PARIS (Reuters) - Dévoilé mardi après avoir été reporté à plusieurs reprises, le plan national de lutte contre les addictions du gouvernement prévoit essentiellement de renforcer des mesures déjà en vigueur, sans hausse de la taxe sur les boissons alcoolisées.
Chaque année en France, "le tabac et l’alcool sont responsables du décès respectivement de 73.000 et de 49.000 personnes. Ces chiffres ne sont pas acceptables", estime le Premier ministre Edouard Philippe en introduction de ce rapport rendu public par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca).
"L'enjeu principal est de doter nos enfants des compétences leur permettant de réduire leurs comportements à risque et de les faire grandir dans un environnement plus protecteur, les exposant moins à d’incessantes incitations", poursuit-il.
Ligne directrice de ce plan 2018-2022 qui fixe 19 priorités et contient plus de 200 mesures, la prévention couplée à une meilleure information des risques pour la santé. La taille du pictogramme "femme enceinte" accolé sur les boissons alcolisées sera ainsi "significativement" augmentée et plus visible.
Plus globalement, le plan prévoit des "scénarios d’évolution du texte du message sanitaire législatif pour en faire un message non modifiable et sans mention complémentaire, renouvelé périodiquement, avec des contraintes réglementaires de visibilité et de lisibilité".
Le "Fonds tabac" va être lui transformé en un "Fonds addictions", destiné à financer des actions de prévention des addictions, une mesure qui sera intégrée dans le PLFSS pour 2019. Le fonds sera notamment alimenté par l'amende forfaitaire pour usage de stupéfiants.
"TESTING"
Selon la Mildeca, "la faible application de la loi encadrant la vente de tabac et d’alcool, notamment aux mineurs, explique aussi la facilité d’accès aux produits". Pour y remédier, le plan prévoit d'étendre l’amende forfaitaire délictuelle au délit de vente d’alcool aux mineurs et de multiplier les "opérations de testing" visant à observer le degré de respect de la législation sur "un territoire donné".
Concernant les "salles de shoot" controversées - les salles "de consommation de drogue à moindre risque" -, le plan prévoit de poursuivre cette expérimentation et envisage "l’ouverture d’autres structures pour répondre à des besoins non couverts (y compris en Ile-de-France), si nécessaire".
Le plan ne prévoit en revanche aucune hausse des taxes sur l'alcool tout en prenant acte du fait que, selon l’OCDE, une "augmentation de 10 % du prix des boissons alcoolisées et l’adoption d’une série de mesures réglementaires pourraient produire des effets considérables".
Mais, poursuit le rapport en citant la Cour des comptes, "l’absence de règles communes (au sein de l'Union européenne) de taxation en fonction du contenu en alcool pur constitue un obstacle pour un usage de la fiscalité à des fins de santé publique."
Selon la Mildeca, le coût social total de la consommation d'alcool et de tabac a été estimé, en 2010, à environ 120 milliards d’euros et à près de 10 milliards pour les drogues illicites. Quelque 20 milliards d'euros sont supportés par l’Etat et l’assurance maladie (soit 1,1 % du PIB).
L’Office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS) chiffre quant à lui à 3,2 milliards d’euros le chiffre d’affaires du trafic de stupéfiants en France.
(Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse)