par Roberta Rampton et Richard Cowan
WASHINGTON (Reuters) - Donald Trump, accusé par ses adversaires d'alimenter un climat de violence, a déclaré lundi que les fusillades qui ont ensanglanté les Etats-Unis ce week-end constituaient une "attaque contre la nation" réclamant des solutions dépassant les clivages partisans.
Dans une déclaration devant la presse à la Maison blanche, le président américain a appelé ses compatriotes à "condamner le sectarisme, le racisme et le suprémacisme blanc". "Ces sinistres idéologies doivent être vaincues", a-t-il dit. "La haine n'a pas de place en Amérique. La haine déforme les esprits, ravage les coeurs et dévore les âmes", a-t-il ajouté.
Donald Trump a proposé de renforcer le contrôle d'internet, de réformer la législation sur les maladies mentales ou d'appliquer plus largement la peine de mort en réponse aux tueries d'El Paso et Dayton, qui ont fait 31 morts au total.
Il n'a pas répondu aux accusations selon lesquelles son discours anti-immigrants contribuait à nourrir les tensions raciales aux Etats-Unis. Il n'a pas non plus évoqué un renforcement du contrôle des armes à feu.
Au cours du week-end, plusieurs candidats à l'investiture démocrate en vue de l'élection présidentielle de novembre 2020 l'ont accusé d'avoir une influence indéniable sur la résurgence du nationalisme blanc et de la xénophobie aux Etats-Unis.
Lundi, l'ancien président Barack Obama, qui s'exprime rarement en public depuis qu'il a quitté la Maison blanche, a publié un communiqué sur Twitter (NYSE:TWTR) dans lequel il appelle à "rejeter clairement les propos sortant de la bouche de n'importe lequel de nos dirigeants qui nourrissent un climat de peur et de haine ou normalisent les sentiments racistes".
Le tueur présumé d'El Paso, qui s'est livré aux autorités et coopère avec les enquêteurs, a diffusé un manifeste dans lequel il présente son acte comme une réponse à "l'invasion hispanique au Texas" et affiche son soutien à l'auteur des attentats de mars contre des mosquées de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, qui ont fait 51 morts.
Son passage à l'acte est traité comme un acte de terrorisme intérieur. Initialement de 20 morts, le bilan de la fusillade, survenue samedi matin, s'est alourdi lundi à 22 morts après le décès de deux blessés à l'hôpital.
Les motivations du tireur de Dayton dans l'Ohio, abattu par la police, restent floues. Neuf personnes sont tombées sous ses balles dans la nuit de samedi à dimanche.
"CULTURE DE LA VIOLENCE"
Accusé de ne pas agir suffisamment contre les groupes extrémistes implantés sur le territoire américain, Donald Trump a annoncé à la Maison blanche qu'il ordonnerait au département de la Justice d'enquêter sur le "terrorisme intérieur" et proposerait une loi pour garantir que les auteurs de crimes de haine et tueries de masse écopent de la peine capitale.
Il a jugé nécessaire de réformer les lois sur la santé mentale afin d'identifier les personnes présentant des troubles psychiatriques et de collaborer avec les entreprises numériques pour repérer de potentiels meurtriers sur les réseaux sociaux.
"Nous devons nous assurer que ceux qui représentent un risque grave pour la sécurité publique n'aient pas accès à des armes à feu et que s'ils y ont accès, ces armes à feu puissent leur être retirées dans un délai rapide", a déclaré Trump.
"Ce sont les maladies mentales et la haine qui ont appuyé sur la détente, pas l'arme à feu", a-t-il ajouté.
Donald Trump a aussi jugé nécessaire de réduire la "culture de la violence", citant notamment "les jeux vidéo qui célèbrent la violence".
Plus tôt dans la journée, sur Twitter, le président américain avait appelé les parlementaires républicains et démocrates à transcender leurs divergences pour adopter une loi durcissant les vérifications des antécédents des acquéreurs d'armes à feu.
"Les républicains et les démocrates doivent s'unir pour parvenir à des contrôles solides des antécédents (des acheteurs d'armes à feu) peut-être en mariant cette loi avec la réforme désespérément nécessaire de l'immigration", a-t-il dit.
Le démocrate Jerrold Nadler, président de la commission des Affaires judiciaires de la Chambre des représentants, a aussitôt jugé "écoeurante" la suggestion de Trump de mêler contrôles sur les armes à feu et réforme de l'immigration, contre laquelle les démocrates sont vent debout.
"RACISTE OUVERTEMENT DÉCLARÉ"
Dans sa déclaration à la Maison blanche, Trump n'a plus fait mention de l'immigration.
Il n'a pas davantage répondu directement aux accusations de ceux qui jugent que son discours sur l'immigration alimente un climat de tensions aux Etats-Unis.
Beto O'Rourke, né à El Paso et ancien élu du Texas à la Chambre des représentants, a ainsi déclaré sur CNN que Donald Trump était un "raciste ouvertement déclaré" encourageant le développement du racisme dans le pays.
Même tonalité dans les propos du sénateur Bernie Sanders. "Toutes les preuves suggèrent que nous avons un président raciste et xénophobe qui attire et tente d'attirer le nationalisme blanc", a-t-il jugé sur CNN.
Sur Twitter, Donald Trump s'en est pris aux "fake news" et aux médias, leur attribuant une responsabilité dans "la colère et la rage qui s'accumulent depuis de nombreuses années".
La lutte contre l'immigration illégale est l'un des principaux thèmes que porte Trump depuis son entrée en lice dans la primaire républicaine, en juin 2015. Il plaide depuis le début de sa présidence pour la construction d'un mur à la frontière mexicaine.
(Avec Doina Chiacu et Susan Heavey; Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)