PARIS (Reuters) - L'ancien secrétaire général de la CGT Louis Viannet (1992-1999) s'est joint lundi, dans une interview au Monde, aux nombreux détracteurs de l'actuel numéro un de la première organisation syndicale française, Thierry Lepaon, pour demander sa démission.
Le sort de la direction de la CGT est au coeur d'une réunion des 56 membres de la commission exécutive de la centrale, mardi et mercredi, et d'une session extraordinaire de son "parlement", le comité confédéral national (CCN), le 13 janvier.
La préparation de ces débats a été lundi au menu d'une réunion des dix membres du bureau confédéral, dont fait partie Thierry Lepaon, que seul le CCN est habilité à révoquer.
Selon une source interne, le successeur de Bernard Thibault s'est montré "lucide" et prêt à travailler sur "l'ensemble des hypothèses" examinées par le bureau.
Mais pour Louis Viannet, il "se grandirait (...) en annonçant publiquement, et avant même la réunion du comité confédéral national, sa décision de remettre son mandat à la disposition du CCN."
Les appels à la démission de Thierry Lepaon se sont multipliés fin 2014 au sein de la CGT, après des révélations sur la rénovation de son logement de fonction et de son bureau et sur la prime de départ qu'il a perçue quand il a quitté ses fonctions au sein des instances du syndicat en Normandie.
Ces "fuites" ont plongé l'organisation dans une crise sans précédent. Le secrétaire général de la CGT a cependant jusqu'ici résisté à ces appels et lancé en décembre une contre-offensive pour tenter de rester à son poste jusqu'à la fin de son mandat, en 2016.
AGGIORNAMENTO
Dans Le Monde, Louis Viannet, 81 ans, critique les tentatives de Thierry Lepaon et de ses partisans de s'"abriter" derrière la "campagne médiatique" déclenchée par ces "fuites" pour justifier un maintien du statu quo.
"En clamant sa volonté de rester coûte que coûte dans sa responsabilité, Thierry Lepaon tend à confondre détermination et entêtement", ajoute l'ancien dirigeant, selon qui "tout doit être tenté pour garder une CGT unie".
Il estime que "l'énorme majorité" des militants de la CGT veut avant tout "sauvegarder son potentiel de mobilisation et de rassemblement" et qu'il vaut donc mieux "regarder la vérité en face, aussi dure soit-elle".
Les pratiques révélées par la presse ne sont pas habituelles dans la vie de la CGT et sèment "le doute sur la sincérité" avec laquelle elle défend ses valeurs, ajoute l'ancien dirigeant, qui plaide pour un "véritable aggiornamento" de l'organisation.
Louis Viannet avait amorcé ce mouvement en démissionnant en décembre 1996 du bureau politique du Parti communiste. Mais son successeur, Bernard Thibault, n'a pas réussi, en dépit de ses tentatives, à mener à son terme la transformation de la CGT.
"Je partage assez ce que dit Louis Viannet, qui fait des constats tout à fait justes", confiait lundi soir à Reuters un membre de la commission exécutive, tout en admettant que les discussions de cette instance risquaient d'être très tendues.
Selon le même responsable, la constitution d'un nouveau bureau confédéral serait acquise. Toute la question serait de savoir si ce sera avec ou sans Thierry Lepaon.
"J'espère que la maturité va l'emporter", a commenté un autre responsable, selon qui le bureau a aussi examiné des propositions en matière de transparence, de règles de vie interne et de procédures financières.
(Emmanuel Jarry, édité par Sophie Louet)