syndicats et le patronat s'affrontent sur l'idée du Medef d'un abattement sur les pensions versées et son refus d'une augmentation des cotisations.
Mais la CFDT a tenté de bâtir un pont en proposant une contribution de solidarité de 4% quand le départ se fait avant "l'âge d'équilibre du régime" et une hausse des cotisations de 0,1% par an de 2019 à 2021.
JEU DE POSTURES
Une main tendue, la centrale veut garder l'autre ferme sur la question de l'abattement. "L'abattement, dans la tête du Medef, vise à reculer l'âge", a dit Laurent Berger. "Il faut des efforts partagés mais on ne veut pas se voir imposer un diktat du patronat donc pour nous, pas de système d'abattement."
La seconde épreuve de vérité sera, selon lui, le dossier de la fonction publique. Le projet d'accord relatif aux "parcours, carrières et rémunérations" doit être validé par une majorité de syndicats. Or, FO ne signera pas et la CGT y semble hostile.
"On a fait des propositions, il y a un compromis sur la table, on se prononcera la semaine prochaine. Je crains que le jeu de postures des uns et des autres amène à ne pas prendre en compte situation des agents", a dit Laurent Berger.
"Cet accord transcende, dépasse 2017 et vu la situation des fonctionnaires depuis plusieurs années, il y a un enjeu de débloquer ça. Cet accord le permet, avec des imperfections", a-t-il ajouté, rappelant le gel du point d'indice depuis 2009 ou les carrières enlisées des agents des catégories B et C.
Si ces deux chantiers sont les plus pressants, la refonte du code du travail n'est pas le moins lourd. Là aussi, la CFDT fait voeu de dialogue en relevant des points positifs dans le rapport Combrexelle qui suggère de maintenir un cadre dans la loi et de laisser ailleurs la primauté aux accords négociés.
"Ce rapport, c'est la redéfinition de la loi et de la démocratie sociale en gardant, c'est clair dans le rapport, une place prépondérante à la loi. Ce n'est pas antinomique avec la négociation", a dit Laurent Berger.
"Certains acteurs pensent que parce qu'on négocierait on baisserait les droits. On est prêt à laisser de l'espace pour qu'on soit davantage dans la protection des salariés, on pense que le dialogue social de proximité le permet."
(Gregory Blachier, édité par Yves Clarisse)