PARIS (Reuters) - La lutte antiterroriste doit être menée partout, y compris au Nigeria et dans le sud de la Libye où se situe désormais le centre de gravité du terrorisme, a estimé jeudi le commandant de la force antiterroriste française Barkhane qui opère dans la bande sahélo-saharienne.
"Le centre de gravité du terrorisme est plus sur les deux zones d'intérêt de Barkhane, le sud Libye et le Nigeria, que sur sa zone d'action", a dit le général Jean-Pierre Palasset lors d'une visio-conférence avec des journalistes, depuis le QG de Barkhane à N'Djamena, au Tchad.
"Le terrorisme va partout là où il n'est pas combattu", a-t-il ajouté. "La lutte contre le terrorisme ne doit pas se faire dans la demi-mesure, soit on lutte contre le terrorisme et on le vainc, soit on n'est pas partout où il est et il survit."
Quelque 3.500 militaires français sont actuellement déployés sur cinq pays (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad, Burkina Faso) avec pour objectif la traque des djihadistes qui circulent librement dans la région au gré des frontières poreuses.
En un an, selon l'armée française, le dispositif antiterroriste a permis d'arrêter ou du tuer plus d'une centaine de combattants djihadistes, de mettre au jour une soixantaine de caches d'armes et de détruire des tonnes de munitions.
Amada Ag Hama, dit "Abdelkrim le Touareg", lié à l'enlèvement et au meurtre de deux journalistes français de RFI, et Ahmed el Tilemsi, dirigeant du groupe djihadiste al Mourabitoun, ont notamment été tués.
Le chef du groupe djihadiste Al Mourabitoune, Mokhtar Belmokhtar, cerveau de l'attaque du site d'In Amenas en Algérie en janvier 2013, est quant à lui considéré comme le djihadiste le plus recherché à l'heure actuelle dans le Sahel.
RECOMPOSITION DU PAYSAGE
"Il y a eu une recomposition complète du paysage terroriste" au sein des pays du G5 Sahel, souligne le général Palasset qui note "une réduction des capacités opérationnelles" des groupes armés, désormais incapables "de mener des actions de grande envergure et coordonnées".
"Le terrorisme dans la zone de Barkhane est très faible" comparé celui mené par l'Etat islamique ou Boko Haram, ajoute-t-il.
Au Nigeria voisin, où sévit le groupe islamiste Boko Haram, l'action menée par le Cameroun, le Niger et le Tchad depuis le début de l'année a permis de détruire selon lui 30 à 40% des forces de la secte qui est toutefois "loin d'être vaincue".
La situation dans le sud de la Libye, où ont trouvé refuge les djihadistes, suscite quant à elle depuis près d'un an l'inquiétude de la communauté internationale qui écarte toutefois pour l'heure toute intervention militaire.
"Le sud libyen, c'est le pays incubateur du terrorisme, c'est là où il naît et là où il se développe", souligne le général Palasset. "Au sud libyen, tout est à faire".
La France, qui met en garde contre un "sanctuaire terroriste" en Libye, a installé une base militaire à Madama, dans le nord-est du Niger, à proximité de la frontière libyenne.
"Si on laisse des zones refuges, c'est autant de bases de départ qui affaibliront voire déstabiliseront un certain nombre d'Etats", souligne le commandant de Barkhane. "C'est une vraie question qui est posée à nos politiques sur leur action globale. Le 'partout' et 'tout le temps' est essentiel".
(Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse)