Avis de gros temps sur la livre turque. La devise a brutalement plongé face au dollar et à l’euro en séance jeudi, après la décision de la Banque centrale de Turquie de relever l’un de ses taux directeurs, mais de manière moins importante qu’espérée par les cambistes.
Ceux-ci pariaient plutôt sur un relèvement de 100 points de base (1%) des taux d’intérêt. Ils ont dû se contenter d'une hausse de 50 points de base (0,5%) à 12,75% du taux des prêts des liquidités tardives (Late liquidity). En outre, les autres taux (refinancement à une semaine et prêts au jour le jour) restent inchangés.
Inflation à deux chiffres
Le contexte économique plaidait pourtant pour une politique monétaire plus restrictive, après l’annonce en début de semaine d’une croissance de 11,1% du PIB turc au troisième trimestre tandis que l’inflation évolue bien au-delà de l’objectif de 5% fixé par la Banque centrale. Elle a en effet atteint 13% le mois dernier. À telle enseigne que certains observateurs s’inquiètent désormais d’une surchauffe de l’économie.
Ce scénario contraste avec les années précédentes où le pays a été confronté à la faiblesse de la croissance en zone euro, à la récession en Russie, aux conflits en Irak et en Syrie, mais également au coup d’État manqué de juillet 2016. Celui-ci a eu une série de répercussions négatives : abaissement de la note souveraine, dégradation des relations avec ses voisins européens et les États-Unis, instabilité politique… Le tourisme, qui contribue à 65% du PIB et constitue une rentrée essentielle de devises, a été particulièrement affecté.
Politique de relance
L’institution monétaire a sans doute voulu ménager Recep Tayyip Erdogan. Le président turc s’oppose à une politique monétaire trop restrictive et privilégie la relance économique par la consommation et les investissements. La progression du PIB est attendue autour de 7,5% cette année.
La Banque centrale reste toutefois déterminée à intervenir si nécessaire, comme elle le laisse entendre dans son communiqué : les anticipations d'inflation, le comportement des prix et d'autres facteurs affectant l'évolution des prix seront suivis de près et, au besoin, d'autres mesures de resserrement monétaire seront prises, précise-t-elle.
Sur le marché des changes, la livre turque s’est nettement affaiblie face à la monnaie unique puisqu’elle est passée à 4,5855 pour un euro jeudi soir contre 4,509 mercredi en fin de journée.
Précisons que les analystes répertoriés par Bloomberg anticipent un taux de change euro/livre turque de 4,86 à un horizon de 12 mois.
Profiter de l’accès de faiblesse de la livre
Les investisseurs qui souhaiteraient profiter de l'accès de faiblesse de la livre pour se positionner sur la devise peuvent notamment acheter des emprunts libellés dans la monnaie locale.
Pour ne citer qu'un exemple, il y a cette obligation de la Banque européenne d’investissement (BEI) d’une maturité égale au 7 octobre 2020 assortie d’un coupon de 9,125% et notée « AAA » chez Standard & Poor’s. Elle peut être achetée à 92,89% du nominal, correspondant à un rendement de 12,23%. La coupure est de 1.000 livres turques (+/- 218 euros).