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Espagne, nouveau tournant de la réforme bancaire

Publié le 21/11/2012 09:38
Recapitalisation et transferts d’actifs toxiques vers une structure de gestion ad hoc semblent en bonne voie, mais le lien banques-Etat n’est pas brisé pour autant.

ƒ- Sans surprise, les décrets-lois royaux (DLR) de février et mai 2012 sur le renforcement des provisions ont pesé lourd sur les résultats du troisième trimestre.
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- Outre son incidence sur la qualité des actifs, la dégradation de la conjoncture espagnole commence aussi à freiner la génération de revenus récurrents.
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- Les modalités de transfert d’actifs à la bad bank ont été détaillées, et la recapitalisation de huit établissements en difficulté est prévue pour la fin 2012 et le début 2013. De possibles nouvelles provisions accentueraient toutefois la morosité des perspectives de profits en 2013.
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- L’Espagne continue de reculer le moment auquel elle officialiserait sa demande d’aide internationale. Les marchés pourraient perdre patience et venir compliquer le déroulement de la restructuration bancaire.

Vers un exercice 2012 déficitaire, l’horizon 2013 reste sombre
Dans son rapport de novembre sur la stabilité financière, la Banque d’Espagne a publié les comptes de l’ensemble du secteur bancaire au premier semestre 2012. Celui-ci a fait état d’une perte nette agrégée de EUR3,1 mds après un profit net de EUR7,8 mds un an plus tôt. Cette perte a majoritairement relevé des quatre entités (Banco de Valencia, CatalunyaCaixa, NovaCaixaGalicia et Bankia) sous le contrôle du FROB 1 , l’agence publique de restructuration du système bancaire, sur fond de hausse des provisions et de récession. Ces groupes mis à part, le reste du secteur s’est maintenu sur une ligne bénéficiaire (EUR2,8 mds).

Les résultats pour les neuf premiers mois de 2012 publiés fin octobre confirment cette tendance. Les cinq premiers groupes bancaires cotés 2 ont essuyé une perte nette agrégée de EUR3,2 mds (contre un bénéfice net de EUR10 mds à la même période de 2011), principalement imputable à la perte de EUR7,1 mds de Bankia. Les autres banques de l’échantillon ont néanmoins toutes accusé un repli substantiel de leurs profits nets sur un an, de 38% pour Banco Popular à 80% pour CaixaBank. Santander et BBVA ne sont plus totalement épargnés par le marasme de leur marché domestique, sur lequel ces groupes restent tout de même exposés à concurrence de 40% à 50% de leurs revenus.

Les rachats de banques fragiles par les plus solides 3 n’ont pas amélioré la situation puisque ces opérations ont occasionné des charges de restructuration exceptionnelles et une perte additionnelle sur les revenus générés en Espagne (BBVA a pu neutraliser partiellement cet effet grâce à la santé de ses filiales latino-américaines), et une dégradation plus rapide de leur taux de créances non performantes. En outre, l’acquisition d’Unnim a entraîné une hausse de l’exposition de BBVA au risque souverain espagnol, alors que celle de Banca Civica a détérioré le ratio de solvabilité Bâle 2 de CaixaBank. La réduction des coûts (rationalisation des réseaux de la banque de détail, licenciements) qui a notamment cours dans les entités de moyenne et petite taille (anciennes caisses dont CaixaBank et Bankia) 4 , a toutefois été plus que compensée à l’échelle du secteur par les charges liées aux fusions impliquant les grands groupes. L’augmentation des frais généraux est toutefois restée moins forte que celle du produit net bancaire, autorisant la poursuite de la progression de l’excédent brut d’exploitation.

Provisions : une formidable contrainte sur la profitabilité
Alors que le coût du risque pour prêts non performants (impayés à plus de 3 mois et crédits sous surveillance) a plus que doublé en un an, en rythme avec la détérioration économique du pays, les résultats trimestriels depuis le début de l’exercice 2012 ont aussi été largement grevés par les nouvelles provisions sur actifs physiques, imposées par les réformes de février et mai dernier (DLR 2/2012 et 18/2012 respectivement). 5 Tandis que le premier décret-loi a obligé les banques à accroître le provisionnement de leurs expositions immobilières à risque (hausse des dotations aux provisions pour créances douteuses), ce qui a amputé le résultat avant impôt, le second a étendu le renforcement des réserves à la partie encore saine des actifs et prêts liés à la construction et aux promoteurs immobiliers. Celles-ci, comptabilisées en charges exceptionnelles, ont directement affecté le résultat net.

L’effort de provisionnement relatif à la réforme de février a eu rétroactivement une incidence forte sur le quatrième trimestre 2011, alors que les banques ont choisi de concentrer au deuxième semestre 2012 l’essentiel des dotations supplémentaires au titre de la réforme de mai. Dans ce cadre, à fin septembre, Santander, BBVA, CaixaBank et Bankia se trouvaient déjà proches (entre 67% et 90%) de leurs objectifs respectifs de provisionnement. Au T4, il restera à Santander à passer EUR680m de dotations, contre EUR1,5 md chacune pour BBVA, CaixaBank et Bankia. Banco Popular prévoit d’effectuer au T4 l’essentiel de ses provisions supplémentaires estimées à EUR9,3 mds, en même temps que la banque procèdera à une augmentation de capital de EUR2,5 mds, ce qui devrait lui éviter d’avoir recours à l’aide publique. Bankia, pour sa part, n’y a pas échappé en raison de ses pertes récurrentes et de sa forte exposition immobilière. Conformément au plan de restructuration présenté en mai dernier aux autorités de tutelle pour relever son ratio core Tier 1 tombé à 4,7% (contre un seuil règlementaire minimal de 9% imposé par le DLR de février) et une moyenne arithmétique de 10,5% pour les quatre autres grandes banques commerciales), l’institution a été recapitalisée une première fois à hauteur de EUR4,5 mds en septembre, soit un quart de ses besoins en fonds propres. 6 Le reste lui sera apporté par le FROB avant la fin de l’année, lequel utilisera la ligne de crédit, plafonnée à EUR100 mds, dont l’Espagne peut bénéficier via le MES 7 à la suite de l’accord de juin dernier avec ses partenaires européens (voir plus bas au sujet de la recapitalisation).

Récession : pression sur la qualité des actifs et les marges
L’Espagne s’est de nouveau enfoncée dans la récession en 2012. Le PIB réel devrait se contracter de 1,5% cette année, à l’issue de deux exercices consécutifs de recul de l’activité en 2009-2010 (-3,7% puis -0,3%). La récession devrait se prolonger en 2013 (prévision BNP Paribas de -1,3%), entraînant la poursuite de la hausse du taux de chômage, ininterrompue depuis la mi-2007. Celui-ci devrait atteindre 25,1% à fin 2012 et 26,9% à fin 2013, contre un plus bas niveau de 8,1% il y a cinq ans.

Cette évolution rend illusoire pour les banques une stabilisation de la qualité de crédit. Le stock de crédits non performants a recommencé à accélérer depuis le premier trimestre 2010 (+39,7% en glissement annuel en août 2012), alimenté par un flux soutenu de nouvelles créances douteuses mais aussi un taux de migration plus élevé des prêts sous surveillance vers la catégorie des prêts non performants, qui reflète une attitude plus volontaire des établissements dans la classification de leurs portefeuilles de crédits.

En août, le ratio de prêts non performants a conservé une orientation extrêmement haussière, atteignant un nouveau record 6 Le FROB a souscrit à l’augmentation de capital de BFA, maison-mère de Bankia, qui a ensuite injecté les capitaux dans sa filiale. 7 MES : mécanisme européen de stabilité. Pour un décryptage du sommet européen des 18 et 19 octobre derniers, cf. « Sommet de l’UE, les points clés », Ecoweek 12-38 du 19 octobre 2012, F. Cerisier et Th. Mercier. à 10,51% (graphique 1), sous l’effet de la vague de défauts frappant les secteurs sinistrés de la construction et de la promotion immobilière (le ratio trimestriel de prêts non performants y était de 27,4% en septembre), et plus particulièrement les PME. Si la qualité de crédit sur le secteur de l’habitat reste relativement bonne (ratio de prêts non performants stable à 3,2% en septembre), l’actualité sociale récente sur le phénomène des expulsions, pour cause de suspension ou d’arrêt de remboursement de crédits hypothécaires par des ménages endettés, suggère qu’une détérioration sur ce plan est peut-être en train de s’amorcer.

La Banque d’Espagne n’a pas actualisé en novembre les chiffres qu’elle avait livrés dans ses précédents rapports sur la stabilité financière, y compris dans celui de mai dernier, sur l’exposition risquée et non risquée du secteur bancaire à l’immobilier. 8 Au dernier point connu de décembre 2011, celle-ci s’élevait à EUR308 mds, dont une exposition problématique de EUR184 mds. Le contexte suggère néanmoins que le risque a dû augmenter entre temps, dans la mesure où la qualité de crédit a continué de se dégrader et où seule une minorité d’établissements (Santander et Bankia) ont commencé à se délester d’une partie de leurs actifs toxiques.

Au-delà de son incidence sur le coût du risque, la situation conjoncturelle a aussi entamé la dynamique jusqu’alors assez préservée du produit net bancaire (PNB), grâce à une certaine tenue des revenus nets d’intérêts, qui en composent l’essentiel. Si la progression des marges était encore robuste en glissement annuel sur les neuf premiers mois cumulés de 2012, leur ralentissement apparaît plus nettement en variation trimestrielle. Pour certaines banques, elles ont même baissé au T3 voire aussi au T2, montrant que la plus grande part des revenus de l’année 2012 a été générée en tout début d’exercice. Le marché domestique pénalise donc de plus en plus les revenus, y compris pour Santander et BBVA, malgré leur diversification géographique hors zone euro.

L’évolution des revenus nets d’intérêts reflète le deleveraging à l’œuvre, qui retentit sur la croissance des prêts mais aussi et surtout celle des dépôts. L’encours de crédit se contracte depuis environ deux ans et la baisse est allée s’intensifiant (-5% sur douze mois en août), touchant toutes les clientèles et tous les objets. Les encours de dépôts diminuent depuis la mi-2011, et plus fortement que les crédits depuis cette année, sur fonds de croissance étale des revenus, de hausse du chômage et de désendettement (graphique 2). Cependant, le repli des dépôts traduit aussi une réallocation d’épargne vers des instruments financiers, en l’occurrence des obligations émises par les banques elles-mêmes. Cette tendance, plus marquée du côté des entreprises que des ménages, a été encouragée par les régulations introduites en 2011 par la Banque d’Espagne (et levées fin août) visant à pénaliser les entités qui rémunéraient excessivement leurs dépôts. En incorporant ces obligations aux encours de dépôts, on obtient un agrégat large qui décroît, certes, mais moins vite que le stock de prêts. L’affaiblissement des marges provient toutefois du renchérissement du coût moyen pondéré des ressources qui résulte de ce transfert d’épargne.

En 2013, les marges devraient continuer de s’éroder. La production nouvelle de crédits ne devrait pas se redresser à court terme, laissant inopérantes les tentatives de repricing. En outre, il existe un risque de renchérissement supplémentaire des ressources. En premier lieu, le refinancement BCE pourrait refluer à partir d’un niveau record, si la pression des marchés continue de se relâcher sous l’effet des annonces récentes de politique monétaire (OMT) 9 , ce qui permettrait à certaines entités de revenir sur les marchés wholesale. En second lieu, la concurrence entre banques et la levée des sanctions sur les taux de dépôts excessifs ne devraient pas inciter les différents acteurs à assagir leur politique de rémunération.

La recapitalisation est lancée, l’enveloppe européenne devrait être suffisante, la bad bank est sur les rails
Les besoins de recapitalisation liés aux provisions supplémentaires ont été affinés par le cabinet de conseil Oliver Wyman, et publiés dans son récent rapport. 10 A l’issue d’une analyse approfondie des actifs de chaque établissement, il est apparu que cinq banques (les quatre nationalisées, rassemblées dans le « groupe 1 », plus Banco Mare Nostrum) présentent déjà un déficit de fonds propres dans un scénario macroéconomique de base. Trois autres banques (Banco Popular, Unicaja-CEISS et Liberbank) seraient en déficit uniquement dans le cas du scénario adverse.

Début novembre, la Banque d’Espagne a défini le périmètre des huit institutions qui bénéficieront d’une recapitalisation par le FROB. Il s’agit du groupe 1, pour un montant total maximal de EUR46,2 mds, et de Banco Mare Nostrum, Caja3, CEISS et Liberbank, classées dans le « groupe 2 » (tableau 1), pour un montant maximal de EUR6,4mds. 11 Ces estimations (nettes d’impôts) sont celles d’Oliver Wyman dans un scénario adverse. Le montant de la recapitalisation 12 pourra in fine être moindre car les entités concernées vont préalablement devoir faire jouer les clauses de bail-in (partage des pertes entre actionnaires et créanciers, y compris les porteurs de dette subordonnée), dégager des gains en capital en cédant des actifs ou en en transférant certains à la bad bank, la Sareb 13 , qui est en train d’être mise sur pied.


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