En comptant lever 10 milliards d'euros ce jeudi, l'Hexagone pourra une nouvelle fois profiter des taux de financement avantageux, même si ceux-ci sont quelque peu remontés ces dernières semaines, depuis la victoire de Donald Trump et dans un contexte d'incertitudes politiques.
Les élections présidentielles françaises se passent en effet dans un climat agité, caractérisé par une croissance qui peine à remonter, un taux de chômage à deux chiffres, et une élite qui perd de plus en plus de crédibilité, laissant place à une tentation des électeurs de basculer dans l’extrême.
La montée du populisme en Europe, lié notamment à la crise migratoire, pousse d'autant plus les investisseurs à se demander si Marine Le Pen ne sera pas la prochaine sur la liste des surprises, après le vote du Brexit, l’élection de Donald Trump et le rejet des réformes constitutionnelles par les Italiens.
Selon les derniers sondages, la présidente du Front National remporterait en effet le premier tour pour se voir nettement devancée au second tour par François Fillon. Pour Marine Le Pen, le candidat Républicain est un adversaire de taille, puisqu’il incarne la droite conservatrice et, de par ses valeurs et sa position sur l’économie, pourrait récupérer tout un pan de l’électorat frontiste.
Les rendements des obligations en hausse
L’incertitude et la nervosité des investisseurs fait en sorte que les taux d’emprunt de la France ont davantage augmenté que ceux des autres pays de la zone euro, avec un spread entre le bons du trésor français et allemand à 10 ans qui s’est creusé de 20 points de base depuis la victoire de Trump. Cette remontée des taux est en outre concomitante à l’annonce de la BCE de la réduction du montant mensuel de ses achats d’actifs à partir d’avril prochain.
C'est dans ce contexte que la France va émettre plusiers milliards d'euros et va notamment abonder sa ligne obligataire 1,75% - 2066. Echangeable par coupures de 1 euro, l’obligation se traite aux alentours de 93,25%, de quoi tabler sur un rendement annuel de 1,96%. Notons que seul le coupon sera soumis au précompte mobilier de 30%, alors que la plus-value en sera exonérée.
En offrant une rémunération inférieure à 2% sur une période de près de 50 ans, l’Hexagone se finance à bon compte, scénario inimaginable il y a quelques années.
Se financer à très long terme fut d'ailleurs une tendance grandissante au cours de l'année écoulée. Sur la seule année 2016, la zone Euro a émis pour 19 milliards d’euros de dette à plus de 40 ans, près de quinze fois plus qu’un an auparavant. L’appétit des investisseurs pour ce type d’actif augmente puisque ces derniers, en regard de la faiblesse des taux d’intérêts, se voient contraints de choisir des obligations à échéance plus longue pour obtenir du rendement. Parmi les investisseurs séduits par ces obligations, l’on retrouve notamment les fonds de pensions et certains Hedge Funds.
Il est à noter que, si cette méthode de financement est intéressante pour l'émetteur, l'investisseur doit lui être conscient que les obligations à très long terme figurent parmi les plus sensibles en cas de remontée des taux d’intérêts.