Investing.com - La Bourse de New York aborde la dernière séance d’une semaine euphorique sur la pointe des pieds. À l’ouverture, le Dow Jones Industrial Average se replie symboliquement, cédant une poignée de points après son bond de plus de 2% enregistré depuis lundi, tandis que le S&P 500 se maintient tout juste au-dessus de l’équilibre et que le Nasdaq grappille encore quelques dixièmes, porté par les valeurs de croissance.
L’onde de choc positive provoquée par la trêve tarifaire conclue entre Washington et Pékin lundi continue de soutenir la confiance, mais les investisseurs choisissent désormais de digérer les données économiques publiées ces dernières quarante-huit heures ainsi que les premiers commentaires d’institutions financières qui revoient leurs scénarios conjoncturels.
L’amélioration la plus spectaculaire provient de Barclays (LON:BARC) : la banque britannique ne table plus sur une récession aux États-Unis cette année. Elle anticipe désormais une croissance de 0,5 % en 2025, contre -0,3 % auparavant, et relève légèrement son estimation pour 2026. Le principal facteur de ce revirement demeure la détente tarifaire : la baisse immédiate des droits de douane américains à 30 % et la réduction des surtaxes chinoises à 10 % ôtent, selon elle, le risque d’un choc brutal sur la demande et la production. Cependant, la banque souligne qu’à ces niveaux, les barrières douanières restent historiquement élevées et pourraient continuer de peser sur les coûts des entreprises et, à terme, sur les prix à la consommation.
Justement, les données publiées jeudi montrent une inflation en net reflux. Les prix à la production ont reculé de 0,5 % sur un mois, première baisse depuis 2023, tandis que les ventes au détail ont chuté de 1 % en avril ; un mouvement de correction attendu après les achats de précaution de mars, mais qui ravive les interrogations sur la vigueur de la consommation. Ces statistiques confortent le scénario d’au moins deux baisses de taux cette année, relayé par de nombreux opérateurs depuis la publication d’un indice des prix à la consommation en net ralentissement en début de semaine.
Sur le terrain microéconomique, Walmart (NYSE:WMT) a offert un message contrasté. Le géant de la distribution a dévoilé des bénéfices supérieurs aux attentes, mais son directeur financier a averti qu’un maintien des tarifs au-delà de la période de quatre-vingt-dix jours pourrait se traduire par une hausse inévitable des prix en rayon. Les marchés y voient le signe que l’effet positif de la trêve ne se diffusera totalement qu’en cas d’accord permanent et de baisse supplémentaire des droits à l’importation.
Dans les semi-conducteurs, Applied Materials (NASDAQ:AMAT) recule : son activité la plus importante, les systèmes de gravure et de dépôt destinés aux fondeurs, a manqué les attentes. À l’inverse, Vistra Energy grimpe après avoir déboursé 1,9 milliard de dollars pour des actifs gaziers, pari explicite sur la demande énergétique des futurs centres de données dédiés à l’intelligence artificielle.
La tech, elle, retient surtout la décision de Take-Two Interactive de repousser la sortie de GTA VI : le studio va manquer plusieurs centaines de millions de dollars de revenus cette année fiscale, faisant plonger le titre. Les grandes manœuvres se poursuivent également dans les télécoms, Charter Communications ayant acté un rapprochement colossal avec Cox ; l’opération, valorisant le nouvel ensemble plus de 34 milliards de dollars, illustre la concentration accélérée d’un secteur confronté à la montée en puissance du streaming et de la 5-G.
Parallèlement, les marchés surveillent l’évolution de deux dossiers géopolitiques susceptibles d’alimenter la volatilité. D’abord, les négociations russo-ukrainiennes menées en Turquie n’ont enregistré aucune percée, Moscou exigeant des concessions territoriales jugées inacceptables par Kiev. Ensuite, les rumeurs d’accord nucléaire entre Washington et Téhéran font tanguer le pétrole. Le Brent et le WTI reculent encore ; la perspective du retour de volumes iraniens sur le marché ajoute aux inquiétudes sur la demande, déjà alimentées par la hausse inattendue des stocks américains.
Dans ce climat contrasté, le Dow Jones reste solidement ancré en territoire positif sur la semaine ; il bénéficie encore du puissant soulagement provoqué par la trêve sino-américaine. Mais les traders ont conscience que cette embellie pourrait être précaire tant que les contours définitifs des nouvelles relations commerciales ne sont pas fixés. Les prochaines échéances – discussions avec le Japon, la Corée du Sud et surtout l’Union européenne, puis prise de parole de Jerome Powell – tiendront lieu de catalyseurs. Un message rassurant sur la trajectoire des taux, couplé à des signes tangibles de consommation résiliente, pourrait prolonger la remontée engagée. Faute de quoi, le marché, désireux de sécuriser ses gains, pourrait entrer dans une phase de consolidation après avoir effacé en quelques jours des semaines de pertes liées aux craintes tarifaires.