PARIS (Reuters) - François Hollande a salué jeudi en Michel Rocard "une grande et belle figure de la République", "un homme politique audacieux" et "un intellectuel brillant" dont les leçons valent encore après sa mort, samedi, à l'âge de 85 ans.
Aux Invalides, où Michel Rocard a reçu hommage national, le président français a brossé un portrait exhaustif de l'ancien Premier ministre, nommé à Matignon en 1988, dans lequel on pouvait par moments entendre un écho à l'actualité politique.
"Qu'a-t-il montré ? Que le compromis n'est pas une faiblesse, que la négociation n'est pas un défaut de volonté et qu'on obtient toujours plus par le dialogue que par la confrontation", a déclaré François Hollande.
"Et en même temps, pour lever les blocages, il n'a pas hésité à recourir aux procédures prévues par la Constitution et, à 28 reprises, il a dû engager la responsabilité de son gouvernement pour faire adopter des textes essentiels", a-t-il ajouté dans son discours d'une vingtaine de minutes.
Le gouvernement de Manuel Valls, qui revendique l'héritage du rocardisme, a lui-même recouru cette semaine à l'article 49-3 de la Constitution pour faire adopter sans vote le projet de loi Travail à l'Assemblée nationale.
"(Michel Rocard) rêvait d'un pays où on se parle de nouveau, de villes où les tensions seraient moindres, d'une politique où l'on serait attentif à ce qui est dit, plutôt qu'à qui le dit. Là encore, le conseil vaut aujourd'hui", a souligné François Hollande.
Selon le chef de l'Etat, l'ex-Premier ministre "a toujours su qu'il n'y avait de redistribution possible que s'il y avait production. Et que pour maîtriser le capitalisme, fallait-il au moins en comprendre les lois et aussi son efficacité."
Devant un parterre de dirigeants politiques actuels et de figures des années Mitterrand, François Hollande a également évoqué le rapport de Michel Rocard à la gauche et son destin présidentiel contrarié.
"Il était conscient que les deux gauches devaient s'unir pour gouverner. Jamais il n'a joué contre sa famille politique, même quand il a fallu qu'il s'efface devant François Mitterrand", a rappelé François Hollande.
Michel Rocard a obtenu 3,6% des suffrages au premier tour de l'élection présidentielle en 1969, puis a dû se retirer devant François Mitterrand, alors chef de file incontesté de la gauche, avant les scrutins de 1981 et 1988.
(Simon Carraud, édité par Yves Clarisse)