PARIS (Reuters) - La France et l'Allemagne ont harmonisé vendredi leurs positions sur le contenu d'un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne et les Etats-Unis (Tafta), qui devra selon eux permettre une réelle ouverture du marché américain.
Le secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, Matthias Fekl, a dit mardi à Reuters que la France bloquerait les négociations si des progrès significatifs ne sont pas réalisés dans les mois qui viennent, l'objectif affiché de Bruxelles et de Washington étant de parvenir à un accord avant la fin de l'année, lorsque Barack Obama quittera la Maison Blanche.
La conclusion d'un accord considéré par la gauche de la gauche comme un risque pour l'agriculture française et un cheval de Troie pour les OGM et le boeuf aux hormones américains est politiquement délicate en France à un an de la présidentielle.
La menace française, évoquée la semaine dernière par François Hollande lui-même, est brandie alors que s'ouvre la semaine prochaine à New York le 13e round d'une négociation qui suscite aussi beaucoup d'inquiétude en Allemagne, mais dont Angela Merkel souhaite la conclusion rapide.
Matthias Fekl et son homologue allemand Matthias Machnig ont publié vendredi les "positions communes" des deux pays avant cette échéance, une manière de présenter un front uni.
"La France et l’Allemagne soutiennent la conclusion d’un accord de libre-échange avec les États-Unis qui soit ambitieux, équilibré et mutuellement bénéfique", peut-on y lire.
"Si nous voulons un accord ambitieux et équilibré, les questions autres que les droits de douane sont essentielles", ajoutent les deux secrétaires d'Etat.
PAS DE BOEUF AUX HORMONES
"Ces questions incluent, entre autres, la convergence réglementaire, des engagements significatifs sur les marchés publics, les services, les indications géographiques et la suppression des obstacles non-tarifaires inutiles, en particulier dans les secteurs industriels et agroalimentaires."
Pour la France et l'Allemagne, l'accès des entreprises européennes à tous les marchés publics américains, et pas seulement au niveau fédéral, est crucial.
Dans le domaine agricole, les deux pays souhaitent un "résultat significatif en ce qui concerne les indications géographiques, y compris l’élimination de l’usage qui est fait aux États-Unis des semi-génériques pour les appellations de vins européens".
Les négociateurs européens estiment avoir réglé les points qui étaient jugés les plus négatifs pour l'UE et soulignent, pour illustrer leurs dires, que la Chambre américaine de commerce et les candidats aux primaires présidentielles américaines sont critiques envers le projet.
Les normes, par exemple au niveau environnemental, seront au moins équivalentes à celles de l'UE et tout ce qui est déjà interdit de commercialisation dans l'Union européenne, comme le boeuf américain aux hormones ou certains OGM, le restera.
Rien n'obligera à privatiser les services publics et le mécanisme de règlement des différends imaginé au début de la négociation a été totalement modifié devant les craintes exprimées, notamment en France et en Allemagne.
Si, à l'origine, les tribunaux américains et européens devaient être dépossédés de leur pouvoir en faveur d'un arbitrage privé, il est désormais envisagé que des juges des deux parties siègent dans une cour d'arbitrage permanente.
(Yves Clarisse, édité par Yann Le Guernigou)