La Grèce a accueilli avec un soulagement mesuré jeudi l'accord de la zone euro pour tenter d'en finir avec le problème de sa dette, dont le fardeau restera très lourd pour le pays et qui va imposer de rudes sacrifices à la population.
Après une nuit marathon à Bruxelles, le Premier ministre grec Georges Papandréou, de retour à Athènes où il a rendu visite au président Carolos Papoulias, a espéré que cette "décision historique pour l'ensemble de l'Europe" sera suffisante pour "calmer les marchés et arrêter les attaques et la spéculation contre l'euro".
Dans une allocution télévisée en soirée, il s'est engagé à "continuer de travailler" (...) pour que "la Grèce devienne productive" en appelant à l'unité de tous les Grecs.
Concrètement, après l'accord arraché aux banques sur un renoncement à 50% de leurs créances, Athènes va entrer dans un long et délicat processus de discussion avec chacun de ses créanciers.
Ceux-ci devront accepter d'échanger volontairement les obligations qu'ils détiennent contre de nouvelles dont la valeur sera diminuée de moitié.
Le processus d'échange devrait démarrer "dans deux ou trois semaines" a indiqué Petros Christodoulou, le patron de l'agence de la dette publique grecque, la participation du secteur privé à l'opération de sauvetage devant être finalisée "début 2012".
Au total, les banques devront renoncer à 100 milliards d'euros sur un total d'endettement public du pays de plus de 350 milliards actuellement.
L'objectif est de parvenir à un taux d'endettement de 120% du PIB en 2020" (contre 165% prévu fin 2011, NDLR), a indiqué le lobby bancaire mondial IIF, qui menait les négociations face aux gouvernements.
Soit beaucoup de nuits blanches pour parvenir à terme à un endettement qui sera encore le double du taux maximum fixé par le traité de Maastricht, et équivalent à celui de l'Italie actuellement.
"L'opération va ramener le taux d'endettement exactement au niveau où il était en 2009", a martelé le leader de l'opposition grec, Antonis Samaras (droite). "Le gouvernement qui nous a mis sur cette épave ne devrait pas parler de sauvetage" a-t-il lancé.
"S'il n'y avait pas eu cet accord, la dette en 2020 aurait atteint 173% du PIB, donc il s'agit d'un allégement impressionnant", a rétorqué le ministre des Finances.
L'objectif pour la Grèce, privée d'accès aux marchés internationaux pour 10 ans selon le FMI, est de pouvoir y retourner au plus vite pour ne plus dépendre de la perfusion financière de ses partenaires.
En échange, les banques hellènes, les plus exposées en Europe au risque souverain grec, vont probablement devoir passer par une étape de nationalisation, car trop fragiles pour supporter seules le coût de la perte induite.
"Il est très probable qu'une grande partie des actions bancaires doivent passer sous le contrôle de l'Etat grec", au moins temporairement, a indiqué M. Papandréou.
Pour cela, 30 milliards d'euros ont été réservés aux banques grecques sur les 106 milliards prévus pour les recapitalisations.
Pour couvrir ses besoins financiers à venir, la Grèce pourra compter jusqu'en 2014 sur 100 milliards d'euros d'aide publique venant de l'UE et peut-être du FMI, qui avaient déjà débloqué un prêt de 110 milliards en mai 2010.
Mais cette nouvelle perfusion s'accompagnera d'une étroite surveillance de la mise en oeuvre des réformes réclamées au pays, et probablement de nouveaux efforts d'austérité imposés à la population pour réduire les déficits publics.
Message déjà perçu par la rue. "Le processus engagé va être douloureux, cela va créer des difficultés économiques pour les Grecs" estimait Nikos, enseignant, interrogé par l'AFP. Tandis que pour Evi, retraitée, les Grecs risquent de devenir "plus pauvres avec la décote".
Le Premier ministre a souligné qu'il était préférable que les créanciers du pays soient présents de façon permanente à Athènes, pour résoudre les problèmes "immédiatement", plutôt que d'avoir à supporter un psychodrame à chaque déplacement à Athènes des auditeurs chargés de vérifier les comptes publics grecs.