PARIS (Reuters) - Plusieurs responsables de l'UMP ont appelé mercredi à mettre fin aux divisions et règlements de compte qui minent le parti, dont l'endettement de 74,5 millions d'euros menace l'existence même en cas de défaite électorale en 2017.
Au lendemain de la présentation de l'audit des comptes lancé après la démission de la présidence de Jean-François Copé sur fond d'affaire Bygmalion, la question de la survie de l'UMP se pose non seulement sur le plan financier mais aussi en raison des conflits internes.
Mardi soir, Alain Juppé, membre du triumvirat d'ex-Premiers ministres porté provisoirement à la tête du parti avec François Fillon et Jean-Pierre Raffarin, avait souhaité que cessent les "accusations", les "fuites permanentes", tout en reconnaissant qu'il risquait de ne pas être entendu.
Le secrétaire général Luc Chatel a repris ce discours mercredi en déplorant que soient lancées des "boules puantes", alors que se multiplient les fuites dans la presse en vue de la probable joute pour la présidentielle entre François Fillon, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy, qui doit encore se prononcer publiquement.
"Je n'en peux plus", a dit Luc Chatel sur Europe 1. "J'en ai assez de ce que certains veulent déstabiliser, je ne sais pas si c'est de l'intérieur ou de l'extérieur, mais en tout cas, veulent déstabiliser l'UMP. Nous ne nous laisserons pas faire!"
Il a évoqué un "état d'esprit délétère", terme également employé par la députée européenne Nadine Morano, qui a visé, elle l'actuelle direction provisoire du parti.
"J'observe qu'à chaque bureau politique, et je vais le dire à ceux qui sont en charge maintenant, le triumvirat qui était censé nous apporter la sérénité et la paix, on voit bien que nous sommes en pleine zizanie", a-t-elle dit sur i>Télé.
"Il y a cette ambiance dans les couloirs complètement délétère de règlement de comptes."
COPÉ ET DATI CONTRE-ATTAQUENT
La perspective du congrès qui désignera le successeur de Jean-François Copé puis de la primaire pour la présidentielle, en 2016, annonce bien une bataille féroce.
Mis hors jeu par l'affaire Bygmalion, un système présumé de surfacturation pendant la campagne présidentielle de 2012, Jean-François Copé a déploré mercredi un "déferlement d'attaques (...) au sein de notre famille politique".
"Notre parti devrait être sur tous les fronts mais (..) ce sont hélas des souhaits de vengeance et des rancoeurs personnelles qui semblent d'abord être à l'esprit de certains membres de l'UMP", écrit-il sur sa page Facebook.
La charge la plus violente est venue de Rachida Dati, ancienne ministre de Nicolas Sarkozy, épinglée dans la presse pour des frais de téléphone ou de voyage, qui a attaqué nommément Alain Juppé et François Fillon.
Dans une série de messages au vitriol sur son compte Twitter, elle réclame la "transparence" sur leurs frais et la rémunération de leurs collaborateurs, et dénonce la "haine" que lui voueraient le second et son entourage, laissant entendre qu'ils sont à l'origine des informations publiées dans la presse.
Cette crise ouverte, sur fond d'enquêtes judiciaires quant aux dépenses liées à la campagne de 2012, dessine un schisme que Luc Chatel voit aboutir à une "refondation" du parti.
Celle-ci aura toutefois comme préalable l'apurement des comptes, une gageure au vu du bilan présenté mardi puisque l'UMP prévoit de ramener sa dette de 74,5 millions d'euros au 30 juin à 55 millions en 2017, mais aura alors à rembourser l'emprunt contracté pour acheter son siège du XVe arrondissement de Paris.
Le parti, solvable mais dont les fonds propres sont négatifs de 40 millions d'euros, a obtenu fin 2013 le report de quatre ans du remboursement du capital dû aux banques, qu'il ne pouvait supporter avec ses revenus actuels.
Une défaite électorale dans trois ans et des dotations de l'Etat plus faibles qu'en cas de victoire poseraient la question de la vente du bâtiment, exclue pour l'heure.
D'autant que le plan d'économies prévu d'ici là - baisse de 20% des dépenses de fonctionnement par rapport à 2013 et chute de plus de 60% du budget prévu pour la campagne en 2016-17 par rapport à il y a dix ans - sera difficile à respecter.
(Gregory Blachier, édité par Yann Le Guernigou)