La supervision des banques de la zone euro va pouvoir se concrétiser après le feu vert donné mardi par les ministres européens des Finances, mais les discussions promettent d'être serrées sur d'autres aspects de l'union bancaire, censée empêcher la survenue d'une nouvelle crise de la dette en Europe.
Un mois après le Parlement européen, les ministres des 28 réunis à Luxembourg ont adopté le mécanisme de supervision bancaire par un vote à l'unanimité.
Le commissaire européen chargé des Services financiers, Michel Barnier, a salué "une date importante". "Désormais nous pouvons réellement nous mettre au travail, nous y sommes prêts et nous allons commencer par les aspects pratiques: embaucher des superviseurs, louer un immeuble, préparer les tests de résistance" des banques, a expliqué Jörg Asmussen, membre du directoire de la Banque centrale européenne.
C'est en effet à la BCE que reviendra le rôle de superviseur, qui concernera à terme non seulement les banques de la zone euro mais aussi celles des autres pays de l'UE qui souhaiteront participer. L'institution de Francfort devrait embaucher un millier de personnes pour accomplir cette tâche.
Le mécanisme sera opérationnel "en novembre 2014", a précisé le ministre lituanien des Finances, Rimantas Sadzius, dont le pays préside l'UE pour six mois.
Avant de prendre en charge la supervision des banques de la zone euro, la BCE entend faire une "photographie" exacte de la qualité de leurs actifs. Couplé aux tests de résistance évoqués par M. Asmussen, ce passage en revue de leur bilan devrait être mené l'an prochain.
L'imminence de cet exercice a ravivé les craintes de nouveaux besoins de recapitalisation des banques. La question a été abordée mardi, et plusieurs responsables européens ont tenu à rassurer sur ce point.
Objections de l'Allemagne
Si l'évaluation des bilans des banques met à jour des trous de financement, leur renflouement se fera suivant "un ordre clair", a rappelé le commissaire européen chargé des Affaires économiques, Olli Rehn: seront sollicités "les actionnaires, les créditeurs privés, et seulement ensuite des filets de sécurité publics, au niveau national et, si c'est nécessaire, au niveau européen" avec le Mécanisme européen de stabilité (MES).
Celui-ci pourrait accorder des prêts indirects au secteur bancaire par l'intermédiaire des Etats, "à l'espagnole", a-t-il dit, mais aussi recapitaliser directement les banques "dans des cas exceptionnels". Ces circonstances et ces modalités devront être précisées prochainement.
D'ici la fin de l'année, les ministres devront aussi se mettre d'accord sur le second pilier de l'union bancaire, le mécanisme unique de "résolution", qui permettra de décider du sort des banques menacées de faillite. Sa mise en place est "urgente", a rappelé dans un communiqué le président de la Commission, José Manuel Barroso.
Il faut un accord au niveau ministériel pour que le Parlement puisse adopter le texte avant les élections européennes de 2014. Mais beaucoup d'obstacles restent à surmonter en vue d'un compromis, espéré avant Noël, et les réunions pourraient s'enchaîner en décembre.
"C'est difficile et c'est possible d'aboutir à un accord avant la fin de l'année", a estimé M. Barnier, en se disant "optimiste".
L'Allemagne a soulevé plusieurs objections, à commencer par la base juridique du mécanisme, qu'elle conteste. Elle remet aussi en question le fait que la Commission européenne soit investie de la mission d'"appuyer sur le bouton" lorsqu'il faudra décider du sort d'une banque.
Le mécanisme de résolution doit s'accompagner d'un fonds, abondé directement par le secteur bancaire, selon le projet présenté par la Commission. La France y est favorable, mais l'Allemagne préfère un réseau de fonds nationaux.
Il va falloir aussi faire en sorte que les pays qui veulent y participer, mais ne sont pas dans la zone euro, soient traités de manière équitable.
Le débat porte enfin sur le nombre de banques qui seront concernées par le mécanisme de résolution. "Il pourrait y avoir plusieurs étapes, en commençant par les plus grandes banques avant d'élargir le champ", a suggéré mardi Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe.