PARIS (Reuters) - Le ton est monté mercredi au sein de l'exécutif, au lendemain de la démission d'Emmanuel Macron, François Hollande demandant aux membres du gouvernement de jouer collectif, tandis que Manuel Valls ironisait sur l'ex-ministre "improvisé" candidat.
Lors d'un dîner réunissant des membres de la majorité mardi soir, après la démission du ministre de l'Economie, le chef de l'Etat a reconnu avoir "peut-être sous-estimé le caractère transgressif d'Emmanuel Macron", a rapporté le président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, Bruno Le Roux.
Mercredi, lors du conseil des ministres, puis dans un discours à l'Elysée, il a fait l'éloge du "collectif", dénonçant en creux le cavalier seul de son ex-conseiller devenu ministre.
"Rien n'est possible sans une action collective", a dit le chef de l'Etat devant le gouvernement de Manuel Valls.
Selon le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, il a aussi "rappelé la nécessité de l'esprit de responsabilité et de désintéressement", invitant chacun à poursuivre son action "dans un esprit collectif".
Emmanuel Macron a justifié sa démission par sa volonté de reprendre sa liberté pour se consacrer à son mouvement "En Marche !" et "tout faire" pour transformer la France dès 2017.
Selon certains de ses proches, l'ex-ministre sera candidat à l'élection présidentielle de 2017, bien que l'intéressé maintienne l'ambiguïté sur ses intentions.
"LA FORCE DE L'ENGAGEMENT"
Dans un discours plein de sous-entendus à l'Elysée, François Hollande a salué "la force de l'engagement, la force du collectif, la force de l'utilité pour soi et pour les autres".
Dans une allusion au choix Emmanuel Macron, le chef de l'Etat s'est dit opposé à tout "projet individuel, vous savez, un projet qui serait fait par un individu pour lui-même".
"Il y en a qui peuvent avoir cette conception. Mais on ne peut rien faire tout seul et pour soi-même. Il faut toujours faire avec les autres", a-t-il ajouté.
Plus direct, le Premier ministre, Manuel Valls, a estimé qu'"on ne s'improvise pas candidat à l'élection présidentielle".
"Je sais bien qu'on est dans un moment où tout doit aller vite, où le renouveau doit frapper à chaque instant. Mais enfin, la France, ça n'est pas n'importe quel pays", a ajouté le chef du gouvernement lors d'un déplacement à Evry (Essonne).
Face aux défis que rencontre la France, "on ne peut pas partir, on ne pas déserter, c'est trop important", a insisté le Premier ministre, qui se pose en recours pour la présidentielle tout en restant loyal à l'égard de François Hollande.
De l'avis de Bruno Le Roux, le pari d'Emmanuel Macron est risqué, faute de soutien, notamment à l'Assemblée nationale.
Selon le député PS Pascal Terrasse, l'ancien ministre peut compter sur "une quinzaine de députés" et "une vingtaine de sénateurs". Mais ces derniers devront choisir entre ce soutien et leur appartenance au Parti socialiste, rappelle le "patron" des députés PS.
"Je ne vous dis pas que je ne suis pas inquiet, car l'entreprise de décomposition se poursuit", a dit Bruno Le Roux à quelques journalistes, en référence aux candidatures "anti-Hollande" qui se multiplient à gauche.
A ses yeux, une candidature du président est le seul moyen d'éviter un émiettement à gauche synonyme de défaite assurée à l'élection présidentielle.
"Si François Hollande ne se présente pas, il y aura une multitude de candidatures", prédit-il. "Personne n'acceptera le résultat d'une primaire si le président n'est pas candidat. C'est pour ça que je pense qu'il n'y a pas le choix."
François Hollande doit annoncer sa décision en décembre, quelques semaines avant la primaire que le Parti socialiste a prévu d'organiser fin janvier.
(Jean-Baptiste Vey et Elizabeth Pineau, édité par Emmanuel Jarry)