Ce n'est au final pas la Grèce qui aura fait défaut sur sa dette cet été mais Porto Rico, territoire des Grandes Antilles rattaché aux Etats-Unis (sans faire toutefois parti des 50 Etats américains). Hier, Alejandro García Padilla, gouverneur de Porto Rico, a déclaré que l'archipel était dans l'incapacité de rembourser sa dette publique : sur les 58 millions de dollars qu'il devait rembourser le 3 août, il n'en a remboursé que 628 000. La dette publique totale de Porto Rico est actuellement de 73 milliards de dollars, ce qui n'est pas grand chose comparé aux 350 milliards de dollars de dette grecque. Alors pourquoi un défaut total de Porto Rico pourrait être dangereux ?
Car durant des années, le gouvernement américain a favorisé l'achat de dette portoricaine par ses citoyens en mettant en place un système d'exemption fiscal sur les intérêts perçus sur la dette portoricaine (dispositif connu sous l'appellation "Triple Tax Exemption") : il ne faut pas oublier qu'aux Etats-Unis le système de retraite repose sur la capitalisation. L'archipel en a alors profité pour s'endetter outrancièrement puisque de nombreux fonds de pensions américains (puis Hedge Funds) achetaient sa dette (hausse de l'offre compensée par une hausse de la demande).
Mais la fin en 2006 d'un système d'exemption fiscale pour les entreprises et la crise des subprimes ont fortement endommagé l'économie de Porto Rico qui doit aujourd'hui faire face à un chômage important (12,6 % en juin 2015), donc à une émigration massive qui fait mécaniquement baisser les rentrées fiscales, dégrade les prestations publiques et fait entrer l'archipel dans un cercle vicieux dont la seule sortie semble être le défaut. Les nombreux fonds qui ont investi en dette portoricaine se retrouveraient alors en difficulté avec les pertes en capital induites. Un défaut total de Porto Rico combiné aux autres difficultés de l'économie américaine (dette étudiante, dette extérieure, baisse des investissements dans le pétrole de schiste...) risque bien d'être l'élément déclencheur de la prochaine crise financière aux Etats-Unis.