Les semaines d’indécision se poursuivent sur les marchés financiers, tant les catalyseurs ont été pressés comme des citrons en début d’année : valorisations, banques centrales, confiance dans l’économie, résolution ordonnée du Brexit, faible taux de défaut persistant grâce à la politique de taux zéro, normalisation de l’Italie à la suite du discours d’abord arrangeant du gouvernement, entente entre les USA et la Chine sur un accord commercial…
Et depuis fin avril, il semblerait que certains process se figent et que d’autres se craquèlent, suffisamment pour inquiéter les marchés, déjà bien valorisés, notamment sur les marchés de crédit européens sur lesquels les taux n’ont jamais été aussi bas, y compris en 2015 en plein essor du QE :
- Les investisseurs rechignent à continuer d’acheter les indices haut rendement à 2,5% ou 3% de rendement, et on peut les comprendre, surtout lorsque l’on assiste au cas Casino dont nous reparlerons un peu plus bas.
- Les banques centrales, notamment la BCE, semblent à la croisée des chemins et plus indécises que jamais, tant les vents économiques et politiques soufflent tous azimuts.
- Les banques privées ont du mal à assurer une liquidité convenable, tant les primes sont faibles et le coût des fonds propres élevé du fait de la réglementation.
- Les statistiques économiques ne montrent pas de sens clair, en particulier en Europe où la locomotive allemande pourrait bien être à court de carburant.
- Le Brexit patine et la démission de Theresa May ce week-end pourrait bien augmenter significativement la probabilité d’un non-accord, dévalorisant tout à la fois la Livre Sterling, mais aussi probablement l’Euro à court terme, les marchés actions anglais et les actifs liés au Royaume-Uni, notamment certaines banques comme Santander (MC:SAN) ou certains assureurs comme Aviva…
- Le taux de défaut reste peut-être bas d’un point de vue statistique mais les deux semaines passées ont tout de même offert aux investisseurs deux cas particulièrement sanglants de restructuration avec Thomas Cook la semaine passée et Rallye cette semaine. On pourra certes arguer que ce sont des restructurations ou des renégociations de dette mais avec 80% de perte pour les créanciers, nous nous passerons de ce genre de subtilité.
- L’Italie semble clairement sur une pente glissante avec un gouvernement qui commence à se distendre, des mesures de plus en plus coûteuses, un parlement de plus en plus agressif, la Commission Européenne qui pourrait revenir à la charge dès cette semaine post-élections européennes et surtout des statistiques économiques très incertaines et propres à alourdir significativement l’endettement pour les années à venir… Et si Monsieur Salvini a affirmé que la dette ne dépasserait pas 140%, c’est probablement parce qu’il le craint et souhaite appliquer la méthode Coué… On ne parle jamais de ce que l’on n’imagine pas un instant, par définition.
- Enfin, l’accord commercial USA/Chine semble s’éloigner dangereusement et le meilleur des cas serait aujourd’hui un accord en demi-teinte d’ici la fin du premier mandat de Trump mais plus l’accord franc et solide qu’espéraient les marchés il y a quelques mois… Evidemment, on pourrait imaginer que ce puisse être positif pour l’Europe si elle parvient à se positionner comme médiateur et comme zone neutre de commerce, mais peut aussi et surtout craindre que l’Europe soit le dommage collatéral de la lutte entre ces deux superpuissances, pas assez solide et unie pour se faire entendre, trop faible économiquement pour négocier quoi que ce soit, voire servir de monnaie d’échange et de bouc-émissaire si les négociations venaient à se crisper définitivement. Ainsi, si Monsieur Trump perdait la face contre la Chine, il est fort à parier qu’il se lance à l’assaut de l’Europe assez rapidement…