PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy s'en est pris vivement à la politique de lutte antiterroriste et anti-radicalisation du gouvernement tout en se défendant d'alimenter une polémique, trois jours après l'attentat de Nice revendiqué par le groupe Etat islamique.
Le président des Républicains, qui n'a pas officialisé sa candidature à l'élection présidentielle de 2017, avait prévenu vendredi qu'il y aurait un moment pour "dire les choses" après la course meurtrière au volant d'un camion, jeudi soir sur la Promenade des Anglais, de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel dont les motivations restent floues.
"Je sais que le risque zéro n'existe pas", a dit l'ancien chef de l'Etat sur TF1 (PA:TFFP) dimanche soir. "Je le sais parfaitement et je sais qu'on ne se déchire pas alors que des victimes n'ont pas encore été enterrées".
"Mais je veux dire, parce que c'est la vérité, que tout ce qui aurait du être fait depuis 18 mois (...) ne l'a pas été", a-t-il ajouté. "L'enquête est en cours et je ne dirai jamais que j'aurais pu éviter ceci ou cela, respectons les victimes mais tout n'a pas été fait".
Nicolas Sarkozy a notamment demandé l'ouverture de centres de déradicalisation - un centre doit être ouvert cet été - l'expulsion des personnes étrangères fichées S et le placement en centre de rétention ou sous bracelet électronique de celles présentant un risque de radicalisation.
"Avec cela, on engage vraiment la guerre", a-t-il souligné.
Concernant la décision de François Hollande de faire appel à la réserve militaire opérationnelle, Nicolas Sarkozy a estimé que cette mesure n'allait pas en soi "résoudre le problème du terrorisme".
"POLEMIQUE"
Le gouvernmeent a immédiatement réagi à ces propos.
"Contrairement à ce que le président du parti Les Républicains a affirmé ce soir, aucun Gouvernement n’a fait autant jusqu’à présent pour lutter contre le terrorisme", disent le chef du gouvernement et le ministre de l'Intérieur, dans un communiqué commun.
Parlant d'une "mobilisation totale", Manuel Valls et Bernard Cazeneuve rappellent notamment que 9.000 emplois de policiers et de gendarmes ont été recréés sur l’ensemble du quinquennat, "quand 12.500 avaient été supprimés entre 2007 et 2012".
"Nous répondons ensuite par l’adaptation de nos outils juridiques", poursuivent-ils, soulignant que trois lois antiterroristes et une loi renseignement ont été adoptées au cours du quinquennat.
Contrairement aux attentats de janvier et novembre qui ont secoué la France en 2015, l'opposition de droite a mis en cause la responsabilité du gouvernement immédiatement après l'attaque de Nice, qui a fait au moins 84 morts.
Le maire de Bordeaux et candidat à la primaire de la droite Alain Juppé a notamment estimé que "si tous les moyens avaient été pris, le drame n’aurait pas eu lieu".
Des accusations dénoncées par François Hollande qui s'est élevé samedi, par la voix du porte-parole du gouvernement, contre des "tentations de diviser" le pays et a appelé une nouvelle fois à l'unité.
"C'est de mon devoir de responsable politique de dire qu'il y a une autre politique qui est possible, qu'il y a de choses qu'on aurait du faire qui n'ont pas été faites", a déclaré Nicolas Sarkozy.
"J'essaie d'expliquer aux Français que le risque zéro n'existe pas mais que nous avons une obligation de moyens pour assurer leur sécurité, prendre des décisions tout de suite".
"Ce n'est pas de la polémique ou alors dans ce cas là il faut qu'on ferme la démocratie, qu'on ne débatte plus de rien", a-t-il ajouté.
Les déclarations de Nicolas Sarkozy ont également fait réagir le ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, qui a dénoncé le "culot" de l'ex-chef de l'Etat. "Regarder le JT de TF1 et se dire que le culot finit par remplacer ce qui fut une forme de talent", a-t-il écrit sur son compte Twitter.
Le projet de loi contre le terrorisme a été adopté en mai par le Parlement. Il assouplit les règles d'usage des armes par les forces de l'ordre et prévoit une assignation à résidence d'un mois pour les personnes de retour de zones de combats comme la Syrie.
Il renforce en outrre la lutte contre les trafics d'armes, réintroduit la possibilité de fouilles intégrales dans les prisons, inclut le personnel pénitentiaire dans le cercle du renseignement et pénalise la consultation sur internet de sites terroristes.
(Marine Pennetier et Jean-Philippe Lefief, édité par Simon Carraud et Gilles Trequesser)