Les marchés atteignent des sommets, mais juillet pourrait réserver des surprises
Investing.com - La Bourse de Paris débute la dernière séance de la semaine sur une note nettement négative, prise de court par l’escalade soudaine des tensions géopolitiques au Moyen-Orient. L’indice CAC 40 plonge de 1,2 % peu après l’ouverture, retombant à proximité des 7 700 points, dans le sillage des frappes aériennes lancées cette nuit par Israël contre plusieurs installations iraniennes, dont des sites nucléaires, militaires et industriels sensibles. Cette offensive surprise, annoncée comme "décisive" par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, fait craindre une dangereuse montée aux extrêmes dans une région déjà sous haute tension.
L’annonce de la mort de Hossein Salami, chef des Gardiens de la révolution iranienne, marque un tournant symbolique et militaire majeur dans ce conflit larvé. En réponse, le guide suprême iranien, Ali Khamenei, a promis une "vengeance implacable", faisant planer le spectre d’une guerre régionale de grande ampleur.
Le marché pétrolier a immédiatement réagi à cette flambée de violence : le baril de Brent a bondi de plus de 13 % dans les échanges asiatiques nocturnes, avant de stabiliser ses gains autour de +7 %, à 74,4 dollars. Le brut léger américain (WTI) s’est également envolé à plus de 73 dollars, soit un gain de près de 8 %. Cette envolée des cours, dans une zone qui concentre près d’un tiers de la production mondiale, renforce les craintes d’un choc d’offre si le conflit venait à perturber durablement les flux d’hydrocarbures.
Sur les marchés financiers, ce regain de tension géopolitique intervient alors même que les investisseurs espéraient finir la semaine dans un relatif apaisement, après plusieurs séances hésitantes. La trêve commerciale scellée mardi à Londres entre les États-Unis et la Chine, ainsi que la confirmation d’une inflation américaine sous contrôle, n’avaient pas suffi à impulser une dynamique haussière. Désormais, les regards se détournent de la macroéconomie pour se porter sur les risques exogènes, jugés difficilement quantifiables et susceptibles d’engendrer une volatilité prolongée.
Les valeurs énergétiques tirent toutefois leur épingle du jeu. TotalEnergies, en première ligne avec la flambée du brut, gagne plus de 2 % dans un marché globalement rouge. À l’inverse, les secteurs les plus sensibles aux coûts énergétiques, à commencer par les transports et l’aérien, souffrent sévèrement : Air France-KLM (EPA:AIRF) chute de plus de 5 %, lestée par la perspective d’une envolée de ses charges de kérosène.
Sur le plan des valeurs moyennes et petites capitalisations, Clariane se distingue avec une progression à deux chiffres, dopée par l’annonce de la cession de son réseau d’agences d’aide à domicile Petits-fils au Crédit Agricole, pour un montant de 345 millions d’euros. Ce désengagement stratégique vise à redresser une structure financière fragilisée.
À l’inverse, LDLC déçoit avec une perte nette de près de 11 millions d’euros pour l’exercice 2024-2025, conséquence d’un environnement de consommation atone et de coûts en hausse. The Blockchain Group, de son côté, annonce deux émissions réservées d’obligations convertibles dans le cadre de sa stratégie de trésorerie Bitcoin, avec un montant global d’environ 9,7 millions d’euros, illustrant la poursuite de sa mutation vers une logique patrimoniale numérique.
Côté macroéconomie, les statistiques attendues ce vendredi – notamment l’indice de confiance des consommateurs de l’Université du Michigan – devraient passer au second plan, éclipsées par la dimension géopolitique du moment. Néanmoins, les opérateurs tenteront d’en tirer un signal concernant la vigueur de la consommation américaine, pierre angulaire de l’économie mondiale. En Europe, les chiffres de la production industrielle d’avril pour la zone euro seront également scrutés, dans un contexte de plus en plus préoccupant pour l’activité manufacturière.
Sur les autres marchés, la nervosité s’est matérialisée par une ruée vers les actifs dits de "refuge". L’or progresse de 1,3 % à 3.445 dollars l’once, se rapprochant de ses records récents. Le dollar se redresse face à l’euro, profitant de son statut de valeur refuge malgré l’ascension de la monnaie unique ces dernières semaines. L’indice du dollar gagne 0,3 %, à 98,2. Sur les marchés obligataires, la tendance reste relativement stable, avec une légère tension sur les Treasuries américains, qui s’échangent autour de 4,41 % pour l’échéance à dix ans. Le Bund allemand s’assouplit à 2,53 % et l’OAT française revient à 3,22 %, dans un climat de prudence générale.
Pour l’ensemble de la semaine, le CAC 40 se dirige vers un repli de l’ordre de 0,5 %, confirmant une tendance morose installée depuis début mai. L’indice reste enfermé dans une zone de fluctuation étroite entre 7 700 et 7 900 points, incapable de retrouver la dynamique nécessaire pour tester de nouveau ses sommets de février. Les valorisations élevées des actions, la faiblesse des alternatives sur les autres classes d’actifs et la multiplication des incertitudes géopolitiques rendent toute stratégie de marché délicate à court terme.
Dans ce contexte tendu et volatil, les investisseurs devront arbitrer entre protection du capital et opportunités de rebond. Mais à ce stade, c’est la prudence qui semble l’emporter sur les places européennes, et Paris ne fait pas exception.