La nouvelle est passée relativement inaperçue : la Banque centrale indienne a baissé la semaine dernière son taux directeur de 25 points de base. Ce dernier a été porté à 6,50%, son niveau le plus bas depuis près de cinq ans.
Bien sûr, comparés aux taux zéro en vigueur dans la Zone euro, ou au taux négatifs au Japon, la politique monétaire indienne semble encore assez restrictive. Sauf que nous ne sommes absolument pas dans la même logique économique. Alors que l’Europe se débat avec la déflation au point de pratiquer une politique monétaire très agressive, l’Inde se doit de combattre une inflation encore forte.
La hausse des prix atteint encore 5,5%, limitant la poursuite de cette politique de baisse de taux. Certes, la Banque centrale indienne peut baisser encore de 75 points de base les taux d’intérêt, mais guère plus.
Lorsqu’on regarde les chiffres de l’Inde stricto sensu, ceux-ci semblent satisfaisants. Le pays surpasse la Zone euro (ce n’est pas une surprise) et même la Chine avec une croissance de 7,3% sur le quatrième trimestre 2015. On estime que l’Inde aura la plus forte croissance économique parmi les grandes nations mondiales en 2016.
Tout semble baigner donc ! Hélas, ce serait sans analyser de plus près ces chiffres. Il faut savoir que cette croissance, si forte soit elle, ne suffit pas à absorber l’augmentation de la population active. Il faudrait un taux de croissance de 8% pour faire face aux nouveaux entrants sur le marché de l’emploi chaque année et stabiliser le chômage à 7%.
Pas simple ! D’autant que les inégalités sont encore importantes. Par exemple, 25% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et la moitié des enfants de moins de cinq ans souffre de malnutrition.
Regardons également de près le pouvoir d’achat moyen des Indiens : force est de constater qu’il y a encore un retard important. Il est de 300€ par mois et par habitant contre 2000€ dans l’Union européenne. Le retard est également énorme dans l’éducation et la santé. Les dépenses de santé représentent seulement 4% du PIB contre 6% pour la Chine. On peut dire que le système de santé indien est digne d’un pays sous-développé avec des taux de mortalité infantile encore très élevés.
Quant à l’éducation, les dépenses n’atteignent pas encore les 4% du PIB. Le système de castes éloigne du marché du travail certaines catégories de la société. Il y a d’ailleurs de plus en plus de grogne au point que des Cassandre évoquent un printemps de révoltes sociales. De nombreuses manifestations spontanées ont lieu pour mettre fin aux injustices de castes au sein du système scolaire.
Si le pays n’est pas au bord de l’implosion, il ne faudrait pas que les choses s’enveniment dans les prochaines semaines, sous peine de menacer le fragile équilibre du pays.