PARIS (Reuters) - Le chef Paul Bocuse, cuisinier reconnu à travers le monde qui aurait fêté ses 92 ans le 11 février prochain, est décédé samedi matin dans sa maison de Collonges-au-Mont-d’Or (Rhône), là où il est né.
"Aujourd'hui la gastronomie française perd une figure mythique qui l'aura profondément transformée", a déploré Emmanuel Macron dans un communiqué. "Son nom seul résumait la gastronomie française dans sa générosité, son respect des traditions mais aussi son inventivité".
Le chef étoilé, qui avait repris l'auberge familiale de Collonges-au-Mont-d’Or dans les années 1960, était un homme d'affaire avisé qui avait bâti un empire en exportant et démocratisant la gastronomie française aux quatre coins de la planète et qui, selon l'hebdomadaire Challenges, représentait plus de 50 millions d'euros de ventes annuelles.
"La Nouvelle Cuisine, dont il fut un père fondateur, parfois critiquée ou incomprise, ouvrit pour la cuisine française un chapitre glorieux qui aujourd'hui lui permet d’occuper le premier rang mondial, faisant partout la fierté de la France et des Français", a précisé le chef de l'Etat.
Héritier d’une longue lignée de cuisiniers, Paul Bocuse avait conquis rapidement ses trois étoiles, distinction reconduite sans discontinuer depuis 1965 par le guide Michelin (PA:MICP).
Dans son auberge, où il recevait personnellement, en toute simplicité, toque sur la tête, les grands de ce monde, "Monsieur Paul" pratiquait une cuisine classique française "au beurre", basée sur l’excellence des produits et refusant les courants de mode.
Ses grands titres, parmi lesquels "la Soupe VGE à la truffe" (VGE du nom de l'ancien président Valéry Giscard d'Estaing), "le rouget en écailles de pommes de terre", "la poularde aux morilles", "le loup en croute sauce Choron", "le filet de sole aux nouilles Fernand Point", étaient inscrits à sa carte depuis plusieurs décennies.
"MONSIEUR PAUL, C'ÉTAIT LA FRANCE"
De son auberge, il développe une marque, avant d'ouvrir onze brasseries, dont deux au Japon et une en Floride dans le parc Disney Land, mais également quatre fast-food sous le nom "Ouest express" ainsi qu’un hôtel.
Il est également le fondateur de l’Institut Bocuse, une grande école de cuisine et des arts de la table installée au château du Vivier d’Ecully, près de Lyon, mais également à Shanghaï. Deux adresses dans lesquelles sont formés des étudiants du monde entier.
Sa renommée internationale s’est également développée avec les "Bocuse d’Or". Le concours culinaire le plus connu au monde, créé en 1987, et dont la finale, organisée sous la forme de véritables Jeux olympiques de la gastronomie amène les équipes nationales à affronter leurs talents à Lyon tous les deux ans.
"On a perdu notre dieu", a dit Christophe Marguin président des Toques blanches lyonnaises, sur BFMTV. "Il nous mis sur le devant de la scène, il a fait sortir les cuisiniers de leurs cuisines (...) On lui doit tout. Que ce soient des générations qui ont 80 ans, 60 ans, 30 ans, le monde de notre métier est triste."
Le ministre de l'Intérieur et ancien maire de Lyon, Gérard Collomb, proche du chef cuisinier, a salué samedi "le pape de la gastronomie".
"Monsieur Paul, c’était la France", a-t-il écrit sur son compte Twitter (NYSE:TWTR). "Puissent nos chefs, à Lyon, comme aux quatre coins du monde, longtemps cultiver les fruits de sa passion."
A "L'Auberge de Collonges" qui était ouverte samedi et affichait complet, et devant laquelle se sont massés cameras, journalistes, et curieux, l’heure était au recueillement.
(Catherine Lagrande, édité par Caroline Pailliez et Nicolas Delame)