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Entretien de Mario Draghi, Président de la BCE

Par Banque centrale européenne18/07/2012 14:35
 

Mario Draghi, président de la BCE, conduit par by Erik Izraelewicz, Claire Gatinois et Philippe Ricard
le 18 juillet 2012 et publié dans Le Monde daté 22-23 juillet 2012

Le Fonds monétaire international (FMI) a révisé à la baisse ses prévisions de croissance dans le monde à cause de l’Europe. Risquons-nous une récession ?
Non. Depuis le début de l’année, les risques de détérioration de l’économie que nous redoutions se sont certes en partie matérialisés. La situation a graduellement empiré mais pas au point de plonger l’ensemble des pays de l’Union monétaire dans la récession. Nous envisageons toujours une amélioration très progressive de la situation à la fin de cette année ou au début de la suivante.

Grâce à la BCE ?

Les baisses de taux d’intérêt de la fin 2011 et de juillet devraient produire leurs effets. Ainsi que les opérations de prêts à trois ans aux banques menées pour faire face à un risque de restriction du crédit.

La BCE ne devrait pas, comme le demande le FMI, faire davantage pour soulager l’économie ?

Nous sommes très ouverts et n’avons pas de tabou. Nous avons décidé de réduire les taux d’intérêt à moins de 1% car nous prédisions que l’inflation serait proche ou inférieure à 2% début 2013. Il est désormais probable qu’elle reflue dès fin 2012. Notre mandat est de maintenir la stabilité des prix pour éviter une inflation trop élevée mais aussi une baisse généralisée et globale des prix. Si nous constatons de tels risques de déflation, nous agirons.

Le Conseil européen des 28 et 29 juin a été salué par les marchés qui depuis ont exprimé des doutes.

Le sommet a été un succès. Pour la première fois, me semble-t-il, un message clair a été donné : sortir de la crise avec plus d’Europe. En mettant en place une feuille de route pour créer une union à quatre composantes : financière, fiscale, économique et politique. Avec des outils concrets: une union financière, un superviseur bancaire, des fonds de secours à même de recapitaliser les banques quand cette supervision sera en place. Et un calendrier de mise en œuvre.

Ce sont des solutions de long terme. Ne faut-il pas gérer l’urgence ?

Laissez-moi vous parler de mon expérience. En 1988, le comité Delors avait tracé la voie vers l’Union monétaire, avec un objectif, un calendrier, des engagements à respecter. Cette perspective a débouché sur le traité de Maastricht en 1992. A l’époque les taux d’emprunts de l’Italie étaient très élevés. Mais en s’engageant dans ce projet d’Union monétaire, les taux italiens se sont brusquement réduits, avant même que ne diminue le déficit qui était à 11% du PIB. Cela m’incite à penser que si les pays s’engagent de façon ferme, même à long terme, cela a des effets sur le court terme.

On reproche à la BCE de ne pas en faire plus pour les Etats La BCE attend-elle que les gouvernements fassent des efforts avant d’agir ?

Cette idée d’un marchandage entre les Etats et la BCE est un quiproquo. Notre mandat n’est pas de résoudre les problèmes financiers des Etats mais d’assurer la stabilité des prix et de contribuer à la stabilité du système financier en toute indépendance.

Que pensez-vous du pacte de croissance cher à François Hollande ?

Il aidera surement. Mais il faut aller plus loin. Chaque Etat doit aussi faire des efforts.

Vous pensez à des réformes structurelles plus qu’à de la relance keynésienne
?
Oui, même si on se focalise trop souvent sur la réforme du marché du travail qui ne se traduit pas toujours par une amélioration de la compétitivité car les entreprises profitent parfois de monopoles ou de rentes de situation. Il faut aussi regarder les marchés de produits et services et libéraliser quand c’est nécessaire. Politiquement, ce sont des décisions difficiles à prendre. Un agenda européen des réformes à mener et un renforcement de la prise de décision commune au niveau européen aideraient grandement dans ces domaines.

C’est donc la victoire des thèses libérales ?

Non. Mettre fin à certaines rentes de situation est une question de justice, pour les employés et les entrepreneurs et pour tous les citoyens.

Que pensez-vous de la politique menée en France ?

Je me félicite de la poursuite de l’assainissement budgétaire et salue aussi la priorité accordée à la croissance potentielle qui posera les jalons de la reprise. Le désendettement est indispensable. Et le pays doit respecter son engagement d’un retour du déficit à 3% du PIB en 2013 et ainsi continuer de profiter de taux d’intérêt faibles.

Vous faites partie, en Europe, des hommes les plus influents mais n’êtes pas élu. Cela ne pose-t-il pas un problème de légitimité démocratique ?

Je suis conscient de l’importance de rendre des comptes. Je vais une petite dizaine de fois par an devant le Parlement européen, et nous sommes très actifs en termes de communication. Nous sommes prêts à faire davantage, si nos pouvoirs devaient être renforcés. Dans les conditions extraordinaires actuelles, il est nécessaire de voir la BCE prendre position sur des questions qui ne peuvent pas être réglées par la politique monétaire, comme celles des déficits publics élevés, du manque de compétitivité ou des déséquilibres insoutenables, dès lors que la stabilité financière peut courir un risque. La préservation de l’euro fait partie de notre mandat.

Quand vous êtes arrivé à la tête de la BCE, vous étiez considéré comme le plus Allemand des Italiens. C’est toujours le cas ?

C'est à vous de le dire ! Nous devons maintenir la stabilité des prix dans les deux sens, faire face aux problèmes tels qu'ils se posent et agir sans préjugés.

D'une certaine façon, vous êtes très allemand quand vous soutenez les appels à l'Union politique lancés par Angela Merkel…

Tout mouvement vers une union financière, budgétaire et politique est à mon sens inévitable et conduira à la création de nouvelles entités supranationales. Dans certains pays le transfert de souveraineté - je préfère parler de partage- que cela implique est un enjeu majeur dans d’autres non. Avec la mondialisation, c’est précisément en partageant la souveraineté que les pays peuvent mieux la conserver. A long terme, l’euro doit être fondé sur une plus grande intégration.

Une sortie de Grèce de la zone euro est-elle encore d'actualité ?

Notre préférence, sans équivoque, est que la Grèce reste dans la zone euro. Mais c'est du ressort du gouvernement grec. Il a fait part de son engagement, il doit maintenant donner des résultats. Quant à la renégociation du mémorandum [pour assouplir les mesures d’austérité et les réformes imposées au pays], je ne prendrais aucune position avant d'avoir vu le rapport de la troïka.

Les ministres des finances de la zone euro ont finalisé vendredi 20 juillet le plan d’aide aux banques ? Est-ce suffisant pour éviter naufrage du pays ?

Une chose importante concerne l'implication des créanciers séniors des banques : la BCE considère qu’elle doit être possible en cas de liquidation d’une banque. Il faut protéger les épargnants, mais les créanciers devraient être associés à la résolution de la crise pour limiter l'engagement des contribuables. Ils ont déjà beaucoup payé.

Pensez-vous partir serein en vacances cet été ?

Je ne prévois jamais mes vacances et ne pars que quelques jours. Une chose est certaine je n'irai pas en Polynésie, c’est trop loin.

L'euro est donc toujours en danger ?

Non, absolument pas. On voit des analystes imaginer des scénarios d’explosion de la zone euro. C’est méconnaître le capital politique que nos dirigeants ont investi dans cette union et le soutien des Européens. L’euro est irréversible !

En tant qu'ancien de Goldman Sachs, que pensez-vous de l'affaire du Libor ?

Elle sape la confiance dans l’une des pierres angulaires du système financier mondial. Des centaines de milliers de milliards d’euros sont traitées dans des opérations financières sur la base du LIBOR. Dans de nombreux pays des particuliers achètent leur maison grâce à des crédits indexés sur lui. Le comportement de certains antagonistes et les manquements sont inqualifiables et ont mis en évidence une nouvelle fois une gouvernance fautive du processus. Deux enquêtes sont en cours au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, et une autre sur l’EURIBOR qui devront faire la lumière sur cette affaire.

Votre passage à Goldman Sachs vous met-il mal à l’aise ?

Non. J'assume cette connaissance du monde de la finance et du secteur privé. À l’évidence, il y a beaucoup à faire pour reconstruire le secteur des services financiers au lendemain de la crise même si des progrès importants ont été accomplis par les gouvernements, les autorités de contrôle et le secteur lui-même.

Chefs d’Etat et de gouvernement veulent placer la BCE au cœur de la supervision des banques. Y êtes-vous favorable ?

La Commission européenne est chargée de préparer des propositions en consultation avec la BCE et le Parlement européen. Que la banque centrale joue un rôle dans le contrôle des banques a bien fonctionné, au niveau national, notamment en France et en Italie. Si ce rôle revenait à la BCE, elle travaillerait avec les superviseurs nationaux, dont l’expérience et la capacité sont grandes.

Ne redoutez-vous pas un conflit d’intérêt entre politique monétaire et ce rôle de supervision ?

Il faut séparer politique monétaire et contrôle bancaire, afin que la première ne soit pas contaminée par le second. Vous pouvez bâtir une structure indépendante qui dans le même temps se nourrisse des informations fournies par la supervision.

Cela aurait-il permis d'éviter la crise bancaire en Espagne ?

Un système centralisé est préférable pour prendre en compte le haut degré d’intégration financière d’une union monétaire. Sur l'Espagne, la BCE a mis en garde à plusieurs reprises le pays sur le dérapage du déficit des comptes courants et la croissance excessive du crédit. Mais dans une union monétaire, la lutte contre les bulles immobilières relève de politiques macro-prudentielles nationales.

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