PARIS (Reuters) - Les autorités françaises se préparent à un retour en France de djihadistes du fait du retrait annoncé des forces américaines de Syrie, a laissé entendre mardi le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, qui a ajouté que tous les "revenants" seraient remis à la justice pour être jugés et sanctionnés.
"Vous savez que les Américains se désengagent de Syrie. Il y a actuellement des gens qui sont en prison (NDLR, sur le territoire syrien notamment) et qui sont tenus parce que les Américains sont là et qui vont être libérés. Ils vont vouloir revenir en France", a-t-il déclaré sur BFM TV.
"Je souhaite que tous ceux qui reviendraient en France soient immédiatement mis à la main de la justice", a-t-il ajouté.
Le ministre de l'Intérieur n'a pas voulu dire combien d'hommes et de femmes étaient potentiellement concernés ni confirmer le chiffre de "près de 130" donné par BFM TV sur la foi de "sources concordantes".
Il a cependant laissé entrevoir sur cette question une inflexion de la position des autorités françaises, qui ne voulaient pas entendre parler jusqu'ici de retour ou de rapatriement de djihadistes français, hommes ou femmes.
"D'abord ce sont des Français avant d'être des djihadistes, certains sont déjà revenus (...) Nous les connaissons et ceux qui reviendront, s'ils devaient revenir, seront mis en prison", a-t-il déclaré. "Ils sont actuellement en Syrie ou en Irak, je ne suis pas maître de leur destin et de leurs déplacements."
Jusque-là, les dirigeants français répétaient que les combattants djihadistes français capturés en Syrie ou en Irak devaient être jugés par les autorités locales et non rapatriés sur le territoire national.
"Ils ne seront pas rapatriés en France, dans la mesure où ce sont des combattants, donc ce sont des ennemis", déclarait ainsi en février 2018 le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian. "Ils seront jugés par ceux qu'ils ont combattus (...), par les autorités judiciaires locales."
Le Quai d'Orsay n'a pas répondu dans l'immédiat aux questions de Reuters. Mais selon des sources diplomatiques, les autorités françaises s'interrogent sur ce qu'il adviendra des djihadistes français et de leurs familles après le retrait des Etats-Unis annoncé par Donald Trump.
Paris redoute notamment qu'ils tombent entre les mains d'un régime qui pourraient les utiliser comme moyen de pression ou les laissent en liberté et leur permettent ainsi de disparaître.
Le député Nicolas Dupont-Aignan, président du parti Debout la France, a estimé que "le rapatriement des 130 djihadistes est un acte irresponsable du gouvernement qui met en danger les Français" car ils deviendront "des bombes ambulantes dès leurs sortie" de prison.
"La seule sentence pour ces individus doit être le bannissement sur un lieu isolé comme les Îles Kerguelen", poursuit-il dans un communiqué. "Ce bannissement serait évidemment encadré par la justice."
(Emmanuel Jarry et John Irish, avec Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse)