par Alastair Macdonald
BRUXELLES (Reuters) - David Cameron a repoussé mardi tout ajustement de l'avant-projet d'accord qu'il a arraché à l'Union européenne pour tenter de maintenir le Royaume-Uni dans l'ensemble communautaire, malgré la mise en garde du président du Parlement européen sur le fait qu'il n'était pas certain qu'il soit voté en l'état.
Au lendemain d'un entretien avec François Hollande, qui lui a fait part des réserves françaises sur le volet concernant les réglementations financières, le Premier ministre britannique a rencontré Martin Schulz et des représentants des principaux groupes politiques au Parlement, puis Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne.
Cameron n'a fait aucune déclaration publique pendant son déplacement à Bruxelles, où il reviendra dès jeudi pour un Conseil européen de deux jours qui sera presque entièrement consacré au risque de Brexit.
Selon une personne qui a assisté à l'un des entretiens, le chef du gouvernement britannique, qui s'est engagé à organiser un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l'UE, peut-être dès le mois de juin, est apparu particulièrement nerveux pendant les rencontres du jour.
L'Allemand Manfred Weber, un allié de la chancelière allemande Angela Merkel qui préside le groupe conservateur au Parlement, dit l'avoir au contraire trouvé "sûr de pouvoir convaincre" les Britanniques de dire "non" au Brexit lors du référendum.
A Prague, où il assistait mardi à un sommet des pays d'Europe centrale, le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui a présenté au début du mois l'avant-projet d'accord négocié avec Londres, a estimé que les dirigeants européens n'étaient plus très loin d'un accord définitif.
"Je suis convaincu qu'il ne nous reste que quelques pas à faire pour parvenir à un accord", a-t-il déclaré à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre tchèque, Bohuslav Sobotka.
Tout en souhaitant le maintien du Royaume-Uni dans l'UE, les pays du Groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque et Slovaquie) ont notamment réclamé des éclaircissements sur le versement de prestations sociales aux travailleurs immigrés originaires d'autres pays de l'UE, dont Londres veut être exempté.
"BOÎTE DE PANDORE"
Quelle que soit l'issue des ultimes négociations entre chefs d'Etat et de gouvernement, Martin Schulz a prévenu mardi qu'il ne pouvait pas garantir que l'accord serait ensuite entériné par le Parlement européen.
"Aucun gouvernement ne peut se présenter devant le Parlement en disant: 'voilà notre proposition. Pouvez-vous garantir le résultat?' Ce n'est pas possible dans une démocratie", a souligné le président allemand du Parlement européen à l'issue de son entretien avec Cameron.
Schulz a néanmoins assuré que le Parlement européen se prononcerait sur le texte "immédiatement après le référendum" organisé par Londres.
Cameron devait initialement rencontrer les chefs de file de tous les groupes parlementaires, mais le programme a été modifié, ce qui lui a permis d'échapper à une confrontation avec Nigel Farage, numéro un du Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (Ukip) et farouche partisan du Brexit.
Reconduit en mai dernier, le Premier ministre britannique veut renégocier les relations entre Londres et l'UE sur quatre points (législation/souveraineté, relations entre pays membres et non membres de la zone euro, compétitivité, immigration) avant de poser par référendum la question du maintien de la Grande-Bretagne au sein de l'UE.
Les chefs de file des groupes parlementaires ont depuis dit craindre que d'autres Etats membres s'engouffrent dans la brèche ouverte par Londres pour réclamer à leur tour un traitement préférentiel sur tel ou tel sujet.
"C'est la boîte de Pandore", a commenté un responsable du Parlement, interrogé sur l'issue possible du vote des 750 députés. "Le Parlement est imprévisible", a-t-il souligné.
Guy Verhofstadt, chef de file du groupe libéral, a néanmoins estimé qu'il était dans l'intérêt des institutions européennes de coopérer pleinement avec Cameron pour ne pas faire le lit des eurosceptiques, comme l'Ukip, et celui du président russe Vladimir Poutine.
"Les seuls vainqueurs d'un Brexit seraient Nigel Farage et Vladimir Poutine, qui se délecterait d'une Europe divisée", a déclaré l'eurodéputé belge.
(Avec Robert-Jan Bartunek et Philip Blenkinsop à Bruxelles, Robert Muller à Prague et Paul Taylor à Paris; Jean-Philippe Lefief et Tangi Salaün pour le service français)