par Adam Jourdan
SHANGHAI (Reuters) - Disneyland a ouvert ses portes jeudi à Shanghai, premier parc de loisirs de Walt Disney en Chine continentale et son plus gros investissement à l'étranger, d'un montant de 5,5 milliards de dollars (4,9 milliards d'euros).
Le groupe de Burbank (Californie), soucieux d'éviter que ne se répète son expérience de Hong Kong, compte sur le désir d'une classe moyenne en plein essor de goûter à la société de consommation à l'occidentale et sur l'explosion du tourisme local pour attirer le public chinois.
Le parc Disneyland de Hong Kong a perdu près de 500 millions de dollars de 2008 à 2011, selon son associé public local. Il a été bénéficiaire de 2012 à 2015 pour redevenir déficitaire l'an passé.
Disney espère donc avec son pari chinois relancer un segment parc de loisirs morose, réputé surtout pour ses déconvenues financières à l'image par exemple d'Euro Disney. Il voit dans la Chine sa plus grande opportunité depuis l'achat de terrains en Floride dans les années 60 pour y bâtir Walt Disney World, le parc de loisirs le plus visité dans le monde.
"C'est l'un des moments les plus prenants et remplis de fierté dans l'histoire de la société Walt Disney", a déclaré le directeur général Bob Iger lors de la cérémonie d'ouverture, durant laquelle le vice-Premier ministre Wang Yang et lui-même ont lu des lettres de soutien signées des présidents Barack Obama et Xi Jinping.
Disney s'emploie déjà à étendre le site de Shanghaï pour pouvoir accueillir les foules de visiteurs d'un pays où le nombre de parcs d'attractions ne cesse de croître.
"Il y a en fait un chantier en cours cette semaine. Nous ouvrons mais nous continuerons quand même de construire pour développer ce qui est au programme le jour de l'ouverture", a dit Bob Iger. "Nous avons beaucoup d'espace pour ce faire et nous pensons que nos associés sont partants. C'est pourquoi nous croyons que ça ira très vite".
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Quelque 2.500 parcs de loisirs sont prévus en Chine et parmi eux le DreamCenter de DreamWorks Animation SKG, le parc de Six Flags Entertainment, tous deux devant ouvrir en 2019, sans parler de ceux du japonais Hello Kitty.
Le chinois Haichang Ocean Park Holdings doit inaugurer l'an prochain le plus grand parc aquatique du pays, tandis que le groupe Dalian Wanda du promoteur immobilier Wang Jianlin a l'ambition d'ouvrir 15 sites en Chine d'ici 2020 et cinq à l'étranger.
Pour autant, l'attitude de la Chine envers Disney est ambiguë.
C'est ainsi que le quotidien PLA, proche de l'armée, a mis les Chinois en garde contre la "propagande invisible" du film "Zootopie" des studios Disney, alors même que le directeur général avait été accueilli par le président Xi Jinping lui-même en mai et que le groupe américain s'est vu accorder une protection "spéciale" de sa propriété intellectuelle.
Sans compter que Disney fait des étincelles au box office chinois: "Zootopie", "Captain America: Civil War", "Le Livre de la Jungle" et "Star Wars: le Réveil de la Force" figurent parmi les dix films les plus vus de 2016, avec une recette globale de plus de 690 millions de dollars, selon Box Office Mojo. Les personnages de ces films sont figurés à Disneyland Shanghai.
Pour Wang Jianlin, Disney ne fera pas le poids face à sa "meute" de parcs mais le groupe américain compte s'appuyer sur son expérience dans ce domaine et sur son catalogue de films, de programmes télévisés et de produits dérivés.
En outre, Disney a façonné son nouveau site au goût local.
A Disneyland Shanghai, exit la "Main Street", petite ville américaine idéalisée, et place au zodiaque chinois réinterprété par Disney dans un grand espace vert. Le groupe américain a par ailleurs engagé un général en retraite de PLA pour mettre en scène Tarzan tandis qu'une première en mandarin du spectacle "Le Roi Lion" sera donnée lors de la cérémonie d'ouverture.
Cela étant, Disney devra partager la recette avec le groupe public chinois Shendi Group, qui détient 57% de la coentreprise qu'il a constituée avec lui, une concession faite au terme de longues négociations.
Shendi est un consortium regroupant quatre grandes entreprises publiques chinoises: Shanghai Media Group, l'hôtelier Jin Jiang International, contrôlé par la municipalité de Shanghaï, Bailian Group, un groupe de distribution, et le promoteur immobilier Lujiazui Development Group.
(Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)