PARIS (Reuters) - L'ONG Human Rights Watch (HRW) appelle mercredi Emmanuel Macron à s'opposer sans ambiguïté au développement des armes létales autonomes en soutenant l'adoption d'un traité d'interdiction international de ces "robots-tueurs".
Dans un rapport publié à quelques jours d'une réunion des membres de la Convention sur certaines armes classiques (CCAC) à l'Onu du 21 au 23 novembre, l'ONG juge contradictoire la position de la France dans ces discussions.
"Alors que le président Emmanuel Macron s'est dit 'catégoriquement opposé' au développement des robots tueurs (...), la France ne propose que l'adoption d'une déclaration politique au niveau des Nations Unies", note le rapport, qui explique "cette position peu ambitieuse" par une "tentation" du ministère des Armées et des industriels de la défense de se lancer dans une course aux armes autonomes.
Human Rights Watch appelle à interdire sans tarder les systèmes d'armes dotés d'autonomie sur les fonctions essentielles de choix et d'attaque de la cible et à imposer "des lignes directrices claires" aux industriels.
L'armée française développe d'ores et déjà des systèmes de défense actifs capables de repérer des cibles et déclencher une réponse en autonomie une fois activés, poursuit le rapport, citant l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm.
Le système de protection des blindés Galix, de l'entreprise Lacroix, ou la torpille F21 présentée l'an dernier par Naval group comme "le préfigurateur de ce que pourraient être les drones sous-marins de demain" sont notamment cités.
INFLÉCHIR LA POSITION DES PUISSANCES
Mais aussi les programmes de recherche Neuron de Dassault Aviation (drone de combat), Furious (robots des unités de combat de l'armée de Terre) ou le Man-Machine Teaming confié en mars dernier à Dassault Aviation et à Thales (PA:TCFP) par la Direction générale de l'Armement (DGA) pour développer un "système aérien cognitif".
A l'heure où les ventes d'armes françaises à l'Arabie saoudite dans le cadre du conflit au Yémen font l'objet d'une contestation croissante, la "campagne contre les robots tueurs" qui réunit 85 organisations veut croire à la possibilité d'infléchir la position de grandes puissances militaires.
"Le Yémen, il y a six mois on n'en parlait pas et aujourd'hui c'est dans le débat public et on a du mal à imaginer qu'on ne va pas aller vers un contrôle plus renforcé des ventes d'armes. A mon avis la question des robots tueurs dans les prochaines années ne va pas échapper à ce type de débat", a déclaré Tony Fortin, de l'Observatoire des armements, à l'occasion de la présentation du rapport.
L'ONG relève, qu'outre la France, le groupe russe Kalashnikov développe des drones de combat autonomes dotés de capacités d'apprentissage, les Américains de Raytheon exploitent un système antimissile en autonomie supervisée et, à la frontière des deux Corées, le robot sentinelle SGR-A1 de Samsung (KS:005930) chargé de détecter les intrus à plus de trois kilomètres à la ronde dispose d'une mitrailleuse "dont l'activation est à ce jour autorisée par un humain".
(Julie Carriat, édité par Yves Clarisse)