La demande pour la première émission d'obligations de l'UE pour financer son programme SURE (Support to Mitigate Unemployment Risks in an Emergency) a pulvérisé les records du marché obligataire, les investisseurs demandant 233 milliards d'euros d'obligations alors que seulement 17 milliards d'euros étaient proposés.
La tranche à 10 ans de 10 milliards d'euros a été évaluée à un taux de rendement de -0,24 %, considéré comme gagnant par les investisseurs par rapport aux obligations allemandes à 10 ans dont le rendement est de -0,60 %.
L'enthousiasme suscité par cette émission est de bon augure pour les 100 milliards d'euros d'obligations que l'UE prévoit d'émettre dans le cadre du programme SURE, ainsi que pour les 750 milliards d'euros qui seront versés l'année prochaine pour financer le programme de relance de l'UE.
Bruxelles a déjà promis plus de 87 milliards d'euros provenant des recettes du programme SURE à 17 pays afin d'alléger le fardeau des allocations de chômage pendant la pandémie de COVID-19.
Selon certains analystes, cette demande massive montre que les investisseurs sont à la recherche d'une alternative aux bons du Trésor américain, qui dominent le marché des obligations d'État avec 27 000 milliards de dollars de titres en circulation. L'UE a encore un long chemin à parcourir pour arriver à une fraction de ce montant. Mais la demande est clairement là.
Le succès de l'émission de l'UE a eu un effet d'entraînement immédiat sur les obligations italiennes. Le Trésor italien a reçu plus de 90 milliards d'euros d'ordres pour les 8 milliards d'euros d'obligations à 30 ans qu'il cherchait à vendre la semaine dernière, et il a pu fixer le prix des obligations à un rendement de 1,76 %, le deuxième plus bas rendement jamais atteint depuis 30 ans.
L'obligation italienne à 10 ans est tombée en dessous d'un rendement de 0,76% la semaine dernière, car le rétablissement des restrictions COVID-19 dans toute l'Europe a réaffirmé la conviction des investisseurs que la Banque Centrale Européenne va étendre son programme d'achat d'actifs.
La cerise sur le gâteau a été l'augmentation de la notation de S&P vendredi dernier. L'agence a non seulement confirmé la notation BBB des obligations italiennes, mais a également relevé la perspective de négative à stable.
Cette décision surprise a permis aux rendements des obligations italiennes à 10 ans de descendre à près de 0,67 % lors de la séance de lundi, avant de rebondir à 0,73 %. Les rendements à deux ans ont atteint près de moins 0,38 %. Les rendements obligataires évoluent à l'inverse des prix, donc des rendements plus bas signifient des prix plus élevés.
Les obligations allemandes à 10 ans, après être passées sous la barre des moins 0,62 % la semaine dernière, sont remontées à un peu plus de moins 0,58 %. Le rendement des nouvelles obligations de l'UE à 10 ans a perdu près de 10 points de base après l'émission, pour passer sous la barre des moins 0,30 %.
La recrudescence des infections au COVID-19 et le renouvellement des restrictions dans toute l'Europe ont renforcé l'intérêt pour la réunion de politique générale de la BCE cette semaine. La plupart des analystes s'attendaient à ce que la banque centrale annonce une augmentation des achats d'obligations lors de sa réunion de décembre, et les investisseurs espèrent maintenant que les décideurs politiques signaleront leurs intentions cette semaine.
L'un des signaux pourrait être une révision à la baisse des prévisions économiques, car la résurgence du COVID remet en question les projections les plus optimistes. Les avis des 25 membres du Conseil sont partagés sur la nécessité d'une nouvelle relance, mais de nouvelles préoccupations pourraient aplanir certaines divergences.
Les analystes s'attendent à ce que la BCE augmente son programme d'achat d'actifs de 500 milliards d'euros lors de la réunion de décembre, même s'il lui reste encore 750 milliards d'euros dans son programme actuel de 1,35 trillion de dollars.
En plus des inquiétudes liées au COVID, le résultat des élections américaines de la semaine prochaine pourrait créer des turbulences sur les marchés européens des obligations d'État. Un résultat indécis ou contesté pourrait encourager les mouvements vers les obligations refuges, comme celles de l'Allemagne. Un différend prolongé ou des protestations pourraient créer davantage d'incertitude et de volatilité. Certains analystes suggèrent que les marchés sous-estiment les risques des élections américaines.