Malgré des efforts de restructuration, le comité central d'entreprise d'Air France, gérant les activités sociales et culturelles des quelque 53.200 salariés de la compagnie aérienne, n'a pas échappé à la cessation de paiement et a été placé mardi en redressement judiciaire.
Cette mesure, visant à protéger le CCE le temps qu'il renfloue sa trésorerie, ne signe en rien la disparition de l'instance qui prévoit d'assurer ses activités sociales "quasi normalement".
Le tribunal de grande instance de Bobigny a "reconnu la situation de cessation de paiement" du comité, confronté depuis plusieurs années à de graves difficultés financières, a indiqué à l'AFP Me Philippe Blériot, administrateur judiciaire du CCE.
Il a ainsi "prononcé la conversion de la procédure de sauvegarde, engagée le 5 février, en placement en redressement judiciaire", conformément à la demande formulée par le bureau du CCE, a précisé Me Blériot. Ce placement en redressement judiciaire s'accompagne d'une période d'observation de six mois, dont le début est fixé rétroactivement au 5 février, a-t-il précisé.
Avec cette mesure, l'administrateur reçoit des pouvoirs accrus. Il pourra désormais décider, avec l'autorisation du juge, de mettre en place de nouvelles mesures d'économies destinées à faire avancer le plan de restructuration.
Contacté par l'AFP, le secrétaire général du CCE, Didier Fauverte (CGT), s'est réjoui de cette décision de nature à donner de "l'oxygène financier" au CCE.
"Nous sommes capables de redresser la barre, car depuis deux ans nous avons une exploitation à l'équilibre, voire légèrement positive. Une fois que l'on aura bouché ce trou de trésorerie, on sera beaucoup plus à l'aise", a-t-il assuré.
Le CCE d'Air France, l'un des plus importants de France avec un budget de l'ordre de 50 à 55 millions d'euros, est confronté à de fortes turbulences depuis des années. En 2009, un déficit cumulé de 15 millions d'euros sur la période 2005-2008 était mis au jour.
Il avait été sauvé in extremis de la cessation de paiement en juillet 2012, grâce au vote d'un plan de départs volontaires (PDV) associé à un emprunt et une mise en gage de bien immobiliers. Mais la défiance à l'égard du bureau était allée croissante, une majorité d'élus estimant que la CGT n'allait pas suffisamment loin dans la restructuration et utilisait mal les fonds dégagés.
Malgré la redressement, le solde entre actifs est passifs est aujourd'hui de l'ordre de - 692.000 euros.
Économies sur la masse salariale
La CGT a repris les rênes du bureau du CCE en 2011, lançant un plan de redressement pour la période 2011-2014 qui prévoyait la vente d'environ 30% du patrimoine (ce qui devrait permettre de récupérer environ 40 millions d'euros) et des suppressions de postes sans licenciement. Un PDV a été voté à l'été 2012 visant à supprimer environ 90 postes.
Au total, environ 70 salariés du CCE se sont portés candidats au départ. D'après le mandataire judiciaire, une vingtaine de départs supplémentaires sont nécessaires pour atteindre les objectifs du plan de redressement.
Des actifs du CCE, qui possède un important patrimoine immobilier, pourraient également être cédés.
"On sait qu'on doit faire encore entre 15 et 20 départs, avec la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi" doté d'une période de volontariat", explique Didier Fauverte, avec l'objectif d'économiser 6,1 millions d'euros en masse salariale sur l'année.
"Cela nous convient, mais cette fois-ci, ni la session, ni le juge ni l'administrateur ne laisseront les choses partir dans le flou". "Il faut que l'orientation de la CGT soit carrée" et qu'une phase non volontaire de départs soit prévue", a commenté Michel Salomon, élu CFDT qui plaide pour "du dialogue et une confiance retrouvée",
Le CCE, administré par des élus du personnel, est devenu un lieu de luttes syndicales exacerbées, et de conflit musclé avec le comité d'établissement des pilotes, compliquant encore la recherche de solutions.
Un audit réalisé en janvier 2010 avait mis au jour "des dépenses à vocation personnelle" prises en charge par le budget du CCE, comme des frais de nourrice ou des contraventions, sur la période 2007-2009 où la CFDT était à sa tête. Une enquête préliminaire avait alors été ouverte pour faire la lumière sur de possibles malversations.