La roupie est repartie à la baisse mercredi et atteignait un nouveau record de faiblesse, l'annonce de la banque centrale sur une injection de liquidités dans le système bancaire n'ayant amené qu'un bref répit pour la devise indienne.
Après s'être stabilisée en début de journée, la devise s'est enfoncée, franchissant un nouveau record à la baisse. Elle a atteint 64,60 roupies pour un dollar américain. Son précédent plus bas historique datait de la veille, à 64,13 roupies pour un USD.
Shubhada Rao, chef économiste chez Yes Bank, a attribué cette nouvelle glissade à "la nervosité" avant la publication des minutes de la Réserve fédérale américaine, qui pourraient donner des indications sur l'évolution de la politique de la Fed.
La fin attendue de la politique monétaire accomodante de la Fed mine les devises des marchés émergents car les capitaux devraient revenir alors vers les Etats-Unis, attirés par une hausse des taux américains.
La Bourse de Bombay, qui s'était elle aussi rétablie en début de journée après avoir perdu 6% sur les trois dernières séances, a finalement cédé 1,86% à la clôture.
La dernière annonce de la Banque de réserve indienne (RBI) avait cependant stabilisé les marchés indiens pendant quelques heures. La RBI avait indiqué mardi tard dans la soirée qu'elle allait injecter 80 milliards de roupies (940 millions d'euros) dans le système bancaire en achetant des obligations d'Etat à long terme, afin d'assouplir l'offre de crédits.
"Il est important de répondre aux risques, pour la stabilité macro-économique, apportés par des déséquilibres extérieurs", a souligné la RBI dans un communiqué.
Certaines raisons de l'affaiblissement de la roupie n'ont en effet rien à voir avec l'Inde. Les devises des grands pays émergents connaissent actuellement des accès de faiblesse en raison d'un départ des capitaux étrangers vers les Etats-Unis, où la croissance et les taux devraient remonter.
La dernière mesure de la RBI semble à l'encontre des annonces de cet été, qui cherchaient à retirer des liquidités du marché pour freiner le déclin de la roupie. Mais aucune n'a eu les effets escomptés et elles ont en outre tendu les taux d'intérêt sur 10 ans à leur plus haut niveau depuis cinq ans.
Mercredi, ces taux à 10 ans se sont détendus à 8,27%, contre 9,23% à la mi-journée mardi, un plus haut depuis cinq ans.
"Les volte-face de la part des dirigeants se poursuivent", a estimé Rajeev Malik, économiste chez CLSA, dans un courriel à l'AFP. "Les dernières annonces de la RBI visent à nettoyer le bazar sur le marché obligataire qu'a provoqué leur défense alambiquée et inefficace de la devise".
"Il va certainement y avoir une reprise sur les marchés financiers indiens, née du soulagement, mais la situation de fond ne change pas", a ajouté l'économiste.
L'accès de faiblesse de la roupie s'explique aussi par des facteurs purement intérieurs: une croissance en berne (5% pour l'année budgétaire 2012/13, soit le taux le plus faible depuis dix ans), un agenda de réformes économiques quasiment au point mort, le gouvernement optant pour le statu quo avant les élections générales du printemps prochain, une corruption endémique et un déficit courant au plus haut.
Ces dernières semaines, gouvernement et Banque centrale ont annoncé plusieurs initiatives pour enrayer la glissade de la devise et freiner le déficit courant, mesure la plus large des échanges commerciaux de l'Inde avec l'étranger.
Il a été décidé d'une hausse des droits de douane pour limiter les importations d'or --dont les Indiens sont friands--, d'émissions d'obligations "quasi-souveraines" pour permettre aux sociétés étrangères de lever des capitaux à l'étranger et soutenir ainsi la croissance, et de restrictions sur les sorties de capitaux pour les particuliers et les entreprises.