Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Le nouveau tour de vis du gouvernement – et des pays membres de l’UE dans leur ensemble – pour tenter de juguler la pandémie de Covid-19 est un nouveau clou dans le secteur du tourisme et pourrait compromettre les projets de vacances de millions de nos concitoyens…
Le gouvernement vient-il seulement d’encourager les Français à prendre quelques jours de vacances pour la Toussaint qu’il se dote déjà d’un arsenal législatif pour rendre les règles sanitaires (encore) plus contraignantes, avec notamment la possibilité de rétablir l’interdiction des déplacements au-delà de 100 kilomètres de son lieu de résidence, suivant ce qui avait déjà été instauré durant le confinement du printemps.
Dans ces conditions, il apparaît peu probable que les réservations pour les vacances de Noël décollent et redonnent de l’espoir au secteur du tourisme en France (une destination à oublier si l’on ne peut plus s’y déplacer librement), et par extension à celui de l’automobile (quel intérêt de changer de véhicule avant les fêtes de fin d’année ?).
72 heures avant que la menace d’une limitation des déplacements intra-hexagonaux ressurgisse, les ministres des Affaires européennes, réunis à Luxembourg, avaient déjà adopté des critères communs concernant les limitations de voyage et les quarantaines dans l’UE, dans une logique d’harmonisation des règles de gestion de la pandémie de Covid-19.
Les ministres ont d’abord adopté une cartographie commune répertoriant les « zones à risque » au sein de l’Union, laquelle sera actualisée chaque semaine, avec un « code couleurs » commun en fonction du niveau de risque d’une zone : vert, orange, rouge.
Le problème, c’est que chaque pays a sa propre définition du risque, parfois avec des arrières-pensées politiques, et des modifications arbitraires sont susceptibles d’intervenir du jour au lendemain en fonction de critères ou d’enjeux nationaux. La France nous en a apporté la preuve…
Selon les recommandations du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), les voyageurs venant d’une zone orange, rouge ou grise peuvent se voir imposer à l’arrivée un dépistage et/ou une quarantaine d’une durée à définir, ce qui constitue déjà une incertitude d’importance qui peut être fortement dissuasive. Et si les Etats membres ne peuvent pas refuser l’entrée sur leur territoire de voyageurs venant d’un autre pays de l’UE, le problème des « admissions » se trouve partiellement résolu si plus aucun avion ne vole (faute de passagers).
Quant à ceux qui auront réussi à trouver un billet d’avion (ou de TGV), la règle est la mise en quarantaine en cas de fièvre (détectée avec un contrôle de la température corporelle dans les gares ou les aéroports). Cela se complique encore s’il s’agit d’un voyage en famille avec les enfants, ce qui multiplie les chances de ne pouvoir monter dans l’avion et donc de devoir renoncer à un voyage… et à la mise de fonds qui va avec.
L’arrêt de mort des critères de Maastricht
Les exemptions de quarantaine ne concerneront que les voyageurs exerçant un certain nombre de fonctions jugées essentielles… mais il y a pire ! Des voyageurs habitant une zone verte (qui pourrait ne pas le rester et basculer dans le rouge en quelques jours) et qui auraient réservé un séjour dans un pays qui semblait moins draconien sur les questions sanitaires s’exposent à la mise en place – au débotté – de mesures restrictives à l’encontre de voyageurs issus d’une zone jugée à risque, mais qui ne l’était pas au moment de la réservation de leur voyage.
Les Etats membres n’ont aucune autre obligation que celle de respecter un délai de 48 heures avant l’entrée en vigueur de mesures sanitaires (ce qui fut fait avec l’annonce du couvre-feu en France) et pour les voyageurs, l’avertissement doit simplement avoir été signifié 24 heures à l’avance.
Un peu court pour se retourner, annuler toutes les réservations et sauver tout ou partie de sa mise… Ainsi une répétition du scénario de la fin des vacances d’hiver (mi-mars) et de printemps (Pâques), lorsque des centaines de millions d’euros de réservations de billets d’avions, de locations et d’hôtels ont été perdus, pour les prestataires et leurs clients, pourrait-il se répéter. Le gouvernement français vient d’ailleurs d’appeler les assureurs à indemniser les entreprises concernées pour leurs pertes d’exploitation, y compris pour raisons sanitaires.
Le cas particulier de la problématique touristique, c’est à des degrés divers celui de tous les secteurs économiques qui sont tributaires de décisions gouvernementales prises en quelques heures, sans preuve scientifique d’une efficacité à court comme à moyen terme… Et si, de leur côté, les marchés ne lâchent toujours rien, c’est qu’ils continuent d’anticiper que la succession de décisions aléatoires et apparemment incohérentes a comme principale conséquence de contraindre les banques centrales à inonder d’argent magique les pays les plus alarmistes sur la deuxième vague.
Une fuite en avant dans la dette qui, accessoirement, sonne le glas des critères de Maastricht (3% de déficits, ratio dette/PIB de 60%).