Investing.com - La Russie a volé au secours de l'Europe en proposant d'augmenter les livraisons de gaz naturel à la région pour clamer la flambée des prix. Suite à cela, les experts ont déclaré qu'une chose était devenue certaine : l'Europe est désormais largement à la merci de la Russie en matière d'énergie.
Les contrats de gaz naturel ont atteint de nouveaux sommets en Europe cette semaine - et les prix de référence régionaux ont augmenté de près de 500 % depuis le début de l'année - l'augmentation de la demande et la réduction de l'offre exerçant une pression sur le secteur de l'énergie alors que le temps se refroidit avec l'approche de l'hiver.
L'intervention du président calme le marché
Les prix ont atteint un nouveau sommet mercredi avant de reculer après l'intervention du président russe Vladimir Poutine, qui a proposé d'augmenter les livraisons de gaz russe à l'Europe.
En effet, les analystes ont déclaré que ce geste montrait que l'Europe était de plus en plus vulnérable face à la Russie, qui attend que l'Allemagne certifie le projet controversé de gazoduc Nord Stream 2, qui acheminera davantage de gaz russe en Europe via la mer Baltique.
Le gazoduc, représentant un investissement de 11 milliards de dollars, est désormais achevé, au grand dam des États-Unis, qui s'opposent depuis longtemps au projet. Ces derniers avertissaient que le projet compromet la sécurité énergétique de l'Europe et que la Russie pourrait utiliser les approvisionnements énergétiques comme levier sur la région.
Chantage énergétique
Bluebay Asset Management indique que "L'Europe s'est maintenant laissée prendre en otage par la Russie sur les approvisionnements énergétiques", qualifiant la situation d'"incroyable".
La firme ajoute que les derniers développements dans la région ont mis l'Europe dans un étau. ″Il est clair que la Russie tient l'Europe dans une impasse énergétique".
Bluebay Asset Management affirme que l'Europe se retrouve désarmée devant son voisin Russe. "L'Europe se recroqueville, car elle craint qu'à l'approche de l'hiver, la Russie ne serre encore plus les vis et ne la laisse geler jusqu'à ce qu'elle obtienne ce qu'elle veut et que le NS2 soit certifié."
Poutine fait jouer ses cartes
Le président Russe a proposé une augmentation de l'approvisionnement de l'Europe à qui il a reproché l'annulation d'un grand nombre de ses contrats gaziers à long terme pour des contrats spot. Il a affirmé que le Kremlin était prêt à négocier de nouveaux contrats à long terme pour la vente de gaz.
De nombreux experts estiment que la Russie a volontairement suspendu ses livraisons de gaz à l'Europe, afin d'accélérer la certification par l'Allemagne du gazoduc Nord Stream 2. La Russie a toutefois réfuté cette hypothèse.
Le gazoduc Nord Stream 2 en ligne de mire
Bluebay Asset Management estime que la recherche d'une certification rapide pour Nord Stream 2 a été "le plan de Moscou depuis le début", ajoutant que "les marchés sont vraiment naïfs s'ils pensent que Moscou fera quoi que ce soit pour atténuer la crise du gaz en Europe avant que NS2 ne soit certifié".
Du côté allemand, le régulateur de l'énergie ne montre aucun signe vers la certification du gazoduc pour l'instant. Les promoteurs du gazoduc doivent encore montrer qu'il n'enfreindra pas les règles de la concurrence en limitant les fournisseurs qui l'utilisent.
Oxford Institute for Energy Studies a reconnu que toute décision de la Russie de fournir davantage de gaz à l'Europe était "politique" et liée à la certification du gazoduc.
Les prix du gaz sont une priorité pour l'Europe
La flambée des prix a placé la question en tête de l'agenda de l'UE, les dirigeants appelant à une plus grande indépendance énergétique - étant donné que près de 90% des approvisionnements de l'Union sont importés, la Russie étant l'une des principales sources d'importation avec la Norvège, selon les données de la Commission européenne.
Le gazoduc a des détracteurs en Europe notamment l'Ukraine qui est en guerre avec la Russie depuis des années pour récupérer ses régions occupées et qui risque de voir ses propres gazoducs contournés et la perte des droits de transit du gaz.
L'approvisionnement en gaz de l'Europe est depuis longtemps un sujet épineux. Il a également souvent envenimé les relations entre les États-Unis et l'UE, les premiers fustigeant l'Allemagne, le plus grand importateur de gaz russe de l'UE.
La solution reste la diversification
Les experts s'accordent à dire que l'Europe doit diversifier ses sources d'énergie. Oxford Institute for Energy Studies affirme que "plus l'Europe diversifie son approvisionnement, moins il y a de risques".
L'Europe fait cependant l'effort d'équilibrer ses importations de gaz de source différentes. "Nous avons assisté ces dernières années à une forte augmentation des importations de gaz naturel liquéfié en Europe, notamment en provenance du marché américain".
Cependant, Oxford Institute note la faiblesse actuelle de l'offre qui contribue à la crise énergétique. "Il y a eu un manque temporaire d'approvisionnement et certaines de ces logistiques vont commencer à se relâcher, mais ce ne sera pas avant l'année prochaine, donc pour les prochains mois, nous sommes vraiment à la merci de la météo".