PARIS (Reuters) - Le Parlement français a adopté définitivement jeudi un projet de loi controversé sur l'immigration qui propose d'améliorer les conditions de vie des étrangers résidant légalement en France tout en renforçant la lutte contre l'immigration illégale.
L'Assemblée nationale, qui a constitutionnellement le dernier mot, a procédé jeudi à la lecture définitive de ce texte.
Le Sénat, où la droite est majoritaire, avait à chaque lecture durci le projet de loi et n'avait pu parvenir à un accord avec l'Assemblée en commission mixte paritaire (CMP). Mardi dernier, il a adopté une motion de rejet de l'ensemble du texte.
Le groupe socialiste et celui des radicaux de gauche ont voté pour. Celui du Front de gauche et une partie des écologistes se sont abstenus. Les groupes Les Républicains (LR) et UDI (centriste) ont voté contre.
"Ce projet de loi ne contient aucune disposition répondant aux failles de notre système migratoire", a dit Guy Geoffroy (LR) avant d'annoncer que les groupes LR de l'Assemblée et du Sénat saisiraient le Conseil constitutionnel.
Mais pour le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, "une politique d'immigration efficace et responsable consiste à accueillir sur notre sol les étrangers qui peuvent et doivent l'être dans les meilleurs conditions".
"Elle consiste aussi à reconduire à la frontière, avec humanité mais sans faiblesse, celles et ceux qui se trouvent en situation irrégulière", a ajouté le ministre.
Ce projet de loi, qui avait été envisagé dès le début de la législature en 2012, avait été présenté à la fin 2014 en conseil des ministres. Son parcours parlementaire a commencé en juillet dernier alors que l'Europe connaissait une vague migratoire sans précédent.
Le texte, qui fait suite à la réforme du droit d'asile votée l'an passé, instaure un nouveau titre de séjour d'une durée de deux à quatre ans, après un premier d'un an, afin d'éviter aux étrangers de se rendre chaque année en préfecture.
Il prévoit également la création d'un "passeport talent" d'une durée de quatre ans pour les étrangers détenteurs d'une qualification bien définie.
Dans son volet de lutte contre l'immigration illégale, le projet de loi propose d'augmenter les pouvoirs des préfets dans le but, notamment, de renforcer la lutte contre la fraude aux titres de séjour.
Cette disposition, parmi d'autres, est vivement critiquée par les associations de défense des immigrés comme la Cimade ou Emmaüs.
Le texte facilite les reconduites à la frontière pour les déboutés du droit d'asile. Ces derniers n'auront que quinze jours, contre trente actuellement, pour contester le décision d'éloignement. Le tribunal administratif n'aura que six semaines, contre trois mois actuellement, pour statuer.
Enfin, le texte prévoit l'intervention du juge des libertés et de la détention au bout de 48 heures pour un étranger en situation irrégulière détenu dans un centre de détention. Depuis 2011, il ne peut intervenir qu'après un délai de cinq jours.
(Emile Picy, édité par Sophie Louet)