Pernod Ricard (PA:PERP) a dévoilé la semaine dernière des résultats semestriels globalement conformes aux prévisions du marché. Si l'activité en Chine déçoit toujours, le groupe de vins et spiritueux trouve quelques motifs de réjouissance en Europe et aux Etats-Unis. Entretien avec Gilles Bogaert, son directeur financier.
Cercle Finance: Vous affichez 3% de croissance interne sur le premier semestre de votre exercice fiscal 2015/2016, qui s'est achevé fin décembre. Quel regard jetez-vous sur ce résultat?
Gilles Bogaert: Je crois que nous pouvons nous montrer satisfaits de cette performance solide qui s'est réalisée dans un environnement particulièrement agité et qui s'inscrit parfaitement dans notre feuille de route d'amélioration graduelle de notre croissance.
CF: Vos résultats ressortent en ligne avec les attentes du marché, mais cela n'a pas empêché le cours de votre action de chuter sur fond de turbulences des Bourses mondiales. Etes-vous inquiets de la brusque dégradation de l'environnement économique international?
GB: Depuis 2008, nous nous sommes habitués aux périodes de forte volatilité et de tensions extrêmes. Nous traversons actuellement une période d'inquiétude sur la croissance mondiale, mais il existe encore de belles opportunités à saisir sur des marchés comme les Etats-Unis, l'Espagne ou l'Inde, qui est désormais notre deuxième marché mondial ex-aequo avec la Chine. Dans le contexte actuel, nous avons l'avantage d'afficher une présence globale et de proposer un portefeuille suffisamment large pour absorber les chocs.
CF: Vous affichez une certaine satisfaction concernant la situation aux USA. Le retournement est-il réel?
GB: Aux Etats-Unis, notre exercice 2014/2015 avait été difficile: nos performances étaient restées stables alors que nous voulons continuer de croître dans ce pays qui est de loin notre premier marché mondial. Pour mémoire, nous visons sur le moyen terme une croissance moyenne de nos ventes de 5% outre-Atlantique. Sur le semestre écoulé, notre croissance s'est accélérée à 3%, avec notamment la poursuite de l'essor impressionnant de Jameson (+21% de croissance des volumes selon Nielsen) et du développement soutenu de Glenlivet et Malibu.
Nous avons aussi profité de premiers signes encourageants concernant Absolut, qui a amorcé un début de redressement en ligne avec notre objectif moyen terme de stabilisation de la marque.
Par ailleurs, nos efforts en matière d'innovation se sont révélés payants puisque les nouveautés Jameson Caskmates, Chivas Extra, Avion ou Olmeca Altos ont toutes affiché une forte croissance sur le semestre.
CF: Parallèlement, la pression sur les marges s'avère moins négative. Quels sont les facteurs à l'origine de cet allègement?
GB: Nous avons bénéficié d'un effet prix favorable (+1%) dans un environnement commercial et concurrentiel pourtant toujours très difficile. Cela illustre notre grande discipline en matière de prix, même si nous souhaitons faire encore mieux à moyen terme. Le mix géographique s'est également avéré moins négatif que l'an dernier, sous l'effet de la croissance des Etats-Unis. Enfin, nous avons su profiter de la bonne maîtrise de nos coûts, notamment grâce à la montée en puissance de nos initiatives d'efficacité opérationnelle.
CF: L'activité en Chine se porte-t-elle mieux?
GB: Les tendances sous-jacentes restent les mêmes, sans amélioration ni aggravation de la situation. Le marché chinois des spiritueux reste en contraction, mais nous continuons de gagner des parts de marché dans le pays. Nos ventes en Chine restent malgré tout en baisse de 4% à 5% en tendances sous-jacentes compte tenu de la persistance des mesures anti-dépenses ostentatoires et d'un contexte économique morose.
A moyen terme, nous demeurons confiants quant à notre capacité à dégager une croissance en valeur de 7% à 9%: alors que l'essentiel de nos ventes se réalisait jusqu'ici sur le segment haut de gamme, nous voulons élargir notre offre produit pour mieux profiter de l'émergence de la classe moyenne dans le pays. C'est une mutation qui prendra du temps, mais nous pensons que notre statut de leader et la profondeur de notre gamme nous mettent dans une situation privilégiée pour réussir.
CF: L'Europe donne-t-elle quelques signes encourageants ?
GB: Globalement, oui. Sur l'ensemble du continent, la croissance est ressortie autour de 1% au premier semestre alors qu'elle était stable l'an dernier. Il s'agit néanmoins d'une reprise assez timide. Les pays qui s'illustrent sont l'Espagne, qui a renoué avec une croissance robuste après plusieurs années de marasme suite à la crise de 2008, et le Royaume-Uni où nous avons enregistré pour la deuxième année consécutive une croissance solide.
CF: Vous avez annoncé le mois dernier l'acquisition du gin allemand Monkey 47. Comment comptez-vous intégrer cette nouvelle marque?
GB: Il s'agit d'une acquisition ciblée destinée à renforcer notre offre sur le segment du gin, qui comporte déjà les marques Beefeater et Seagram. Monkey évolue sur un marché de 'connaisseurs' en pleine croissance. Pour recruter les nouveaux consommateurs, les fameux 'millenials', il est important de proposer des nouveautés, de l'authenticité et d'être digitalement connectés avec eux. Nous devons le faire à la fois avec nos marques globales, mais aussi avec des marques de niche.
CF: D'autres acquisitions dans le domaine du 'craft' (marques artisanales) sont-elles envisageables?
GB: Nous restons ouverts à d'autres acquisitions ciblées à condition qu'elles soient cohérentes avec notre stratégie de premiumisation et complémentaires avec notre portefeuille. Nous suivons toujours de près les nouvelles tendances et les nouvelles marques qui apparaissent sur le marché.
Une chose est sûre, nous voulons continuer à privilégier l'approche consistant à investir en restant partenaires avec les entrepreneurs créateurs des marques, comme nous l'avons fait par exemple pour la tequila Avion ou le gin Monkey 47. Cette méthode permet de poursuivre le développement de ces marques le plus efficacement possible. Nous espérons concrétiser d'autres collaborations de ce type, à mi-chemin entre 'M&A' (rachat d'entreprise) et innovation.
CF: Le 'craft' représente-t-il l'avenir du marché des spiritueux?
GB: L'émergence du craft illustre surtout les attentes des 'millenials' qui recherchent plus de nouveautés qu'auparavant, tout en restant très attachés à la qualité du produit. Or la plupart des marques de notre portefeuille ont une histoire, un terroir et une authenticité souvent plus légitimes que bon nombre de ces nouvelles marques pseudo-artisanales. A nous de savoir convaincre les consommateurs par une communication adaptée. Au final, notre croissance viendra de la combinaison harmonieuse de nos marques globales et de marques de niche.
Copyright (c) 2016 CercleFinance.com. Tous droits réservés.
Cercle Finance: Vous affichez 3% de croissance interne sur le premier semestre de votre exercice fiscal 2015/2016, qui s'est achevé fin décembre. Quel regard jetez-vous sur ce résultat?
Gilles Bogaert: Je crois que nous pouvons nous montrer satisfaits de cette performance solide qui s'est réalisée dans un environnement particulièrement agité et qui s'inscrit parfaitement dans notre feuille de route d'amélioration graduelle de notre croissance.
CF: Vos résultats ressortent en ligne avec les attentes du marché, mais cela n'a pas empêché le cours de votre action de chuter sur fond de turbulences des Bourses mondiales. Etes-vous inquiets de la brusque dégradation de l'environnement économique international?
GB: Depuis 2008, nous nous sommes habitués aux périodes de forte volatilité et de tensions extrêmes. Nous traversons actuellement une période d'inquiétude sur la croissance mondiale, mais il existe encore de belles opportunités à saisir sur des marchés comme les Etats-Unis, l'Espagne ou l'Inde, qui est désormais notre deuxième marché mondial ex-aequo avec la Chine. Dans le contexte actuel, nous avons l'avantage d'afficher une présence globale et de proposer un portefeuille suffisamment large pour absorber les chocs.
CF: Vous affichez une certaine satisfaction concernant la situation aux USA. Le retournement est-il réel?
GB: Aux Etats-Unis, notre exercice 2014/2015 avait été difficile: nos performances étaient restées stables alors que nous voulons continuer de croître dans ce pays qui est de loin notre premier marché mondial. Pour mémoire, nous visons sur le moyen terme une croissance moyenne de nos ventes de 5% outre-Atlantique. Sur le semestre écoulé, notre croissance s'est accélérée à 3%, avec notamment la poursuite de l'essor impressionnant de Jameson (+21% de croissance des volumes selon Nielsen) et du développement soutenu de Glenlivet et Malibu.
Nous avons aussi profité de premiers signes encourageants concernant Absolut, qui a amorcé un début de redressement en ligne avec notre objectif moyen terme de stabilisation de la marque.
Par ailleurs, nos efforts en matière d'innovation se sont révélés payants puisque les nouveautés Jameson Caskmates, Chivas Extra, Avion ou Olmeca Altos ont toutes affiché une forte croissance sur le semestre.
CF: Parallèlement, la pression sur les marges s'avère moins négative. Quels sont les facteurs à l'origine de cet allègement?
GB: Nous avons bénéficié d'un effet prix favorable (+1%) dans un environnement commercial et concurrentiel pourtant toujours très difficile. Cela illustre notre grande discipline en matière de prix, même si nous souhaitons faire encore mieux à moyen terme. Le mix géographique s'est également avéré moins négatif que l'an dernier, sous l'effet de la croissance des Etats-Unis. Enfin, nous avons su profiter de la bonne maîtrise de nos coûts, notamment grâce à la montée en puissance de nos initiatives d'efficacité opérationnelle.
CF: L'activité en Chine se porte-t-elle mieux?
GB: Les tendances sous-jacentes restent les mêmes, sans amélioration ni aggravation de la situation. Le marché chinois des spiritueux reste en contraction, mais nous continuons de gagner des parts de marché dans le pays. Nos ventes en Chine restent malgré tout en baisse de 4% à 5% en tendances sous-jacentes compte tenu de la persistance des mesures anti-dépenses ostentatoires et d'un contexte économique morose.
A moyen terme, nous demeurons confiants quant à notre capacité à dégager une croissance en valeur de 7% à 9%: alors que l'essentiel de nos ventes se réalisait jusqu'ici sur le segment haut de gamme, nous voulons élargir notre offre produit pour mieux profiter de l'émergence de la classe moyenne dans le pays. C'est une mutation qui prendra du temps, mais nous pensons que notre statut de leader et la profondeur de notre gamme nous mettent dans une situation privilégiée pour réussir.
CF: L'Europe donne-t-elle quelques signes encourageants ?
GB: Globalement, oui. Sur l'ensemble du continent, la croissance est ressortie autour de 1% au premier semestre alors qu'elle était stable l'an dernier. Il s'agit néanmoins d'une reprise assez timide. Les pays qui s'illustrent sont l'Espagne, qui a renoué avec une croissance robuste après plusieurs années de marasme suite à la crise de 2008, et le Royaume-Uni où nous avons enregistré pour la deuxième année consécutive une croissance solide.
CF: Vous avez annoncé le mois dernier l'acquisition du gin allemand Monkey 47. Comment comptez-vous intégrer cette nouvelle marque?
GB: Il s'agit d'une acquisition ciblée destinée à renforcer notre offre sur le segment du gin, qui comporte déjà les marques Beefeater et Seagram. Monkey évolue sur un marché de 'connaisseurs' en pleine croissance. Pour recruter les nouveaux consommateurs, les fameux 'millenials', il est important de proposer des nouveautés, de l'authenticité et d'être digitalement connectés avec eux. Nous devons le faire à la fois avec nos marques globales, mais aussi avec des marques de niche.
CF: D'autres acquisitions dans le domaine du 'craft' (marques artisanales) sont-elles envisageables?
GB: Nous restons ouverts à d'autres acquisitions ciblées à condition qu'elles soient cohérentes avec notre stratégie de premiumisation et complémentaires avec notre portefeuille. Nous suivons toujours de près les nouvelles tendances et les nouvelles marques qui apparaissent sur le marché.
Une chose est sûre, nous voulons continuer à privilégier l'approche consistant à investir en restant partenaires avec les entrepreneurs créateurs des marques, comme nous l'avons fait par exemple pour la tequila Avion ou le gin Monkey 47. Cette méthode permet de poursuivre le développement de ces marques le plus efficacement possible. Nous espérons concrétiser d'autres collaborations de ce type, à mi-chemin entre 'M&A' (rachat d'entreprise) et innovation.
CF: Le 'craft' représente-t-il l'avenir du marché des spiritueux?
GB: L'émergence du craft illustre surtout les attentes des 'millenials' qui recherchent plus de nouveautés qu'auparavant, tout en restant très attachés à la qualité du produit. Or la plupart des marques de notre portefeuille ont une histoire, un terroir et une authenticité souvent plus légitimes que bon nombre de ces nouvelles marques pseudo-artisanales. A nous de savoir convaincre les consommateurs par une communication adaptée. Au final, notre croissance viendra de la combinaison harmonieuse de nos marques globales et de marques de niche.
Copyright (c) 2016 CercleFinance.com. Tous droits réservés.