LONDRES (Reuters) - Les révélations du Financial Times sur le harcèlement sexuel dont ont été victimes des hôtesses recrutées pour un gala de charité réservé aux hommes la semaine dernière à Londres ont coûté sa place mercredi à un membre du ministère de l'Education et conduit la Première ministre, Theresa May, à exprimer son "malaise".
David Meller, un des co-présidents du club organisateur de cette soirée privée, siégeait depuis juin 2013 au sein d'une commission non exécutive dépendant du ministère. Sa démission a été annoncée au Parlement par Anne Milton, secrétaire d'Etat à l'Education.
"Il me semble tout à fait extraordinaire qu'au XXIe siècle, des allégations de ce genre fassent encore surface", a-t-elle dit lors d'un débat parlementaire.
Le porte-parole de Theresa May a confié pour sa part que "la lecture de cet article ce matin avait mis la Première ministre mal à l'aise".
D'après le Financial Times, David Meller copréside avec le promoteur immobilier Bruce Ritchie le "Club des présidents" dont le gala annuel, auquel seuls des hommes sont conviés, a viré cette année au cauchemar pour plusieurs femmes recrutées comme hôtesses.
Propositions déplacées, attouchements, harcèlement sexuel: le récit reconstitué par le FT survient en plein débat sur la place et la sécurité des femmes dans la société et interroge sur le comportement de ces hommes issus des élites financières, politiques et autres cercles de pouvoir.
Aucun commentaire n'a pu être obtenu dans l'immédiat auprès du Presidents Club, dont le gala annuel, fermé à la presse, sert à collecter des fonds pour financer des projets caritatifs.
Le FT disposait de deux personnes parmi les 130 femmes recrutées cette année pour servir d'hôtesses à la soirée organisée au Dorchester Hotel, où quelque 360 hommes étaient conviés. Ses journalistes ont également eu accès à la salle à manger et aux bars.
"ÉPOUVANTABLE ET HONTEUX"
Les hôtesses de la soirée, écrit le journal, avaient pour consigne de porter des robes noires courtes avec dessous assortis et talons hauts. Toutes ont dû signer une clause de confidentialité sur le déroulement de la soirée, poursuit le journal.
L'article indique que nombre d'entre elles ont été importunées, victimes d'attouchements, de tentatives de baisers forcés, de commentaires déplacés et autres propositions de monter rejoindre des invités dans leur chambre.
Plusieurs invités ont glissé leurs mains sous leur robe, une des hôtesses affirme que l'un d'eux a exhibé son pénis devant elle. Un autre témoin parle d'un homme ayant incité une hôtesse à boire en lui demandant d'arracher sa petite culotte et de danser sur une table.
"Est-ce cela que ces hommes réclament en échange de dons à des causes charitables ? Absolument épouvantable et honteux", a tweeté la députée travailliste et ex-ministre Yvette Cooper.
Certains des lots mis aux enchères pour collecter des fonds sont éloquents, dont une nuit dans un club de strip-tease ou une opération de chirurgie esthétique "pour donner un peu de piquant à votre femme".
Un autre lot offrait de prendre le thé avec le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mark Carney. La Banque d'Angleterre, indignée qu'une soirée de ce genre ait pu se dérouler au coeur de la City, a annulé cette rencontre.
Le Foreign Office, qui avait offert pour ces enchères un déjeuner avec Boris Johnson, n'a fait pour sa part aucun commentaire.
Sur son site internet, le fonds caritatif du Presidents Club explique avoir été créé il y a plus de trente ans pour lever des fonds à destination des enfants défavorisés.
L'un de ses bénéficiaires, le Great Ormond Street Hospital, un hôpital pour enfants de la capitale britannique, a annoncé qu'il restituerait les précédents dons émanant du Presidents Club.
Le groupe publicitaire WPP, qui réservait traditionnellement une table lors de cette soirée, a déclaré pour sa part qu'il ne s'y associerait plus.
(Estelle Shirbon avec William James; Henri-Pierre André pour le service français)