Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Attaquée bille en tête par des actionnaires activistes, la levée de fonds que souhaitait la direction d’Unibail-Rodamco-Westfield n’aura finalement pas lieu. Reste maintenant à faire le nécessaire pour assainir le bilan de la foncière, comme l’explique Eric Lewin dans cette analyse.
L’événement est historique et fera date dans les annales du capitalisme français. Il concerne la foncière Unibail-Rodamco-Westfield, qui a retrouvé grâce aux yeux des investisseurs cette semaine à la suite de l’annonce de Pfizer (NYSE:PFE) lundi selon laquelle son candidat-vaccin fabriqué avec la biotech allemande BioNTech serait « efficace à 90% ». Le Covid-19 est encore loin d’être vaincu, mais l’horizon pourrait s’éclaircir pour le secteur, touché de plein fouet par la pandémie.
En attendant des jours meilleurs, les actionnaires activistes menés par le duo Xavier Niel-Léon Bressler a réussi à faire plier la direction d’Unibail-Rodamco-Westfield, contrainte de renoncer à son projet d’augmentation de capital. D’un montant de 3,5 Mds€, celle-ci était, il est vrai, ultra-dilutive. J’avais d’ailleurs émis les plus vives réserves à son sujet dans le dernier mensuel La Lettre PEA BigMidcaps.
Cette levée de fonds n’aura récolté que 60% de votes favorables durant la dernière Assemblée générale, insuffisant pour la faire valider. Et pour « couronner le tout », MM. Bressler et Niel, mais aussi l’héritière espagnole Susana Gallardo, vont entrer au conseil de surveillance du groupe.
Cette annonce a entraîné un bond de près de 21% du titre mardi, au lendemain, déjà, d’une hausse de 24% à la suite des déclarations de Pfizer.
Indépendamment de la neutralisation de cette augmentation de capital, controversée, mais que certains jugeaient nécessaire eu égard à une dette de plus de 25 Mds€, la foncière ne doit pas non plus rester les bras croisés. Voulue par les activistes susmentionnés, la cession des actifs américains prendra du temps, sous réserve bien sûr que la direction trouve un terrain d’entente dans cette optique.
Une situation financière très délicate
Or, il faut agir vite, sachant que la foncière doit par exemple sécuriser un accès au marché de la dette avec un refinancement dès 2021 de près de 3 Mds€ de dette. N’oublions pas non plus, par ailleurs, que le rating actuel d’Unibail-Rodamco-Westfield, actuellement noté « A- » par Standard and Poor’s, pourrait être abaissé s’il ne se passe rien au niveau du bilan.
Au bout du compte, le rejet de l’augmentation de capital n’est qu’une étape avant une « vraie » politique à mettre en œuvre pour améliorer la situation financière de la foncière. De ce processus complexe découlera en tout cas l’essentiel de la future valorisation boursière, dans la mesure où, sans vaccin disponible rapidement, les centres commerciaux continueront de souffrir durement de cette crise sanitaire hélas partie pour durer encore de longs mois.
Enfin, du côté du management, il semble évident que le mandat de l’actuel président Christophe Cuvillier a désormais du plomb dans l’aile. Des activistes représentant 5% de l’actionnariat d’Unibail-Rodamco-Westfield auront fait capoter son projet, mais le feuilleton ne fait sans doute que commencer…