PARIS (Reuters) - Le sénateur Serge Dassault, dont le tribunal a relevé la "duplicité", a été condamné jeudi à une amende de deux millions d'euros et à cinq ans d'inéligibilité et d'interdiction d'exercer une fonction publique pour blanchiment de fraude fiscale et omissions dans ses déclarations de patrimoine.
L'"ampleur" de la fraude, sa "durée" et "les fonctions politiques exercées durant une partie de la période" par le prévenu auraient pu justifier une peine de prison ferme, a jugé le président.
Mais le tribunal correctionnel de Paris a estimé que le sénateur de près de 92 ans, président d'honneur de Dassault Aviation ne pouvait être condamné à une peine de prison, même avec sursis, "compte tenu de son grand âge".
"Ces faits, qui nuisent aux intérêts financiers de l'Etat, se sont déroulés durant une période où Serge Dassault, outre la direction d'un groupe bénéficiant largement de la commande publique, exerçait parallèlement un mandat parlementaire qui le conduisait à se prononcer sur le budget de l'Etat mais également sur les différentes législations fiscales et pénales portant sur la fraude fiscale et le blanchiment", souligne le tribunal dans son jugement.
"Ils révèlent, de sa part, une forme de duplicité", ajoute-t-il.
Les avocats de Serge Dassault ont annoncé qu'ils feraient appel de ce jugement.
"Il y a des vraies questions juridiques qui méritent d'aller en appel", a déclaré Me Jacqueline Laffont.
DES STRUCTURES HERITEES DE MARCEL DASSAULT
Sur le fond, il n'y a "aucune implication personnelle (de notre client), il a découvert ces éléments (tardivement) et les a régularisé dès qu'il les a découverts", a-t-elle assuré.
Serge Dassault était poursuivi pour avoir dissimulé plus de onze millions d'euros au fisc sur des comptes à l'étranger entre 1999 et 2014. Il lui était également reproché d'avoir omis de déclarer ces fonds dans ses déclarations de patrimoine.
Le PNF avait requis sa condamnation à deux ans de prison avec sursis, neuf millions d'euros d'amende et cinq ans d'inéligibilité.
La défense avait plaidé la relaxe, affirmant que le sénateur avait régularisé sa situation fiscale en 2014, au moment même où il avait découvert l'existence de quatre structures juridiques à l'étranger "héritées" de son père.
Selon ses avocats, les fonds avaient été placés dans ces fondations à l'étranger dans les années 1950 par Marcel Dassault, qui avait "peur de revivre la guerre" et voulait "protéger sa famille".
Mais le tribunal a estimé que Serge Dassault "avait en sa possession, en toute connaissance de cause, les fonds litigieux depuis de longues années".
"Le tribunal considère non seulement que les faits reprochés sont graves mais que ce n'est que contraint et forcé par le développement des enquêtes judiciaires que Serge Dassault a entamé les démarches ayant effectivement abouti au paiement d'une somme importante à l'administration fiscale", dit le jugement.
(Chine Labbé, édité par Yves Clarisse)