NEW DELHI (Reuters) - Les parents de Danish Siddiqui, photographe de Reuters tué en juillet dernier en Afghanistan, ont lancé une procédure contre les taliban auprès de la Cour pénale internationale (CPI), a annoncé mardi un avocat de la famille.
Avi Singh, avocat basé à New Delhi, a annoncé lors d'une conférence de presse en ligne que les parents de Danish Siddiqui avaient saisi la CPI, basée à La Haye, pour engager des poursuites pour "crimes de guerre" contre six dirigeants taliban ainsi que contre d'autres commandants du mouvement islamiste non identifiés, qui ont selon eux ciblé leur fils parce qu'il était photojournaliste et parce qu'il était un ressortissant indien.
Danish Siddiqui, basé à New Delhi, avait rejoint l'Afghanistan pour couvrir la campagne des taliban pour reconquérir le pays sur fond de retrait des troupes américaines et des forces alliées.
Lorsqu'il a été tué, le 16 juillet 2021, il était intégré comme journaliste dans une équipe de forces spéciales afghanes. Il couvrait alors la tentative, finalement avortée, des forces gouvernementales afghanes de reprendre aux taliban le contrôle de la ville de Spin Boldak, l'un des principaux points de passage entre l'Afghanistan et le Pakistan, dans la province de Kandahar, dans le sud du pays.
Le photojournaliste de 38 ans a été "illégalement détenu, torturé et tué par les taliban, et son corps a été mutilé", expliquent Avi Singh et la famille de Danish Siddiqui dans un communiqué publié à l'issue de la conférence de presse.
"Ces actes et cet homicide sont constitutifs non seulement d'un meurtre, mais aussi d'un crime contre l'humanité et d'un crime de guerre."
Selon un commandant du corps des ex-forces spéciales afghanes qui avait intégré Danish Siddiqui pour ce reportage, le photojournaliste a par erreur été laissé sur place avec deux membres des commandos lorsque les forces afghanes se sont retirées de Spin Boldak sur fond d'intenses combats avec les taliban.
Des responsables afghans de la sécurité et des responsables gouvernementaux indiens ont déclaré à Reuters que le corps du journaliste avait subi des mutilations post-mortem alors qu'il était aux mains des taliban, selon des informations des services de renseignement, des photos et l'examen du corps.
Le porte-parole des taliban, Zabihullah Mujahid, a démenti en août dernier les informations selon lesquelles Danish Siddiqui avait été capturé et exécuté par le mouvement islamiste, qualifiant de "totalement fausses" les déclarations des responsables des forces afghanes de sécurité et du gouvernement indien.
Reuters avait de son côté fait savoir n'avoir pas pu vérifier de manière indépendante si les taliban avaient délibérément tué Danish Siddiqui ou profané son corps.
Photographe pour Reuters depuis 2010, Danish Siddiqui faisait partie de l'équipe de photographes de l'agence récompensée en 2018 par le prix Pulitzer de la photographie de reportage pour sa couverture de la crise des réfugiés Rohingyas ayant fui la Birmanie.
(Reportage Devjyot Ghoshal, version française Myriam Rivet, édité par Jean-Michel Bélot)