par Gilbert Reilhac
SAINT-DIE-DES-VOSGES (Reuters) - Emmanuel Macron a poursuivi mercredi la pédagogie de sa politique en allant au contact - parfois rugueux - des Français rencontrés dans les rues de Saint-Dié-des-Vosges, auxquels il a assuré que le train de réformes ne s'arrêterait pas.
Après avoir accordé deux interviews télévisées en quatre jours et joué mardi soir le professeur d'Europe face à 400 Français à Epinal, autre ville des Vosges, un département qui a accordé 44,74% des voix à Marine Le Pen au second tour en 2017, le président a multiplié les visites de boutiques, serré d'innombrables mains et affronté des syndicalistes de la CGT.
"Vous pouvez râler, mais ne bloquez pas tout le pays", a-t-il répondu aux représentants des cheminots qui l'entouraient en leur demandant d'accepter un changement parce que "vous êtes plus protégés que des fonctionnaires".
Le président français, qui venait faire la promotion du programme Action cœur de ville, plan de revitalisation des centres-villes dont doivent bénéficier 222 villes moyennes, n'a passé qu'une dizaine de minutes en mairie avant de déambuler dans les rues de Saint-Dié, s'arrêtant au hasard des rencontres.
S’il n’a pas échappé à quelques sifflets et banderoles hostiles, Emmanuel Macron, qui renouait avec les bains de foule à un an des élections européennes, a aussi obtenu des marques de soutien inquiètes de la part des Français rencontrés.
"Tenez le cap parce que ça, c’est important", lui lance un homme à propos de la lutte contre les paradis fiscaux. "Pensez à nos retraités et à nos aides-soignantes", ajoute une femme.
Un homme lui étreint le bras : "On attend les réformes, mais faites attention à ce qu’elles soient équitables et justes", dit-il au président qui le rassure d’un "oui, oui".
"L'HABITUDE DE LA PLAINTE"
Mais c'est l'expression du mécontentement à la SNCF, dans la fonction publique ou dans les universités qui a dominé et dont il a dit prendre la mesure, sans que cela ne change son opinion.
"Les gens n'étaient pas heureux, sinon il n'y aurait pas eu ce choc en mai dernier qui a fait justement que j'ai été élu", a-t-il dit. "Donc il y avait une colère qui était là dans le pays et les gens ne voient la situation se bouleverser, se changer qu'à la fin de ces transformations. Donc il y a parfois de l'impatience, il y a des colères qui sont légitimes mais il faut expliquer, il faut poursuivre ces réformes."
"On l'a fait pour la loi travail (..) on le fera pour la SNCF, on le fera pour la réforme des universités, on le fera sur tout ce sur quoi je me suis engagé, avec beaucoup de calme, avec parfois des moments où il faut se mobiliser et expliquer avec une détermination constante mais avec aussi le respect pour toutes les Françaises et tous les Français qui, eux, ne manifestent pas, qui croient au mérite et au travail et ont envie que notre pays réussisse", a-t-il ajouté.
"On a pris en France une habitude qui est l'habitude de la plainte. On ne propose plus, on ne veut plus, mais on est contre, on regarde son petit bout de lopin et on dit 'voilà, moi on m'a enlevé ça'. On s'est habitués parfois à ne pas prendre toutes ses responsabilités."
Ce qu'il fera, a-t-il dit, sans tenir compte des sondages plutôt mauvais pour l'exécutif ces temps-ci.
"La seule manière de redresser le pays, la seule manière de rentrer pleinement dans le siècle qui est là, de réussir, et tout le monde peut réussir, c'est de prendre sa part de responsabilité", a-t-il expliqué.
Et Emmanuel Macron n'entend pas céder à la contestation.
"Ce sont des gens qui décident d'être contre tout, contre l'égalité républicaine. Ils veulent juste pas, non pas qu'un président de la République puisse redresser le pays, ils veulent rien. Ils veulent bloquer, il veulent contester, donc eux ça s'appelle en effet des activistes", a-t-il dit.
"Elle ne va pas s'évaporer la contestation, tant qu'on a la réforme à conduire. Je ne vais pas différer les réformes pour que je puisse me promener dans les rues tranquillement et puis je ne vais pas me calfeutrer. Transformer un pays c'est ça."
(Aveec Julie Carriat, édité par Yves Clarisse)