par Pete Sweeney et Samuel Shen
SHANGHAI (Reuters) - Les importations chinoises ont nettement diminué en août, laissant à leur tour planer des doutes sérieux quant au dynamisme de la deuxième économie mondiale et à sa contribution à la croissance mondiale.
Les importations ont chuté de 13,8% par rapport à août 2014, bien plus que la contraction de 8,2% prédite par les économistes. C'est également leur 10e mois d'affilée de baisse, attestant à la fois du tassement marqué des prix des matières premières et d'une demande anémiée.
En outre, avec la dévaluation inattendue du yuan du mois dernier et le ralentissement de la demande de consommation, il ne faut pas s'attendre à un redressement des importations chinoises sur le court terme.
Ces dernières sont constituées pour l'essentiel par les matières premières absorbées par l'industrie pour fabriquer des biens qui seront revendus à l'étranger. De ce fait, le rétrogradage continu des importations n'est pas de bon augure pour les exportations futures.
En revanche, les exportations ont moins diminué que prévu, de 5,5%, mais les économistes n'en doutent pas moins que la Chine puisse atteindre son objectif d'une croissance annuelle de 6% des échanges commerciaux.
"La dévaluation du yuan aura un impact limité sur les exportations, qui baissent parce que la demande est faible et non pas parce que les prix ne sont pas bons", dit Li Jian, directeur des études sur le commerce extérieur de l'Académie chinoise du Commerce international et de la Coopération économique, cercle de réflexion du ministère du Commerce.
Les réserves de change de la Chine ont subi en août leur baisse la plus forte jamais enregistrée, attestant des efforts déployés par les autorités chinoises pour stabiliser la monnaie nationale après sa dévaluation.
Ces dernières veulent convaincre les marchés que le yuan est stable et de fait, les marchés boursiers chinois se sont un peu calmés. Ils ont perdu 40% environ depuis la mi-juin, l'indice composite de la Bourse de Shanghai louvoyant autour des 3.000 points alors qu'il dépassait les 5.000 il y a moins de trois mois.
Il a clôturé en hausse de 2,93% mardi, à 3.170,59 points, tirant parti des nouvelles mesures de stabilisation annoncées par Pékin lundi soir mais dans un volume qui a été le plus faible à la Bourse chinoise depuis la fin février. L'indice CSI300 des grandes valeurs cotées à Shanghai et Shenzhen a pris de son côté 2,57% à 3.334,02 points.
SCEPTICISME DES ANALYSTES
Zhou Xiaochuan, le gouverneur de la Banque populaire de Chine (BPC) avait dit, lors de la réunion des grands argentiers du G20 d'Ankara qui s'est tenu ce week-end, que la correction du marché boursier chinois était pratiquement terminée.
"Nous pensons qu'il (Zhou) voulait dire que le mouvement de panique avait cessé. Le sentiment toutefois est épouvantable et notre hypothèse de base est que l'indice baisse jusqu'à 2.000, son support lors du marché baissier de 2010-2014", observe Tim Condon, chef des études asiatiques d'ING (AMS:ING) Bank à Singapour.
Le marché des futures connaît une situation encore plus confuse, le changement brutal de cap ayant provoqué un effondrement des volumes. Les autorités ont relevé la semaine dernière les appels de marge pour les contrats ne servant pas à des opérations de couverture à 40% de leur valeur contre 30%.
Le contrat future de l'indice CSI300 échéance septembre a enregistré 38.054 transactions lundi, soit une chute de près de 100% sur le pic inscrit voici sept jours.
C'est pourquoi les autorités ont décidé de nouvelles mesures pour tenter de rétablir un calme définitif. C'est ainsi que la Chine abrogera toute imposition des dividendes versés sur les actions détenues depuis plus d'un an.
En outre, les autorités de régulation des marchés financiers en Chine et les exploitants des Bourses de Shanghai et de Shenzhen vont instaurer un coupe-circuit sur l'indice CSI300 pour "stabiliser le marché" en cas de variation trop importante des cours.
Autant d'initiatives qui laissent les analystes sceptiques. "Même si les investisseurs voient de la valeur dans les actions chinoises cotées à Hong Kong, ils ont à l'esprit une hausse des taux inéluctable aux Etats-Unis et s'interrogent sur la capacité de Pékin de gérer les actions A (cotées en Chine continentale), la croissance, la monnaie et la fuite des capitaux", écrivent à leurs clients les analystes de Nomura.
(Avec Winni Zhou et Henning Gloystein à Singapour, avec Rachel Armstrong, Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Véronique Tison)