Plusieurs dispositions prévues par la loi Lagarde sur le crédit à la consommation entrent en vigueur dimanche et devraient modifier en profondeur les pratiques de ce marché, avec l'objectif avoué de réduire l'utilisation du crédit renouvelable, souvent lié au surendettement.
Près de deux ans et demi après les premières annonces du gouvernement, la réforme du crédit à la consommation prend véritablement corps, même si certaines mesures sont déjà effectives depuis plusieurs mois.
Parmi les mesures phares de la loi s'appliquant dimanche, la nécessité d'assortir d'une échéance tous les crédits, y compris renouvelables, ainsi que d'offrir à l'emprunteur la possibilité de choisir entre crédit renouvelable ou non pour tous les crédits d'un montant supérieur à 1.000 euros.
"C'est un texte de protection et de sécurité des consommateurs, de liberté et de responsabilité", a fait valoir vendredi la ministre de l'Economie Christine Lagarde, à l'origine du projet de loi.
"Ce que j'espère, c'est qu'on va avoir une réorientation vers davantage de crédit classique et moins de crédit renouvelable", a-t-elle ajouté.
Car si personne ou presque, associations de consommateurs comprises, ne réclame sa disparition, le crédit renouvelable était jusqu'ici régulièrement associé à un risque de dérapage budgétaire, et donc de surendettement.
En 2007, il y avait un total de 20 millions de crédits renouvelables actifs, pour un montant d'environ 33 milliards d'euros.
Il est ainsi présent dans 82% des dossiers de surendettement, selon la dernière enquête typologique de la Banque de France, publiée cette semaine.
Pour Mme Lagarde, il s'agit, par exemple, d'éviter "qu'on ne fasse un crédit renouvelable à une jeune qui veut s'acheter une voiture à 8.000 ou 9.000 euros".
"Cela aura un impact sur le surendettement, mais les choses prendront du temps", estime Emmanuel Bouriez, directeur général adjoint de CMP-Banque, filiale du Crédit municipal de Paris, très actif dans le regroupement de créances (les crédits sont fusionnés en un seul assorti d'un seul versement chaque mois).
Première raison, la nécessité d'assortir le crédit renouvelable d'une durée de 5 ans au maximum s'appliquera à tous les nouveaux crédits, mais pas aux prêts déjà consentis avant la loi.
Contraindre d'un seul coup des ménages à rembourser sur cette durée plusieurs crédits renouvelables d'un montant total important pourrait les faire basculer dans le surendettement.
Autre facteur retardant, la baisse des taux, souvent prohibitifs, des crédits renouvelables, prévue par la loi pour les rapprocher de ceux des crédits classiques, ne va s'effectuer que graduellement sur les deux prochaines années.
Troisième élément, les établissements de crédit n'ont toujours pas la possibilité de connaître le nombre de crédits qu'un emprunteur a déjà contracté.
"Donc, la capacité pour l'emprunteur de prendre une multitude de crédits dans plusieurs établissements demeure", souligne M. Bouriez.
La création d'un registre national des crédits aux particuliers (fichier "positif") est prévue par la loi. En juillet, le comité ad hoc rendra à Mme Lagarde ses propositions sur ce registre, qui devraient réduire les possibilités pour un ménage d'accumuler les crédits de manière inconsidérée.
Effet moins prévisible de la loi, elle "va durcir les conditions d'octroi pour une partie de la population, qui risque d'être exclue du crédit à la consommation", estime Eric Delannoy, vice-président du cabinet de conseil Weave.
Pour chacun des établissements de crédit, le coût de cette réforme sera d'au moins quelques dizaines de millions d'euros, voire de plusieurs centaines selon l'importance du crédit renouvelable dans leurs encours, indique M. Delannoy.