par Simon Carraud
PARIS (Reuters) - L'Ile-de-France est l'objet d'un âpre duel entre le socialiste Claude Bartolone et la chef de file de la droite, Valérie Pécresse, qui espère arracher à la gauche ce fief imprenable depuis 1998.
Dans cette région, la plus riche et la plus peuplée de France, les derniers sondages prêtent une bonne longueur d'avance à la liste Les Républicains-UDI-MoDem au second tour en cas de triangulaire, probable, avec un Front national en plein essor dont les listes sont emmenées par Wallerand de Saint-Just, ancien compagnon de route de Jean-Marie Le Pen.
L'enjeu dépasse les frontières des huit départements de la région capitale : un succès de la gauche lui permettrait d'atténuer les effets d'éventuelles défaites ailleurs et la droite tiendrait son trophée face à une majorité fragilisée.
Mais la campagne ne se résume plus à ce seul duel : le Front national, qui avait échoué à moins de 10% il y a cinq ans, est cette fois-ci en position d'accéder au second tour.
Dans un sondage Odoxa réalisé du 19 au 21 novembre, Valérie Pécresse distance nettement Claude Bartolone, qui se retrouve à égalité avec Wallerand de Saint-Just au premier tour : 33% pour la liste LR-UDI-MoDem, 23% pour le président de l'Assemblée et le candidat du FN.
Au second tour, malgré de bons reports de voix, Claude Bartolone serait battu par l'ancienne ministre de Nicolas Sarkozy (40% contre 35%) et Wallerand de Saint-Just recueillerait 25% des voix.
Galvanisé par les bons scores du FN dans les sondages depuis les attentats de Paris, l'avocat, qui avait recueilli moins de 7% dans le XVe arrondissement aux municipales de 2014, a mis en cause "la responsabilité morale et intellectuelle des hommes politiques et des intellectuels" dans les événements du 13 novembre.
LE FN AU CENTRE DU JEU
"A la place de Claude Bartolone, je m'interrogerais sur ma responsabilité", a déclaré sur France Inter celui qui, après avoir introduit le mot-dièse "#ExaequoAvecBarto" sur les réseaux sociaux, proclame désormais : "#WallerandPasseDevant".
Le président de l'Assemblée, en lequel la majorité fonde ses espoirs après l'éviction du président sortant Jean-Paul Huchon, qui briguait un quatrième mandat à la tête de la région, affirme faire campagne "par devoir".
"Si j'avais dit 'non' pour préserver mon petit confort personnel et mon statut, je n'aurais pas pu me regarder dans la glace", explique-t-il.
Son duel face à Valérie Pécresse, sèchement battue en 2010 avec 43,31% suffrages au second tour, a tourné aux invectives, aux polémiques, voire aux plaintes en diffamation.
Claude Bartolone accuse la députée des Yvelines d'envoyer des "messages subliminaux" aux électeurs du FN faute de réserve de voix pour le second tour.
"Les vrais adversaires du FN, c'est nous", réplique Valérie Pécresse. "Ne soyez pas les dindons de la farce des socialistes qui instrumentalisent le FN pour nous faire perdre", répète-t-elle à ses électeurs.
Même s'ils concourent séparément au premier tour, la secrétaire nationale d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Emmanuelle Cosse, et Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste, sont prêts à prêter renfort à Claude Bartolone au second tour.
A droite, Nicolas Dupont-Aignan entretient le doute.
(avec Sophie Louet et Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)