PARIS (Reuters) - Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a défendu le caractère "humanitaire" de l'évacuation des migrants d'une partie de la "jungle" de Calais prévue mercredi face aux critiques des associations, qui réclament son report.
"L'État n’a jamais déployé autant d’efforts humanitaires pour améliorer la situation à Calais", déclare-t-il dans une interview publiée lundi dans La Voix du Nord.
"Le recours à la contrainte n’est pas l’option que nous souhaitons privilégier. Il s’agit d’une opération humanitaire où nous proposons des solutions à tous. Le nombre de places offertes pour mettre à l’abri les migrants est suffisant pour accueillir tout le monde", ajoute-t-il.
Le tribunal administratif de Lille doit examiner mardi un référé déposé par plusieurs associations contre l'arrêté d'expulsion, qui vise la partie sud de la "jungle", un bidonville de la périphérie de Calais où se massent des milliers de migrants en quête d'un passage vers la Grande-Bretagne .
Elles affirment que l'opération a été décidée sans proposer des solutions alternatives suffisantes, estimant notamment que le nombre de migrants concernés, de l'ordre d'un millier selon l'Etat, est en réalité le triple.
Louis Gallois, qui préside la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale, a réclamé que l'Etat y associe les organisations humanitaires.
"Nous ne sommes pas contre le fait que l'on réduise le nombre de personnes qui vivent sur la lande dans des conditions inacceptables, nous souhaitons simplement que cela se fasse dans l'ordre et dans des conditions dignes qui offrent aux personnes concernées un avenir", a-t-il dit sur France Inter.
"Ceci n'est possible que si ça se fait en coordination avec des associations qui sont quotidiennement au contact de ces populations. Ce n'est pas le cas aujourd'hui", a-t-il ajouté en demandant la création d'un "comité de pilotage entre l'Etat et les associations pour faire ça dans l'ordre".
UN CAMP MOINS PEUPLÉ
Pour Louis Gallois, "ça prendra du temps et ça ne peut pas se faire d'ici mercredi".
Le risque, selon lui, est de "retrouver une partie de ces personnes dans les camps qui sont au nord de Calais jusqu'à la frontière belge et, maintenant vous le savez, en Belgique".
Environ 4.000 migrants, d'après les associations, sont aujourd'hui présents à Calais. Ils étaient quelque 6.000 en décembre. La préfecture du Pas-de-Calais souhaite à terme réduire le nombre de migrants à environ 2.000, 1.500 dans le camp aux normes humanitaires et 500 dans le centre d'accueil de nuit pour les femmes et les enfants.
Bernard Cazeneuve a d'autre part réagi aux déclarations du Premier ministre britannique, David Cameron, qui a brandi la menace d'un arrêt des contrôles d'immigration côté français si les électeurs britanniques votaient en faveur d'une sortie de l'Union européenne.
La renégociation des accords franco-britanniques du Touquet, qui ont établi ces contrôles, "n’est pas à l’ordre du jour", dit-il à La Voix du Nord, alors que c'est une demande des autorités régionales présidées par Xavier Bertrand (LR).
"Repousser la frontière de l’autre côté de la Manche n’empêcherait en rien la formation d’un campement de ce côté-ci de la Manche (...) Par ailleurs, les Britanniques, qui ne sont pas dans l’espace Schengen pourraient aisément refouler à leur frontière ceux qui voudraient la traverser".
(Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)