Le Japon a vu son déficit commercial fondre au premier semestre grâce à la chute de la facture énergétique et au redressement des exportations, mais à l'exception du mois de mars dernier, ses comptes restent ancrés dans le rouge depuis trois ans.
Au cours des six derniers mois, le solde négatif s'est réduit de 77% à 1.725 milliards de yens (12,7 milliards d'euros), comparé au déficit semestriel record de 7.598 milliards déploré un an plus tôt.
Sur le seul mois de juin, il est tombé de 92%, à 69 milliards de yens. Même si les espoirs d'excédent ont été déçus, l'archipel a vu ses exportations rebondir après un mois de mai médiocre. Elles ont progressé à un rythme inédit depuis janvier (+9,5%), portées par les composants électroniques et le secteur de l'automobile.
La dépréciation du yen qui gonfle les recettes en provenance de l'étranger une fois converties en monnaie nippone masque une stagnation en volume. Pour expliquer ces difficultés, la Banque du Japon (BoJ) a récemment souligné le ralentissement au premier trimestre 2015 aux Etats-Unis et en Chine - deux partenaires majeurs.
Si le Japon a accru son excédent commercial avec les Etats-Unis le mois dernier, les exportations restent à la peine (-3% en volume), tout comme avec la Chine (-2,5%) qui continue à dominer les échanges bilatéraux.
La BoJ a de ce fait abaissé ses prévisions annuelles de croissance: elle table désormais sur un produit intérieur brut (PIB) en hausse de 1,7%, contre 2%, pour l'exercice en cours (avril 2015-mars 2016), des estimations encore trop optimistes de l'avis de certains observateurs qui prônent un nouvel assouplissement monétaire.
- Contraction économique au 2e trimestre ? -
Pour autant, la BoJ évoque un phénomène temporaire.
"Les exportations vont progressivement retrouver leur allant en seconde partie d'année, donnant un coup de pouce à l'économie", estime aussi Akiyoshi Takumori, chez Sumitomo Mitsui Asset Management, cité par Bloomberg News, quand d'autres redoutent la morosité de la conjoncture mondiale et les turbulences financières chinoises.
Parallèlement, le Japon peut se réjouir du déclin des cours du pétrole, élément clé pour un pays extrêmement gourmand en hydrocarbures depuis l'accident nucléaire de Fukushima qui a mis à l'arrêt l'ensemble des réacteurs.
En juin, les importations ont encore fléchi (-2,9% sur un an), conséquence de l'effondrement d'un tiers des dépenses en pétrole, produits pétroliers et gaz naturel liquéfié.
Mais, avertit Marcel Thieliant de Capital Economics, cet effet va s'essouffler, "d'autant plus que le yen devrait s'affaiblir davantage face au dollar dans les prochains mois, renchérissant le coût des importations".
Selon ses calculs, le commerce extérieur devrait apparaître comme "un frein à la croissance au deuxième trimestre" calendaire dont les chiffres seront annoncés mi-août. Ceci combiné à une demande intérieure bien terne, certains analystes craignent une contraction de l'économie nippone sur la période, à rebours d'un premier trimestre solide (+1%).
Face à ces déficits commerciaux à répétition, le Premier ministre conservateur japonais Shinzo Abe, fervent partisan de l'atome, plaide pour une relance de tous les réacteurs nucléaires jugés sûrs par l'autorité compétente, afin de diminuer encore la facture énergétique.
Il en fait un argument économique alors qu'il tente de redorer, via une politique baptisée abenomics, un archipel miné par des années de déflation, et ébranlé par une hausse de taxe qui a temporairement plongé le pays en récession l'an passé.
Le pari est néanmoins loin d'être gagné tant le processus est complexe et long, même si une première unité pourrait redémarrer en août dans le sud-ouest de l'archipel.
Habitué à des excédents commerciaux massifs, le Japon avait glissé dans le rouge en 2011 sur l'ensemble de l'année, pour la première fois en 31 ans, conséquence de la catastrophe de Fukushima. Depuis les déficits sont monnaie courante, et l'excédent dégagé en mars dernier, pour la première fois depuis juin 2012, n'aura été qu'un heureux mais unique concours de circonstances.