NANTES (Reuters) - Un collectif d'élus locaux opposés au projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) a demandé mercredi au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat et les collectivités locales pour avoir refusé de demander au groupe Vinci la restitution de subventions publiques.
Une "convention de co-financement" avait été signée en décembre 2010, portant sur le versement échelonné entre 2011 et 2017 de 165 millions d'euros à Aéroports du Grand Ouest (AGO), filiale du groupe Vinci concessionnaire du projet, dont 90 à la charge de l'Etat et 75 à celle des collectivités locales.
Le rapporteur public, dont les avis sont la plupart du temps suivis, a préconisé de donner en partie raison aux opposants car ces aides n'avaient pas fait l'objet d'une notification préalable à la Commission européenne, comme la loi l'exige. Cette notification avait eu lieu deux ans plus tard, et la Commission avait admis en décembre 2013 la "compatibilité" des aides avec les règles européennes.
"L'Etat devait attendre la décision de la Commission avant de verser ces sommes", a fait valoir à l'audience la magistrate, qui a reconnu "l'illégalité" des refus de demandes de restitution. "Or, il est constant qu'elles ont été versées à partir de 2011, et que leur notification à la Commission européenne n'a eu lieu qu'en 2013."
Le rapporteur public a toutefois estimé que l'Etat et les collectivités locales devaient demander sous trois mois la restitution des seuls intérêts, et non du capital, dans la mesure où cela avait constitué un "avantage concurrentiel" pour le groupe Vinci, qui n'avait pas eu à emprunter ces sommes sur les marchés financiers.
Les juges, qui ont mis leur décision en délibéré, rendront leur jugement dans un mois environ.
En attendant, les conclusions du rapporteur public ont satisfait les opposants au projet d'aéroport.
"Il y a eu de 2011 à 2013 le versement de sommes non négligeables, de près de 38 millions d'euros", a réagi Françoise Verchère, co-présidente du Collectif des élus doutant de la pertinence du projet d'aéroport (Cédpa).
"Dans cette période où l'argent public fait défaut, les collectivités locales feraient bien de rentrer ces sommes dans leurs caisses. Le préjudice, il est évidemment pour le contribuable : les seuls intérêts pourraient monter à 450.000 euros, ce n'est pas négligeable par les temps qui courent."
D'autres recours, portant sur le respect des dispositions de la loi sur l'eau et de la protection des espèces protégées, ont également été introduits par les opposants au projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Le tribunal administratif de Nantes n'a pas encore fait connaître leurs dates d'examen.
La construction de cet "aéroport interrégional", qui divise la population locale depuis près de quarante ans, a été conditionnée par François Hollande à l'extinction de tous les recours juridiques contre le projet.
(Guillaume Frouin, édité par Yves Clarisse)