PARIS (Reuters) - Simple remplacement poste pour poste ou recomposition plus large : le remaniement provoqué par le départ du ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, s'annonce délicat pour l'exécutif, qui tente de se relancer après un été et une rentrée tourmentés.
Selon Le Monde, le remaniement serait annoncé "en début de semaine", avant le conseil des ministres et le départ d'Emmanuel Macron pour l'Arménie prévus mercredi. Une information que l'Elysée, contactée par Reuters, a refusé de confirmer.
Signe de la volonté du chef de l'Etat de se laisser du temps, le chef du gouvernement, Edouard Philippe, a été nommé ministre de l'Intérieur par intérim, un système de "double casquette" rarement utilisé sous la Ve République.
"Le Premier ministre et le président de la République prendront le temps nécessaire pour choisir la personne qui sera amenée à remplacer Gérard Collomb et cela est simplement une affaire de quelques jours", a prévenu mercredi le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.
L'enjeu est de taille pour les deux têtes de l'exécutif, en chute libre dans les sondages et déjà ébranlées par les démissions surprises, à la fin de l'été, du ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, et de sa collègue des Sports, Laura Flessel.
"RENFORCER LE GOUVERNEMENT"
Si Emmanuel Macron avait choisi à l'époque de procéder à un remaniement a minima, en faisant entrer François de Rugy et Roxana Maracineanu, il pourrait être tenté cette fois-ci de procéder à un changement plus large en faisant sortir certains ministres fragilisés.
"Je pense qu'il y a un intérêt à renforcer le gouvernement", a estimé vendredi sur RTL Aurore Bergé, porte-parole du groupe La République en Marche (LaRem) à l'Assemblée nationale.
"Il faut faire preuve d'audace en faisant un remaniement large, ce qu'on aurait dû faire dès le départ de Hulot", abonde un autre député du parti présidentiel.
"D'autres ministres ont déjà fait connaître leur appétence pour les élections à venir : municipales à Paris pour Benjamin Griveaux et Mounir Mahjoubi, européennes pour Marlène Schiappa et Brune Poirson. Donc leur départ du gouvernement sera posé tôt ou tard", ajoute cet élu.
A l'Elysée comme à Matignon, on entretenait le mystère vendredi quant à l'ampleur du remodelage à venir et le profil du ou des potentiels entrants.
Les départs successifs de François Bayrou (MoDem), Nicolas Hulot (Ecologiste) ou encore Laura Flessel (société civile) pourraient donc amener l'Elysée à procéder à un rééquilibrage afin que les engagements du chef de l'Etat en matière de parité et d'ouverture à la société civile soient respectés.
"CRISE POLITIQUE"
L'exécutif doit également s'assurer, via la direction générale des Finances publiques et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), que les potentiels entrants sont en règle et qu'ils ne se trouvaient pas dans des situations de conflit d’intérêt
En la matière, "il ne faut pas confondre vitesse et précipitation", a rappelé mercredi devant la presse parlementaire le président de l'Assemblée, Richard Ferrand.
Les rumeurs vont bon train sur l'identité du futur "premier flic de France". Les noms des ministres Christophe Castaner et Jean-Yves Le Drian ou encore de l'ancien directeur général de la police national Frédéric Péchenard reviennent avec insistance. Ce dernier a assuré au Journal du dimanche que "personne ne (lui) avait rien proposé".
Le bras de fer inédit engagé par Gérard Collomb et l'Elysée en début de semaine et le moment de flottement qui s'en est suivi ont offert à l'opposition une nouvelle fenêtre d'attaque, deux mois après la tempête soulevée par l'affaire Benalla.
"Emmanuel Macron n'a pas de parti, il avait quelques piliers mais qui se sont effondrés les uns après les autres", a raillé la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen vendredi lors d'une visite au Mondial de l'automobile. "Trois ministres d'Etat dans la nature en l'espace d'un peu plus d'un an (François Bayrou, Nicolas Hulot et Gérard Collomb-NDLR), c'est incontestablement une crise politique."
Invité de France 2, le Premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a dit attendre "moins un remaniement des hommes qu’un remaniement de la politique qui est conduite".
(Marine Pennetier et Elizabeth Pineau, avec Jean-Baptiste Vey et Simon Carraud, édité par Yves Clarisse)