Confrontée à l'origine au scepticisme de l'Etat à l'égard du concept du TGV, la SNCF a su tenir bon avec raison: le train le plus rapide du monde, qui a modifié drastiquement la façon de voyager, célèbre ses 30 ans jalonnés de records.
Pour fêter l'événement, une rame "TGV Expérience" spécialement aménagée inaugure samedi une tournée anniversaire de trois mois dans 16 villes de France et d'Europe, avec une première étape symbolique: la gare de Lyon Perrache.
C'est là que le premier TGV exploité commercialement avait achevé son parcours le 27 septembre 1981, cinq jours après son inauguration par le président François Mitterrand.
La dernière étape de ce "Tour de France" sera tout aussi symbolique le 14 juillet: Dijon, sur le parcours de la LGV Rhin-Rhône qui doit entrer en service en décembre.
"Cet anniversaire est une grande joie et une grande fierté", confie à l'AFP François Lacôte, directeur technique chez Alstom Transport, qui a piloté le programme TGV à la SNCF puis chez Alstom à partir de 1982, et se souvient de "combats difficiles" avec les pouvoirs publics.
"Aucun homme politique n'était favorable au TGV. Pour eux, c'était une idée d'ingénieurs qui allait coûter très cher, comme le Concorde", souligne-t-il.
Du coup, la SNCF a payé seule la facture de 18 milliards de francs (2,74 milliards d'euros) de la première ligne Paris-Lyon. Pour la seconde, le TGV Atlantique inauguré à la fin des années 1980, l'Etat a financé 30% des infrastructures.
Dès 1981, le TGV a battu le record du monde de vitesse sur rail (380 km/h), un exploit réédité à plusieurs reprises jusqu'au 3 avril 2007 (574,8 km/h).
Le train vedette de la SNCF a fait office des années durant de vache à lait, mais les charges supplémentaires et la hausse des péages (droits de passage versés à Réseau ferré de France) affectent aujourd'hui son équilibre économique, selon la SNCF.
Barbara Dalibard, directrice générale de SNCF Voyages, affirmait fin 2010 que la rentabilité du TGV "décroît à grande vitesse", laissant entendre que des dessertes pourraient disparaître. Selon la SNCF, 30% des lignes TGV ne sont actuellement pas rentables.
En 2012, l'exploitant du réseau devrait acquitter 190 millions de péages en plus - dont 50 millions d'euros générés par la LGV Rhin-Rhône -, soit une hausse de 5,9% par rapport aux 3,2 milliards de cette année, a précisé RFF à l'AFP.
Le péage pour le TGV a progressé de 6,4% en 2009, 11% en 2010 et 11,7% en 2011 pour atteindre 11 euros en moyenne par train-kilomètre. En 2012, la hausse devrait être de 1,5%.
Malgré l'augmentation du prix des billets, le TGV est pour 84% des Français un moyen de rapprocher les familles, selon un sondage Ipsos pour la SNCF. Selon 78% des personnes interrogées fin mars, il a changé les perceptions de l'espace et du temps et 66% se souviennent de leur premier voyage en TGV.
"Il y a une relation affective absolument incroyable entre le TGV et notre pays. (...) Le TGV est une fierté française, et on n'en a pas tant que ça", relevait récemment Guillaume Pepy, PDG de la SNCF.
"Nous avons réussi à mettre le temps de l'avion à la portée de la bourse de ceux qui prenaient le train en seconde classe", dit M. Lacôte, se souvenant qu'au début, les gens "disaient +je prends le TGV+, pas +le train+, parce que c'était ringard de prendre le train".
Depuis 1981, quelque 650 TGV ont été commandés dans le monde (540 en France, 111 à l'exportation), selon des chiffres 2010 d'Alstom Transport, constructeur du train à grande vitesse imaginé par la SNCF.
Quelque 2.000 km de nouvelles LGV devraient apparaître en France d'ici 2020, sans compter les projets à l'étranger (Arabie Saoudite, Etats-Unis).